V. La confiance des étudiants médecins dans leur réussite par le travail

Enfin, pour finir ici, on ne peut omettre de remarquer la confiance dont les apprentis-médecins font preuve vis-à-vis de leur travail personnel et de ses effets sur leurs chances de succès aux examens. Outre les parcours sociaux et scolaires des étudiants médecins qui peuvent pour une part rendre compte de la certitudo sui que ces derniers expriment, il convient sans nul doute de voir également dans cette confiance en soi l’expression du caractère ciblé et explicite de l’apprentissage et de ses objectifs qui, dans ce contexte d’études et contrairement à ce qui se passe en sociologie on le verra, limite radicalement les flottements et le désarroi dans le travail. En effet, à bien écouter les étudiants, c’est avant tout dans le sérieux et la régularité du travail lui-même (versus dans des compétences mystérieuses ou des événements aléatoires) que se joue la réussite aux examens et que s’exprime la confiance en celle-ci. Ceux qui, au moment de notre enquête, manifestent une confiance plutôt timorée nuancent aussitôt leurs propos pour affirmer que la confiance viendra avec le travail, celui-ci devant suffire pour que les choses se déroulent comme ils l’entendent, c’est-à-dire que leur année soit couronnée d’un succès. Ce qui n’est pas le cas, disons-le dès à présent, de leurs homologues sociologues. Autrement dit, l’examen n’est pas perçu dans ce contexte d’études comme une échéance aléatoire sur laquelle il est difficile d’avoir beaucoup d’emprise. Ici, on sait ce qu’il faut faire, comment apprendre et travailler, à quoi s’attendre et ce que savoir veut dire...

‘« (Confiance dans sa réussite ?) (en souriant) pour cette année oh je pense oui, il y a finalement très peu de redoublements après la première année quand on travaille régulièrement, et quand on est intéressé je pense qu’il ne devrait pas y avoir trop de problèmes » {Baccalauréat D ; Concours obtenu à la deuxième tentative ; Père :Professeur de biochimie à la faculté de médecine, Directeur d’unité INSERM ; Mère : femme au foyer}.
« Ouais je suis confiant mais euh je crois que ça dépendra beaucoup euh du travail que j'ai à fournir, est-ce que j'aurais l'temps de de vraiment tout voir ? Au niveau de ce que j'apprends je pense que je le sais ouais, je sais que je le saurai, donc au niveau vraiment, la finalité de devenir toubib, il n’y a pas de problème, ça doit être productif, maintenant bon sur l'examen euh ouais je suis confiant (sourire) » {Baccalauréat D, mention “assez bien’ ; Concours obtenu à la deuxième tentative ; Père : Technicien photographe ; Mère : Aide familiale}.
« Oh ouais quand-même ouais, confiante ouais je pense que je vais la réussir mais bon après euh... il ne faut pas essayer de viser la moyenne, il faut essayez de viser quand-même assez haut parce que après on ne peut pas choisir nos stages sinon, si on n'est pas bien classé, voilà, enfin c'est sûr que je vais réussir de toute façon il ne faut pas exagérer je ne vais pas redoubler, mais bon je ne sais pas si je serai bien classée parce qu’en plus ça dépend des autres hein de toute façon (et qu'est-ce qui vous fait être confiante comme ça ?) parce que l'année dernière j'ai moins travaillé que cette année et j'ai réussi donc euh... » {Baccalauréat D ; Concours obtenu à la deuxième tentative ; Père : Carrossier (employé) ; Mère : Agent de service}.
« Ouais (sourire), nan ça devrait aller je pense (sourire), je suis à la bourre (rires) dans mon programme mais, nan, je sens bien... parce que ben tu sens en fait quand tu... nan je suis confiant ouais, je travaille euh... bon je devrais travailler plus... mais je travaille suffisamment régulièrement pour euh pour assurer mon année » {Baccalauréat D, mention “assez bien” ; Concours obtenu à la troisième tentative ; Père : Professeur de médecine interne à la faculté de médecine, Chef de clinique ; Mère : Psychothérapeute libérale}
« Disons que j’ai toujours au dernier moment euh le stress mais euh parce que j'ai travaillé donc euh je me dis que si je me loupe bon ben je ne sais pas (en souriant) c'est qu'il y a eu un problème mais ça ne vient pas de ce que je n’ai rien fait. Disons que c’est ça en fait je me conforte dans cette idée euh en me disant que j'ai travaillé donc il n’y a pas de raison... si je n'arrive pas à apprendre un cours bon ban je l'apprendrais un autre jour mais je persévérerais tant que je n’y arriverais pas, je suis bornée (en riant) donc euh tant que je n’y arrive pas euh je vais essayer... parce que c'est vrai que je ne suis pas du tout confiante si je sais que je n’ai rien fait derrière » {Baccalauréat C, mention “assez bien” ; Concours obtenu à la deuxième tentative ; Père : Plâtrier-peintre ; Mère : Employée dans une crèche}.’