VI. Table des matières, sommaires, index...

Inventés durant la période médiévale, les procédés de mise en texte, en sus d’imprimer au texte une nouvelle organisation spatiale et visuelle (paragraphes, têtes de chapitre, majuscules, etc.), offrirent à la lecture de nouveaux instruments textuels comme les tables analytiques et les index. Leur spécificité fut d’autoriser tout à la fois des rapports plus rationnels à l’imprimé et, corrélativement, de nouvelles pratiques du livre, plus comparatives, plus discontinues (versus soumises à l’ordre du texte) et définies. Les tables et les index peuvent ainsi servir à se faire rapidement une idée sur le contenu d’un ouvrage, sur son déroulement et ses thématiques, faciliter le repérage et la localisation textuelle d’informations, autoriser la sélection de passages à lire parmi des ensembles textuels relativement longs et offrent au lecteur une série d’outils qui lui permettent de conduire sa lecture dans l’ordre qui lui convient...

A cet égard, nos interlocuteurs sociologues, tout comme leurs homologues médecins, ne manquent pas de recourir à l’occasion aux tables analytiques, aux index et aux sommaires éventuellement présents dans les ouvrages fréquentés pour orienter et soutenir leurs lectures. On peut d’ailleurs repérer, chez ces étudiants, trois grandes occasions d’utilisation de tels dispositifs lexiques. Celle tout d’abord d’une recherche bibliographique et du choix d’un ouvrage à lire sur une question donnée tout particulièrement dans le cadre du travail de recherche puisque, en la matière, les lectures ne font pas toujours l’objet d’une prescription explicite de la part des enseignants. Les étudiants doivent ainsi extraire de la masse documentaire leurs propres références bibliographiques et rechercher des textes susceptibles d’étayer leurs travaux. La consultation des tables, parfois des index, préalablement à tout emprunt bibliothécaire est alors le moyen de trier parmi les références, de cerner rapidement le thème d’un ouvrage, d’opérer une sélection parmi les imprimés disponibles sur un même thème, et de prendre rapidement connaissance des questions traitées dans un ouvrage.

Celle ensuite d’une lecture parcellaire et sélective qui souhaite accéder directement à l’essentiel, c’est-à-dire aux parties ou aux chapitres qui traitent du problème recherché, et s’épargner ainsi le déchiffrement in extenso du texte parcouru, limiter le temps passé sur un imprimé. Les tables et les index offrent alors la possibilité de sélectionner les passages à lire prioritairement, de les localiser rapidement, de rompre avec la linéarité du texte, de recouper des passages épars d’un même ouvrage voire de plusieurs ouvrages différents, de passer d’un développement textuel à un autre, de faire des aller et retour dans le texte, et plus généralement d’imprimer à sa lecture l’ordre souhaité.

Celle enfin, moins fréquente que les deux premières, qui consiste à avoir un aperçu global des développements textuels d’un ouvrage, de son organisation, des ses étapes, de ses tenants et aboutissants, avant même d’entrer dans le coeur du texte. La lecture préalable des index et tables des matières est ainsi une façon de ne pas se plonger dans le texte “à l’aveugle”, sans au préalable avoir une idée, même sommaire, des développements à venir, ou, pour le dire positivement, un moyen de commencer sa lecture dans la perspective des arguments ultérieurs, et d’avancer ainsi à la lumière de ces informations...

