Conclusion

Ce qui frappe immédiatement l’esprit dès lors que l’on objective et compare les différentes situations d’études et les différentes étapes de la scolarité de nos deux populations, c’est d’abord le contraste interdisciplinaire existant entre l’allure générale, relativement stable, régulière, et homogène des parcours des étudiants en médecine, et l’aspect incomparablement plus décousu, hachuré et hésitant des parcours scolaires et sociaux des étudiants sociologues. C’est ensuite et c’est lié, l’inégale dispersion intradisciplinaire des situations d’études et des profils étudiants qui, dans une large mesure, renvoie à l’inégale puissance socialisatrice des matrices disciplinaires dont les filtres, plus ou moins épais, composent des publics inégalement homogènes et cohérents sur les plans de l’origine sociale et de l’origine scolaire, et neutralisent avec une force très inégale les effets éventuellement liés aux caractéristiques primaires des étudiants (déjà plus ou moins dispersées) dans la définition des pratiques et du sens conféré à l’action présente, par exemple en subordonnant l’action présente à l’avenir professionnel.

D’un côté, en médecine, on trouve des étudiants qui, sortant du secondaire, poursuivent leurs études dans le supérieur sans arrêt ni rupture, et vivent pleinement leurs études comme un choix, une “vocation”. Les années d'études se succèdent les unes aux autres, “linéairement”, et c’est ainsi que l’on gravit progressivement et sans discontinuer les échelons d’un cursus qui, à lui-même et dans une large mesure, suffit à décider de ou à “motiver” l’avenir professionnel. Mais alors qu’il est relativement aisé de reconstruire les parcours et les attentes des étudiants médecins tant sont grandes, d’un étudiant à l’autre, les proximités, la population des étudiants sociologues réunit, d’une autre côté, en un même public, une grande diversité de profils et de situations d’études à l’allure générale plus complexe et plus dominée (socialement et scolairement) : ruptures, réorientations, scolarités momentanément interrompues, désarrois, incertitudes de l’avenir, etc., et expériences scolaires et sociales diversifiées. Dans ce contexte d’études, la diversité est de “règle”, ceci tout à la fois en raison de la nature plus lâche et plus large de son recrutement social et scolaire, de sa faible visibilité sociale, de la ténuité de ses perspectives d’avenir professionnel, etc. Et, en sus d’être au fondement d’une population plus hétérogène, ce dernier laisse également davantage s’exprimer les différences qui lui sont inhérentes...