III. Des similitudes premières du constat à la variation seconde du contexte de constat : des modes disciplinairement différenciés de régulation des activités de l’apprentissage

Pourtant, malgré les similitudes et il ne faut pas se tromper sur la portée sociologique du constat —, les étudiants médecins n’en entretiennent pas moins des rapports plus rationnels et prévisionnels à leur pratique intellectuelle que leurs homologues sociologues dont les manières de travailler, incomparablement plus irrégulières, inconstantes et sporadiques, relèvent plus souvent de l’occupation spontanée, improvisée en fonction de l’échéance, de l’envie ou de l’occasion du moment, que d’un travail méthodiquement conduit et rationnellement organisé. Cela pour au moins trois raisons.

D’une part parce que les étudiants médecins sont indubitablement de plus grands utilisateurs scolaires d’emplois du temps, de plans et de programmes de travail lors les “temps forts” de l’année universitaire que les étudiants sociologues qui, pourtant, en auraient objectivement le plus besoin en raison, notamment, du très faible niveau d’encadrement que propose leur filière d’études. Si les étudiants sociologues qui établissent des plannings de travail y recourent pour les mêmes raisons et aux mêmes occasions que les étudiants de DCEM1, ils sont aussi nettement moins nombreux à le faire et à utiliser ce type de dispositifs pour planifier le déroulement de leur pratique.

D’autre part, et c’est la deuxième raison, parce que là où les étudiants médecins procèdent à l’établissement de plannings extrêmement rigoureux et détaillés, dans leur forme très rationnels et structurés, les plans de travail élaborés par les étudiants sociologues lorsqu’ils en élaborent donc s’avèrent au contraire relativement évasifs et mal assurés dans les séquences et les étapes qu’ils cherchent à définir et à organiser et/ou limités dans leurs efforts d’organisation à certains aspects de leurs pratiques comme la reprise des cours. Et c’est encore sans compter ici avec ceux qui, nombreux dans ce secteur d’études, expriment ostensiblement dans un rapport spontané voire même hédoniste aux choses de la vie, et dilettante à leurs études, le refus ou le rejet systématique de la contrainte comportementale, organisationnelle qu’instaurent, par un effet d’auto-prescription, la planification et l’organisation scripturales et graphiques de l’action.

Enfin, dernier point, parce que de mêmes usages, extérieurement identiques, n’ont pas nécessairement la même portée sociologique d’un contexte d’études à l’autre, ne serait-ce qu’en raison une fois encore de la variation dans les conditions de l’étude et dans le type de tâches intellectuelles à réaliser. Là où, dans une large mesure, les étudiants médecins peuvent se contenter, en dehors des périodes de révisions, d’une organisation relativement compendieuse de leurs pratiques universitaires en raison tout à la fois de la régularité de leurs rythmes universitaires, de la constance et de la prévisibilité des actes de leur pratique intellectuelle, répétés jour après jour selon des principes et des modalités identiques, les étudiants sociologues ne s’en satisfont, au fil des jours, qu’au prix de l’improvisation pratique et spontanée d’un travail personnel dont les contours et les contenus ne sont pas ou moins codifiés et qui, du même coup, demanderaient à être définis, prévus, organisés...