III.A. Entre un emploi du temps et des enjeux scolaires faiblement mobilisateurs

Tout d’abord, le caractère relativement peu soutenu des rythmes universitaires (heures d’enseignements et volume de travail personnel) de ces filières d’études, laisse objectivement la place dans l’emploi du temps des étudiants pour d’autres activités et en l’occurrence des activités salariées, qui, ainsi, peuvent être plus aisément menées de front avec les études que dans des filières universitairement plus astreignantes, et donc plus exigeantes en temps spécifiquement scolaire.

Là où certains emplois du temps rendent concrètement difficile voire impossible tout investissement extra-académique trop conséquent, et, par là même, toute dispersion trop importante de son temps, l’encadrement pédagogiquement plus lâche des filières Lettres et sciences humaines laisse cette possibilité aux étudiants qui ainsi peuvent plus aisément investir des activités extérieures à l’étude sans pour autant vivre ces dernières (ou dans une moindre mesure) comme des activités concurrentes de l’étude (même si elles le sont objectivement) et donc comme un risque potentiel pour leur survie scolaire à court ou moyen terme.

Ensuite, le caractère peu ou pas professionnalisant de ces filières, la faible rentabilité des diplômes auxquels elles préparent et l’orientation négative d’un grand nombre de leurs étudiants, viennent encore, en la matière, redoubler les effets liés à l’anomie des emplois du temps universitaire. Deuxième, voire troisième choix sur la liste des préférences estudiantines, ces disciplines présentent en outre un avenir objectif relativement incertain et, nous l’avons vu s’agissant des étudiants sociologues, entravent la projection à moyen et long terme du présent de leurs pratiques universitaires.

Dans ces conditions, les étudiants de Lettres et sciences humaines qui évoluent ainsi dans des filières relativement peu exigeantes en terme d’emploi du temps et faiblement mobilisatrices sur le plan des enjeux scolaires relativement à d’autres filières plus contraignantes et/ou prestigieuses au nombre desquelles compte la médecine, « ne perçoivent sans doute pas comme une dispersion fatale à leur avenir professionnel l’exercice d’une activité salariée »421 qui, dans certain cas et pour certain d’entre eux, peut au contraire être une manière d’affronter le monde du travail et de s’y préparer.

Notes
421.

LAHIRE Bernard (avec la collaboration de MILLET Mathias et PARDELL Everest), Les Manières d’étudier, Opus-cité, p.42.