‘« (Vous regardez la table des matières ?) oui oui oui toujours. Je la regarde même je dirais avant de le prendre (le livre)... à la bibliothèque ou n'importe quoi, quand je cherche une lecture... [...] Parce que comme je ne sais pas toujours quel bouquin... il faut que je les sélectionne donc je regarde déjà dans la table des matières s’il y a quelque chose qui m'intéresse (et si c'est un bouquin dont vous êtes sûre que ça va vous intéresser là aussi vous regardez la table des matières ?) Oui ! pour savoir un petit peu de quoi on va parler, comment ça va évoluer, pareil pour cerner ce qui m'intéresse le plus dans le bouquin, donc il y a des moments où je commence à lire la partie qui m'intéresse, et puis je me dis que tant qu'à faire je ferais aussi bien de le lire depuis le début, donc je repars du début. C’est-à-dire je lis quelques passages, je regarde la table des matières, je regarde ce qui apparemment m'intéresse le plus je commence à en lire un petit peu du chapitre ou de la partie qui m'intéresse, pour voir si ça correspond bien à l'idée que je me faisais, et puis ensuite je repars du début ». « Pour cibler quelque chose de plus précis, si j’ai vraiment une notion que je cherche à développer et à avoir des informations dessus, à la limite je peux aller voir à l’index » {Étudiante, Père : Chef d’entreprise, Mère : Caissière}.
« Quand je prends un bouquin qui est par rapport à mon thème je commence jamais par le début je regarde la table des matières, et je vois les chapitres qui sont directement concernés par mon sujet, je commence par lire ceux-là, et après je reviendrai dans le reste, donc des fois je reviens même pas vers le reste parce que le bouquin est énorme et c'est juste un truc qui va m'intéresser donc je lis ce qui m'intéresse en priorité » {Étudiante, Parents : Gardiens d’immeuble}.
« D’abord, je regarde le résumé du bouquin, la table des matières, l’auteur aussi... pour voir un peu si ça peut me servir. Table des matières puis après je regarde directement, une fois que j’ai vu ce qui m’intéressait je regarde quand même autour, s’il n’y a pas d’autres trucs qui peuvent correspondre parce que des fois il y a des trucs dans la table des matières ça veut pas dire grand chose puis quand on va voir en fait il y a plein de trucs intéressants, donc je regarde un petit peu puis si je vois que ça ne m’intéresse pas... je feuillette, je prends au milieu du chapitre comme ça pour voir deux trois phrases » {Étudiant, Père : Conservateur, Mère : Professeur de français, philosophie et communication pour adultes}.
« Je lis d’abord le sommaire, c’est la première chose que je fais, généralement les introductions et tout ça je les oublie [...] sinon j’attaque le bouquin », « J’ai pas envie de perdre mon temps en lisant les intros, je passe directement à l’essentiel » « j’aime bien savoir ce qu’il y a dans le bouquin, pour savoir de quoi il en retourne (...] histoire de juste savoir ce qu’il y a dans le livre », « Si j’ai l’intention de le lire en entier, je commence du début jusqu’à la fin en étant partie du sommaire. Si je sais que je vais lire un morceau, que je vais pas le lire en entier, je vais prendre toujours par rapport au sommaire les passages, les chapitres qui m’intéressent », « (Est-ce que tu utilises les index ?) Quand il y en a ouais ! ça m’arrive, si c’est une notion précise... ça peut m’arriver. Ça dépend aussi de la recherche que je fais, dans quel but je lis le bouquin [...] Si je cherche un concept précis... je vais regarder, c’est souvent des fois des bouquins tu as par exemple, je te dis n’importe quoi l’égalité, tu as la notion répertoriée telle page, telle page, telle page donc je vais faire comme ça, mais c’est rare, c’est franchement rare », « Quand je choisis le bouquin, je regarde déjà ce qu’il y a à l’intérieur, donc je sais préalablement ce que je vais lire... bon après je lirai plus ou je lirai moins... », « Au moment de prendre un bouquin, je regarde les sommaires donc si je me suis plantée je le repose, enfin, c’est vraiment sur le rayon que je fais comme ça », « Je regarde le concept qui m’intéresse, je note les références et je vais les chercher dans le rayon » {Étudiante, Père : Directeur général, Mère, au foyer}.
