III.C.1. La programmation des activités dans la projection du présent

C’est parmi les premiers que l’on rencontre en effet les étudiants qui établissent des plans et des programmes de révisions même si tous ne sont pas nécessairement concernés par cette pratique. On y trouve tout d’abord les rares étudiants qui envisagent de suivre des études de sociologie sur le long terme, si possible pour devenir enseignants-chercheurs, et qui, dans cette optique, s’avèrent à la fois les plus enclins à un investissement régulier et soutenu mais aussi à la production d’efforts rationnels d’organisation et de planification. Outre les plans de travail éventuellement établis à l’occasion des révisions, ces étudiants se démarquent essentiellement de leurs homologues par leurs nombreux actes écrits d’organisation et de programmation au fil de l’année universitaire : démultiplication des classements par lesquels ils cherchent à structurer leur savoir et à rentabiliser l’usage des documents accumulés (notes de lecture, de cours, annotations diverses...) ; listes de lectures à faire (versus bibliographies enseignantes), planifiant les lectures à venir ; listes de choses à faire définissant les actes de la pratique ultérieure ; listes de cotes de bibliothèque afin de disposer des références des documents consultables, etc.

Ces étudiants parlent fréquemment en terme de structuration, d’organisation, d’efficacité de leur travail personnel. Leurs pratiques scripturales et graphiques d’organisation sont aussi plus régulières, plus assidues, plus diversifiées et nombreuses que celles rencontrées chez leurs homologues. Il ne s’agit pas ici de travailler dans la perspective d’un futur proche, pour obtenir sa seule licence, en “potassant”, par exemple, les cours avant les examens, au cours d’une période relativement réduite, mais plutôt d’accumuler les lectures, de fréquenter les auteurs, d’investir la recherche, etc., dans un rapport d’identification globale aux pratiques de ceux qu’ils aspirent devenir (« je cherche à me constituer un capital de lecture pour la thèse » nous explique l’un d’eux)...

On trouve également parmi cette catégorie d’étudiants sociologues, concernée par l’établissement de plans et de programmes pour le travail personnel, tous ceux qui, porteurs d’un projet professionnel ou scolaire précis dont la réalisation se trouve conditionnée par l’obtention d’une licence, travaillent prioritairement dans une perspective à court terme une matière d’études qui, pour ne pas toujours les laisser indifférents, ne constituent pas pour autant une vocation, tant s’en faut. Il ne s’agit pas ici, à l’inverse des étudiants évoqués ci-dessus, de travailler à devenir soi-même le meilleur sociologue possible, mais avant toute chose de travailler pour ne pas rater le coche de la licence. Ces étudiants, pour leur part davantage portés sur la matière des cours, produisent ainsi l’essentiel de leur effort à l’approche des examens (“bachotage” final). Il ne s’agit ni d’en faire trop, ni de ne pas en faire assez. Il s’agit de valider ses Unités de Valeurs et son année d’études afin d’obtenir le diplôme escompté pour se réorienter. Soucieux d’obtenir leur licence de sociologie pour réaliser le projet de leur choix (entrer en IUFM par exemple), ces étudiants se font plus méthodiques, préparent leurs révisions, adoptent un rythme de travail incomparablement plus rapide, disciplinent leur pratique, cherchent à se concentrer le plus possible sur leurs révisions et, dans cette optique, établissent généralement des plannings qui organisent, répartissent, imposent des limites et fixent des repères...