7. Du detour aux deplacements

Dans son ouvrage consacré aux règles du jeu de l’action collective, J-D. Reynaud remarque qu’un projet peut ne pas être mesurable mais qu’il faut le distinguer des valeurs que le groupe porte (Reynaud J-D., p76-78, 1993)365. Cette remarque trouve une résonance toute particulière dans l’observation que nous avons conduite car, pour évaluer le projet, encore faudrait-il que celui-ci n’ait pas évolué par rapport aux objectifs qui lui étaient attachés. En d’autres termes, la question de savoir s’il y a réussite ou échec, mode d’évaluation binaire, tombe ici, ou se trouve pour le moins singulièrement déplacée. Suivant la place choisie pour évaluer ou observer, les uns parleront de succès quand d’autres, et nos entretiens l’ont bien illustré, déploreront une faillite ou une dérive injustifiée du projet.

L’équipe en charge de la communication sur le projet défendra une stratégie qui a payé, la notoriété du projet est un des bénéfices de l’opération à lui attribuer, et se demandera en toute logique ce qu’il faut penser de cette réflexion livrée par l’un de nos interlocuteurs qui estimait que « ‘le plus gros problème, valable ailleurs, c’est que contrairement à ce qu’on dit, on n’est pas du tout dans des logiques de projet ’» ? Les trois critères retenus par ce dernier (des objectifs clairs, des échéances précises, des actions impliquantes) nous amèneront alors à considérer Vercors Connect sous un autre angle (celui de la logique et de la gestion de projet) et, bien loin de nous entraîner vers évaluation laudative où il est question de performance, feront un bilan à une date donnée qui signera l’arrêt de mort du projet.

Notre recherche nous a amenée à prendre note de propos considérablement éloignés les uns des autres et c’est en termes de verdict que nos interlocuteurs se sont à chaque fois exprimés. C’est en effet en répondant intérieurement à la question suivante, « Vercors Connect a-t-il comblé toutes les attentes qu’il avait fait germer? » que chacun a essayé d’apporter sa contribution à un débat larvé sur un territoire en prise avec la diffusion de l’innovation. Ceci nous permet donc de clore notre analyse en rappelant que l’important n’était pas d’étudier Vercors Connect pour en tirer des enseignements sur la gestion de projet, en général, mais bien d’en observer le potentiel d’impulsion d’une forme d’innovation et d’activité.

Ainsi, si l’une de nos sections a été consacrée à un bilan des projets lancés, stricto sensu (voir la section 5), il nous faut maintenant nous atteler à une dernière analyse, celle des résultats ou déplacements sous toutes leurs formes, à porter à l’actif du projet, signes d’une innovation, qu’elle soit technique ou non.

Notes
365.

Reynaud J-D., (1993), « Les règles du jeu, l’action collective et la régulation sociale », Armand Colin, Paris.