« Avant de commencer un bouquin, je regarde euh le sommaire parfois, pas toujours en fait non, ça dépend si c'est un bouquin euh (....) non pas toujours mais euh (...) ça dépend... si c'est un bouquin que je dois lire euh pour euh parce que il faut que je le lise je ne vais pas regarder le sommaire avant, si c'est un bouquin que je lis, mais qu'on ne m'a pas demandé de lire, alors je regarde le sommaire pour savoir de quoi il va parler, parce que généralement le bouquin euh qu'on m'a demandé de lire je sais de quoi il parle déjà un peu, donc euh, je ne regarde pas obligatoirement le sommaire je le lis, par contre si je ne le connais pas bien je regarde le sommaire, pour voir de quoi il parle [...] bon là, on a eu un partiel par exemple au mois de janvier, euhhhhh j'avais pris euh en bibliothèque euh un bouquin qui semblait m'intéresser j'ai regardé euh le sommaire, bon il y avait qu'une partie qui m'intéressait, j'ai juste lu la partie qui m'intéressait et j'ai rendu le bouquin, et ensuite euh il y avait aussi euh un bouquin assez indigeste sur euh La perspective symbolique de Panovsky, euh là c'est pareil quoi j'ai lu en diagonale et puis j'ai lu euh surtout euh ce qui me semblait intéressant pour mon partiel » {Étudiante, Père : Directeur d’entreprise, Mère : Assistante technique de son mari}.
« Je lis le résumé au dos ouais, souvent, avant de commencer la lecture, souvent c'est au moment de le choisir, je lis au dos et euh je commence la lecture et puis au bout d'un moment je regarde la table des matières comme si... pour voir un peu euh une fois que j’ai commencé pour voir comment ça va... ça va se dérouler ma lecture [...] si je cherche un livre pour un truc précis, mais avant, au moment du choix, là je regarde euh par exemple si on cherche un truc sur euh l'adoption on regarde euh ce qu’il disent ou s’ils en parlent mais euh ou les livres que j'ai décidé de lire non je regarde pas tout de suite » {Étudiante, Père : Comptable, Mère : Gérante d’un petit restaurant}.
« Quand j'ai à piocher euh dans un auteur, bon quand je sais que j’ai à lire un livre en entier, je vais le faire en entier, il n’y a pas de... il faut que je le lise en entier, euh mais bon, donc là je regarde la table des matières quand même pour avoir un aperçu de du travail mais euh disons je l'ai regardée, sans intérêt, sans m'en servir, alors que, c'est un outil la table des matières, quand je prends un livre pour piocher euh un thème que débat l'auteur dans son livre mais qui est pas forcément le thème du livre, mais un thème que traite euh l'auteur euh sur tant de pages, donc là c'est un outil, je regarde la table des matières, euh il traite tel thème euh de la page tant à la page tant donc je me réfère à ça et puis je regarde le passage [...] c'est-à-dire que euh... je ne sais pas mais euh les profs à la fac ils nous donnent euh ils nous donnent enfin pas mal de livres à lire on ne peut pas tous les lire, d'un autre côté, on est obligé quand même de savoir un petit peu de quoi ça parle tout ça, donc c'est la meilleure solution d'avoir euh un petit aperçu de chaque euh livre... » {Étudiant, Père : Commerçant ambulant, Mère : Assistante maternelle}.’

