Si l’on s’en tient au nombre de communes qui ont adhéré au Syndicat Intercommunal à Vocation Unique (170 au début de l’été 1999 et probablement plus depuis que nous avons clos nos investigations), nous ne pouvons que constater que le message de départ lancé à partir d’une petite commune du nord du département a remporté plus qu’un succès d’estime269. Pour reprendre un terme qui nous est cher, la diffusion de l’information l’a emporté largement sur toutes les prévisions de développement. Comment s’expliquer alors, au-delà de réactions humainement compréhensibles telles que la mauvaise foi ou la frustration, qu’une si mauvaise opinion entoure le projet dans l’esprit des acteurs locaux dynamiques que sont les membres de Grimpi ? Notre rencontre avec deux maires de communes adhérentes aux Inforoutes et dotées depuis peu d’un centre de communication nous a permis de comprendre ce décalage ; certaines explications ont déjà été évoquées dans le fil de notre réflexion mais méritent d’être plus largement commentées ici.
Tout d’abord, il existe un décalage si frappant entre les chiffres annoncés et les réalités qu’ils recouvrent en termes de pratiques de la technologie qu’il est facile de comprendre pourquoi une position de méfiance a été adoptée face à l’ensemble des initiatives. Un glissement vers un objectif moins louable que celui qui a justifié la création du SIVU semble être en train de s’opérer : on se félicite du nombre de communes adhérentes en oubliant à quoi l’adhésion est censée être rattachée. Ainsi, est-il possible de parler de diffusion de l’innovation270 ou d’un développement réussi du projet quand, par exemple, sur les 170 mairies, seulement une douzaine ont demandé leur connexion à Internet ?
De plus, comme nous l’ont dit les élus rencontrés, ‘« la technologie est mise à disposition des communes qui le souhaitent mais elle n’est pas accompagnée d’un véritable projet de société ni de propositions d’usages...donc, si on a pas envie de s’en servir, ou si on ne sait pas l’utiliser, et c’est souvent le cas dans nos petites mairies, et bien à quoi ça sert de demander à être équipés’ ? ». Ainsi, sans avoir procédé à une enquête sur les motivations d’adhésion au SIVU, on ne peut qu’être tenté de valider l’interprétation des deux maires rencontrés, lesquels estiment que les trois principales raisons à l’adhésion sont la force de conviction du Père du projet, la tentation d’avoir un semblant de vitrine technologique ou en tous les cas de pouvoir communiquer sur la commune en mettant en avant l’adhésion et enfin le simple geste politique qui consiste à soutenir une initiative-amie. L’intérêt pour la technologie et la volonté de se positionner en tant que relais auprès des administrés ne sont que très peu cités dans les discussions informelles entre élus.
En outre, dans le cas où les communes s’équipent, se pose le problème déjà soulevé de la répartition des moyens et d’une nécessaire réflexion à soulever sur l’intercommunalité. Il est difficile d’aller contre la volonté des élus lorsque ceux-ci font la démarche de réclamer l’équipement auquel leur donne droit l’adhésion mais cette répartition aléatoire ne suit aucun schéma d’aménagement ou de maintien de l’activité sociale et économique sur le département. En d’autres termes, et cela rejoint l’idée précédente, il est reproché au projet de ne pas être accompagné d’une vraie réflexion sur la diffusion des télé-activités et de mettre à disposition de la population des outils, « mais rien que des outils vidés de sens ».
Enfin, dans un autre ordre d’idées, il semble que le principal grief contre le projet soit celui de l’après-Inforoutes et de la difficulté à tenir les promesses lancées. Sans entrer dans le détail de son financement, on peut prédire quelques difficultés si, victime de son succès, le SIVU doit fournir peu à peu l’ensemble des communes qui ont adhéré. Une autre zone d’ombre se profile dans un avenir pas si lointain, mais qui n’a pas été évoqué ailleurs qu’à Grimpi semble-t-il : elle concerne la capacité du SIVU à maintenir un parc informatique et, le cas échéant, celle des communes à prendre le relais.
En conclusion, ce n’est pas l’idée de départ (laquelle est jugée bonne) qui est critiquée, mais le fait que ce ne soit resté qu’une bonne idée...et les membres de Grimpi, sans pécher par excès de fierté, se demandent pourquoi toutes les questions auxquelles ils ont répondu en interne n’ont pas été soulevées.
Pour des résultats chiffrés plus précis, se reporter à la présentation du projet dans le chapitre 6.
Par souci d’honnêteté, il faut mentionner les résultats obtenus dans le secteur de l’Education : l’objectif visé est de faire de l’Ardèche le premier département connecté pour les collèges et lycées. De vrais efforts sont réalisés, notamment en matière de formation des enseignants.