III. L’établissement de programmes de révisions : une pratique discriminante

C’est donc clairement au moment des révisions et plus généralement des “temps forts” de l’année universitaire que les étudiants enquêtés pris dans leur ensemble produisent l’essentiel de leurs efforts de planification scolaire et se fixent un emploi du temps à suivre pour le travail personnel. Cela se vérifie chez les étudiants de troisième année de médecine comme de licence de sociologie. Mais les premiers opèrent alors dans des proportions et avec une intensité que n’égalent pas, tant s’en faut, ces derniers442. C’est ainsi du point de vue de la fixation d’emplois du temps ou de programmes pour le travail personnel, nous l’avons dit, que se jouent les différences les plus patentes entre étudiants médecins et sociologues.

Notes
442.

Or, les différences de fréquence ou d’intensité de la pratique sont ici à prendre sérieusement en compte ne serait-ce que plus une pratique scripturale et graphique est soutenue, fréquente et répétée et plus elle a de chance de donner à voir des rapports symboliques aux choses de la pratique, plus l’activité à propos de laquelle il est fait usage de l’écrit a de chances d’être médiatisée et mise à distance, définie et rationalisée... Des différences dans les fréquences de recours à une écriture particulière ne correspondent jamais seulement à des différences purement “quantitatives”. Elles constituent également un saut “qualitatif” dans les manières d’être à la pratique pour l’accomplissement de laquelle il est fait usage de l’écrit. La distinction généralement opérée entre ce qui est d’ordre “quantitatif” et d’ordre “qualitatif” fait parfois oublier que ces deux dimensions entretiennent des liens étroits, et en l’occurrence qu’un changement de type “quantitatif” emporte nécessairement des transformations “qualitatives”. Autrement dit, il n’est pas de différences à caractère quantitatif qui ne trouveraient dans les faits de “traductions” qualitatives. C’est dire combien les différences de fréquence dans les recours des étudiants à la programmation écrite ont encore partie liée avec des différences dans les manières d’organiser et de définir la pratique, mais aussi, de façon indiscernable, dans les manières d’être à la pratique. Concrètement, plus l’écrit intervient dans l’organisation de la pratique sociale et plus il vient réfléchir et infléchir, objectiver et rationaliser les modalités de la pratique, décomposer et recomposer ses étapes, catégoriser ses différents moments, mettre en ordre, calculer, gérer...