Toutefois, bien que certains de ces recours aux tables, aux index, aux glossaires ou sommaires, s’apparentent peu ou prou à ceux opérés par les étudiants médecins, ils ne recouvrent pas tout à fait les mêmes réalités et les mêmes difficultés d’un contexte à l’autre. Là où les étudiants médecins ont affaire à des ouvrages qui, de par leur taille, leur structure textuelle, et leurs contenus, font des outils analytiques, tables, index, glossaires, et sommaires, entourant systématiquement le corps du texte, des dispositifs indispensables à leur consultation, les ouvrages fréquentés par les étudiants de licence de sociologie sont loin, pour leur part, de toujours comporter et de proposer aux lecteurs non seulement des index mais également des tables explicites et détaillées. Nombreux sont en effet les livres de sociologie dont les tables, les têtes de chapitre, les titres et les sous-titres n’ont qu’une valeur purement indicative quant à la teneur des propos qu’ils annoncent, et qui s’avèrent relativement peu développés. Encore plus nombreux sont ceux qui ne présentent ni index ni glossaire (« ça dépend des bouquins parce qu’il y a des bouquins où il n’y en a pas »)...

Or l’orientation des étudiants sociologues parmi les ressources bibliographiques mises à leur disposition peut s’avérer (socio-logiquement) d’autant plus délicate, hésitante et parfois même hasardeuse qu’elle ne peut toujours se fonder sur des procédés d’énonciation graphiques qui tout à la fois synchronisent, répertorient, trient, localisent, recoupent et réduisent les différentes informations (notions, concepts, développements, arguments, thèmes, auteurs, etc.) développées et distribuées au fil du texte (« quand la table des matières est mal faite, quand le livre euh est pas découpé en chapitres euh c'est gênant, c'est vrai que c'est gênant pour arriver à bien le choisir ou euh... même, à l’intérieur, je veux dire euh pour en fait le... trouver peut-être des passages précis quoi, alors là bon c'est survol du livre euh je regarde un petit peu à toute vitesse euh ce qui se passe mais c'est vrai c'est un petit peu gênant quoi quand ça se produit »). C’est là toute la différence avec les ouvrages consultés par les étudiants médecins dont la structure matérielle et la matière textuelle, dans l’ensemble incomparablement plus systématiques et codifiées, autorisent des lectures tout à la fois plus sélectives, rationnelles et méthodiques.

Nous serions néanmoins incomplet si nous omettions dans le même mouvement de préciser que, à côté de l’inégale codification graphique des ouvrages, les étudiants sociologues apparaissent aussi souvent, et contrairement à leurs homologues médecins, dans l’impossibilité d’user des différents ressorts textuels éventuellement présents dans les ouvrages fréquentés en ce qu’ils n’en connaissent parfois ni l’existence ni l’utilité. Nous en voulons pour preuve le fait que les tables des matières, si elles sont occasionnellement consultées, sont bien loin de faire l’objet d’un usage systématique qu’il s’agisse de sélectionner un ouvrage parmi d’autres dans les rayons de la bibliothèque par exemple ou qu’il s’agisse de prendre connaissance de ses développements avant d’en faire une lecture, cela contrairement à ce qui se passe en médecine où les tables, index et glossaires, nous l’avons vu, constituent le préalable nécessaire à la consultation d’un ouvrage.

En outre, à l’appui de ce constat, on remarquera également que les étudiants ne sont pas rares qui choisissent leurs lectures à l’aveugle, au hasard de leurs déambulations dans les rayons de la bibliothèque universitaire sans auparavant consulter les fichiers et les fiches signalétiques répertoriant les textes par auteur ou par thème, nous l’avons montré plus haut... De même en va-t-il encore des index dont les étudiants sociologues ignorent très souvent jusqu’à l’existence, leurs fonctions ou leur utilité, quand ils ne les confondent pas tout simplement avec les tables des matières. Une majorité d’étudiants sociologues interrogés dans le cadre de cette enquête reconnaît en effet ne pas savoir ce qu’est un index et quel est son utilité, montrant par là même et une fois encore les présupposés implicites sur lesquels repose pour une bonne part, dans ce contexte d’études, en l’absence d’un entraînement explicite aux différents moyens et techniques de base du travail intellectuel, l’apprentissage de la pratique sociologique.

‘« L'index c'est le (...) c'est la table des matières ou l'index ça dépend de... ? [...] C'est les les... les mots ?... les mots-clés non ? Oui ?! euh non euh non non ! tt tt ! Non non en fait c'est simple euh logiquement c'est bon euh un mot clé quelque chose d'intéressant euh, telle page on parle de ça et puis voilà, mais j'ai jamais fait de recherche par rapport à ça... j'ai jamais travaillé comme ça » {Étudiant, Père : Formateur, Mère : Administratrice dans une association}.
« Des index ? C'est... ben c'est ce que j'appelle table des matières ! (...) dans le bouquin c’est ? Je ne sais pas, c'est des notes ça s'appelle des notes non ? » {Étudiant, Père : Dessinateur industriel, Mère : Secrétaire}.
« Euh ouais euh si l'index c'est... ah ouais un index, ouais ouais ouais si disons les références des bouquins, non ça je n'utilise pas ça (Mais c'est-à-dire à la fin des bouquins parfois il y a une espèce de liste alphabétique où il y a tous les thèmes ou les auteurs dont on parle avec les pages correspondantes...) Ouais non mais ça c'est... ouais ben si ça j'utilise en fait moi j'appelle ça en fait j'appelle pas ça index, j'appelle ça en fait euh le... ptt (...) ben ça m'échappe... le sommaire voilà... la table des matières... » {Étudiant, Père : Conservateur, Mère : Professeur de français, philosophie et communication pour adultes}.
« C’est-à-dire les index, ah quand il y a des notes à la fin ? C'est une bibliographie en fait un peu là non ? [...] Non parce que moi c'est assez rare que j’ai trouvé des bouquins comme ça, en général il y a une bibliographie à la fin, et en général je la lis pour voir euh les bouquins qui visiblement par rapport au titre euh se rapprochent le plus de mon sujet et ça me permet d'aller en chercher d'autres (donc les index en fait vous vous ne les utilisez pas ?) ben j'en n’ai pas vu souvent de toute façon, mais sinon les notes en bas de pages tout ça, je les lis toujours hein... » {Étudiante, Père : Professeur de chimie en université, Mère : au foyer}.’

