2.1. L’imaginaire d’un projet pour l’avenir d’un Plateau

Si nous avons choisi d’ouvrir cette première sous-section par le thème de l’avenir, c’est bien parce que toutes les traductions de l’intuition initiale se sont conjuguées sur ce mode du futur et du devenir. En répondant à une journaliste qui l’interviewait sur les retombées attendues du projet²⁸⁸, le sénateur Jean Faure résumait de façon imagée l’esprit de Vercors Connect.

‘« Le monde rural va prendre sa revanche et devenir la lumière de la ville, sans risque de perdre son âme²⁸⁹ » ’

Si l’expérience était censée, à l’origine, apporter un nouveau souffle économique au territoire, on note ici qu’aucune allusion n’est faite à la dimension économique du projet ou à une éventuelle incitation au développement local. Cette dimension n’a, bien entendu, pas été exclue et occultée par l’imaginaire du projet mais n’a jamais pris le pas sur les autres. 

Ainsi, même en faisant abstraction du ton nécessairement mobilisateur qu’un homme politique doit donner à une réponse qui sera publiée et lue par des milliers d’administrés, on décèle à la fois l’idée de fierté à défendre (la revanche suppose qu’il y a eu combat et que l’honneur du territoire est en jeu), de mission exaltante à assumer (devenir la lumière de la ville, sous-entendu après avoir été moqué et humilié pendant des années) et de préservation ou attachement à des valeurs, le mythe de la ville diabolique et inhumaine apparaissant presque explicitement à travers l’expression sans risque de perdre son âme qui, pour le coup, renvoie assez fidèlement au monde inspiré de Boltanski et Thévenot. L’image d’une innovation technique froide et dévorante qui obligerait à renoncer à des traits constitutifs du territoire rural n’est également pas éloignée. Face au mythe d’Internet qui transforme le monde en village planétaire mais gomme les différences, le projet prend ici une toute autre connotation. Rappelons que le dossier de présentation du sous-projet Réseaux Buissonniers parle des vertus du télétravail.