Outre l’existence de programmes circonstanciés qui déjà viennent instruire l’activité de connaissance et régler ses contenus et ses orientations, des coefficients différentiels sont affectées aux divers ensembles disciplinaires enseignés. C’est ainsi qu’en DCEM1, l’attention est tout particulièrement portée sur les matières de la connaissance clinique, la séméiologie médicale et la séméiologie chirurgicale notamment. Ceux qui concernent la séméiologie sont particulièrement élevés puisque la Faculté Lyon Sud par exemple lui confère un coefficient total de 10 alors que la Faculté Grange Blanche lui attribue un coefficient global de 7, le coefficient 3 étant par ailleurs le coefficient le plus élevé qui soit assigné à un autre ensemble disciplinaire.
‘« Pour le DCEM1, il peut y avoir des compensations. L’étudiant qui a eu 8 sur 20 dans une matière, 12 dans une autre, bon globalement, il a la moyenne générale, tout va bien Au bout du compte il a la moyenne générale à l’ensemble de toutes ces matières additionnées. Il y a quand même deux parties : une partie dite de séméiologie mais nous allons essayer de modifier ce système, et une partie dite d’enseignement bioclinique. La partie dite de séméiologie c’est donc l’enseignement médical, chirurgical, et la médecine d’urgence ; donc ce sont deux grandes matières plus une petite qui sont dans une bulle si on peut dire, et toutes sortes de petites matières qui sont dans un autre partie de contrôle des connaissances. Pour la première partie l’étudiant doit avoir, à la première session, la moyenne à l’ensemble de ces deux grandes matières plus la petite. Donc il doit avoir sur 220 : 110, à première session. S’il n’a pas la moyenne, il doit repasser l’ensemble de ce bloc, même si l’une des deux a bien compensé l’autre. Par contre pour l’enseignement bioclinique, les matières se compensent. Et il conserve des acquis. Si au bout du compte il est ajourné en bioclinique, il ne repassera que les matières dans lesquelles il n’a pas eu la moyenne » (Directrice administrative de la Faculté de médecine Lyon Nord).’Il est vrai cependant que la séméiologie comprend elle-même plusieurs sous ensembles disciplinaires et plusieurs secteurs : séméiologie biologique, séméiologie médicale, séméiologie chirurgicale, séméiologie radiologique entre autres. Mais comment ne pas voir et ne pas dire que le primat ainsi accordé aux matières cliniques et l’octroi de coefficients si contrastés entre les différentes matières disciplinaires constituent une information de prime importance, lorsqu’elle est utilisée ce qui est généralement le cas (« J’ai eu deux matières bon que je ne supportais pas en plus mais c’était surtout un petit coefficient... ban je ne les ai jamais vraiment travaillé, je les ai vraiment travaillé juste deux ou trois jours avant l’examen »), pour la conduite des apprentissages par les étudiants.
Discernant parmi les enseignements et hiérarchisant les domaines de connaissance soumis à l’investigation, de tels coefficients ne manquent pas d’expliciter l’ordre des priorités qu’il convient d’imprimer à l’étude. Ils permettent ainsi aux étudiants de mieux cibler les impératifs de l’apprentissage et ses orientations, d’étager les objectifs du travail universitaire, de faire le départ entre le primordial et le secondaire. Des coefficients qui démarquent aussi nettement l’importance relative des différents ensembles disciplinaires sont autant de prises explicites sur les activités de connaissance qui autorisent une organisation plus rationnelle des activités scolaires, et, mieux encore, la mise en oeuvre de comportements stratégiques.
Concrètement, les étudiants consacrent un part plus conséquente de leurs efforts scolaires à l’assimilation des contenus séméiologiques et s’attachent, par exemple, à ne pas manquer les cours magistraux correspondants. En DCEM1, un échec même relatif aux épreuves de séméiologie médicale et de séméiologie chirurgicale compromet grandement les chances de succès. Il est donc important pour les étudiants de ne pas se tromper de cible. Il y a donc là un ensemble d’informations explicites sur les apprentissages et leurs orientations qui, objectivées, facilitent la définition et la hiérarchisation des objectifs de travail.
Parmi les “conseils pratiques” que dispense le Guide Théraplix on peut lire, à cet égard :
‘« Aussi étrange que cela puisse paraître, il faut souligner qu’il est plus que nécessaire de connaître parfaitement le programme. Il doit toujours être à proximité de la table de travail ; cela évitera de s’attarder sur des questions dont on a pu entendre dire qu’elles étaient importantes, alors qu’elles ne figurent en aucune façon dans ce dernier. Certes, ces conseils d’ordre général sont d’une extrême importance, mais il faut bien reconnaître que l’on ne peut demander à l’étudiant débutant de les “sentir”, tout au plus peut-on espérer être cru. L’expérience ultérieure permettra seule de concevoir le bien-fondé de ces assertions qui n’ont rien de paternalistes ! » 334.’Ainsi donc, comme tendent à le montrer ces exemples, la médecine, telle qu’elle est enseignée à tout le moins lors les premières années d’études, s’appuie sur un fonds commun programmé qui suppose l’apprentissage de contenus et de procédures définis et partagés. D’un lieu d’enseignement à l’autre, les apprentis-médecins sont confrontés à un ensemble d’impératifs identiques : la séméiologie de telle ou telle maladie, le système immunitaire dans les situations normales et pathologiques ou encore dans ses aspects moléculaires, cellulaires, physiologiques, etc. ; les contenus et les procédures qu’il faut nécessairement maîtriser, les énoncés, les règles, les lois, les mécanismes qui, en tant que tels, ne sont pas soumis à variation et s’imposent à tous sous les mêmes formes. La programmation des enseignements, la routinisation des actes d’apprentissages et la forte structuration des savoirs contribuent ainsi à limiter le nombre d’indéfinis, d’incertitudes ou d’imprévus présents dans l’activité de connaissance.
Guide Théraplix des études médicales, Panorama des études médicales 1, 95-96, p.23.