Et nous pourrions multiplier les exemples. Les étudiants restants, ceux qui à l’occasion peuvent y recourir pour tout à la fois rechercher une notion, une thématique particulière ou encore consulter plus systématiquement que ne le permettrait une simple lecture linéaire le langage conceptuel d’un auteur, ne font toutefois de ce type d’outils textuels qu’un faible usage, ponctuel et sporadique, comparativement à celui de leurs homologues médecins. A cela, deux raisons au moins peuvent être invoquées qui tiennent pour partie aux types de supports fréquentés et aux protocoles de lecture inscrits dans ces derniers. Et d’abord le fait que si de nombreux ouvrages sociologiques sont accompagnés d’index, tout aussi fréquents sont ceux qui en sont dépourvus. Il n’est donc logiquement pas toujours possible de se référer à un index, là où les livres de médecine fréquentés en sont systématiquement dotés.

Ensuite, et c’est lié, parce que là où les livres de médecine, fréquentés par les étudiants médecins, appartiennent, en raison de leur taille, de leur organisation textuelle et de la nature de leurs énoncés, à ce type d’imprimés qui se consultent plus qu’ils ne se lisent, nous l’avons vu, dans le cadre de lectures documentaires et informatives, rapides et ponctuelles, ciblées et précises, les livres de sociologie organisent plus généralement de longs raisonnements d’ensemble, linéairement noués au fil du texte, qui inversement demandent à être lus plus que compulsés. A cet égard, l’index ne constitue pas (ou rarement), dans le contexte des études sociologiques, la condition préalable nécessaire à l’entrée dans le texte, comme ce peut être le cas avec les manuels de médecine.

Dans ces conditions, l’index peut permettre, à l’occasion, de recouper les passages d’un même livre, de se faire une idée plus précise du langage conceptuel d’un auteur, des thèmes traités, de repérer un développement particulier et de s’y reporter, etc., dans le cadre d’un travail ou d’une recherche plus ou moins spécifique. Mais il ne sous-tend généralement pas une lecture à caractère purement informatif qui repose, pour partie, sur le fait de pouvoir extraire des textes pratiqués une ou plusieurs informations dont le propre est d’être relativement isolables des raisonnements qui les sous-tendent en raison de la valeur constante du rapport aux choses qu’elles expriment (définitions, lois, énoncés de bases, mécanismes, tableau clinique...).

Cette économie des détours interprétatifs que tout à la fois suppose et autorise ce type de lectures informatif n’est, en revanche, réalisable que par exception ou dans une moindre mesure (dans le cas de données statistiques par exemple) dans le domaine des sciences de l’observation historique comme la sociologie dont les notions, les conceptualisations, les faits, les données et plus généralement les propositions interprétatives sont indiscernablement noués aux multiples raisonnements théoriques, empiriques..., de contextualisation qui précisément fondent leur pertinence, leur portée et leur signification.

En d’autres termes, l’index peut servir à cibler ou à recouper certains moments du raisonnement sociologique à l’oeuvre dans tel ou tel ouvrage (une construction interprétative, un fait, une notion, un concept et les argumentations qui les constituent comme tel) non à l’extraction plus ou moins systématique, complémentaires et informationnels, d’énoncés immédiatement disponibles et décontextualisables. En un certain sens, pourrions-nous dire, l’usage de l’index est en sociologie d’un usage moins fréquent et moins “évident” qu’en médecine tout à la fois parce que les textes fréquentés ne l’imposent généralement pas aux lecteurs comme un préalable indispensable à l’activité lexique et parce que la lecture ne peut d’emblée, dans ce domaine du savoir, se soustraire aisément à la connaissance des détours interprétatifs qui sous-tendent une conceptualisation, une intertextualité, etc., sauf à opérer sur un “déjà connu” ou sur des informations isolables.