II.C. Une activité d’appoint et à la marge...

Par son intensité ensuite en raison à la fois du caractère généralement sporadique et occasionnel, donc marginal, de l’activité salariée des apprentis-médecins troisième année (certains week-ends, tous les quinze jours, tous les mois, à la demande...), comparativement à celle de leurs homologues sociologues, et de la charge horaire plus faible des emplois occupés. Plus encore que pour les étudiants sociologues, l’expérience du travail rémunéré prend, chez les étudiants médecins, la forme d’une activité marginale, exercée de manière ponctuelle et à temps très partiel puisque pratiquement aucun d’entre eux ne travaille plus de cinq heures par semaine durant l’année universitaire415.

L’importance des obligations universitaires de la troisième année (emploi du temps universitaire, stages hospitaliers, et volume du travail personnel) d’une part, le caractère fortement sélectionné de cette population étudiante d’autre part qui, dans son ensemble, provient de milieux sociaux relativement dotés sur le plan économique, enfin l’aspect vocationnel de la matière d’études adjoint à des perspectives d’avenir mobilisatrices, contribuent sans nul doute à expliquer cet état de fait.

L’emploi du temps relativement chargé des études médicales troisième année concoure ainsi clairement, en raréfiant le temps disponible, à limiter objectivement, sinon au détriment de l’étude, le temps susceptible d’être consacré à d’autres activités, notamment extra-académiques et en l’occurrence salariées. Les apprentis-médecins sont ainsi, dans ces conditions, fortement incités voire contraints, sinon au risque de mettre en jeu leur survie scolaire, à la restriction du nombre de leurs occupations extra-universitaires, à se prémunir contre une dispersion trop importante de leur temps et de leurs activités, voire à consentir quelques sacrifices personnels (comme celui d’une autonomie financière substantielle) dans l’objectif de conserver un temps suffisant pour l’étude. L’investissement consenti dans les études concorde parfois avec l’idée d’une satisfaction différée 416 .

L’aspect vocationnel de la matière d’études contribue en outre à renforcer ce mouvement puisque celui-ci se trouve au principe, contrairement à ce qui passe dans d’autres filières comme la sociologie, d’un investissement scolaire positif de la part des étudiants. On aime ce que l’on fait et les enjeux scolaires, professionnels, de la discipline d’études sont des enjeux mobilisateurs qui valent que l’on s’y consacre le plus complètement possible. Enfin, l’appartenance d’une majorité d’étudiants médecins à des milieux sociaux fortement ou globalement dotés sur le plan économique tend à éloigner nombre d’entre eux, par le soutien économique important que les familles peuvent ainsi leur apporter, des nécessités les plus pressantes sur le plan matériel. Pour ceux-là tout au moins, majoritaires dans ce contexte d’études, le travail est moins une contrainte (payer ses études, subvenir à ses besoins...) qu’un appoint... A cet égard, plusieurs constats doivent encore être opérés s’agissant des étudiants médecins inscrits en DCEM 1.

Notes
415.

Seuls en effet trois étudiants enquêtés exercent une activité qui certaines semaines dépasse ce seuil des cinq heures.

416.

BAUDELOT C., BENOLIEL R., CUKROWICZ H., ESTABLET R., Les Étudiants, l’emploi, la crise, Paris, PCM, 1981, p.83.