4.1.2 Une phase de dépression.

Commence alors une longue phase de dépression, plus de 10 ans marqués par la disparition progressive de tout contact avec l’extérieur et par l’alcoolisme.

  • « J’ai bien été 10 ans à traîner, à aider les uns et les autres. J’ai essayé de m’investir dans un journal de quartier auquel mes enfants participaient, j’écrivais, je parlais de ma région d’origine. (...) J’avais l’impression d’être une mamie pour les jeunes de mon quartier. J’essayais de m’investir comme ça, mais c’était tellement passager... Et puis j’ai vécu l’enfermement, être chez soi à ne rien faire(...) Je sortais très peu, très, très peu. (...) Quand les enfants sont partis, ça a été le vide, mais complètement, je n’avais plus d’avenir, plus d’identité, je n’attendais plus rien de la vie... Je faisais un peu de ménage, de cuisine, de broderie... Mais ça ne me satisfaisait pas, ça ne me satisfaisait pas du tout. Si mes enfants venaient, c’était la grosse joie... Dès que je pouvais les accrocher et les garder à manger. (...) Parce que la maison vidée, sans rien du tout... On perd... On se raccroche aux bêtes, mais les bêtes c’est pas ça... On a besoin de paroles, on a besoin d’échanger et moi la rue c’était pas suffisant... Tout du moins, je ne voyais plus comment... Je ne levais plus la tête, le regard des autres me rendait... J’avais l’impression d’être à la charge de la société au lieu de pouvoir rendre service. (...) Ce n’était pas m’ennuyer, c’était être le prisonnier de l’inutile... J’avais l’impression de tourner en rond, d’être dans un bocal. Je ne se sentais plus l’utilité d’aller dehors puisque je ne servais à rien, je n’avais aucun besoin, je ne sentais aucun besoin. (...) je crois que j’étais très loin. Moi, j’appelle ça la descente aux enfers... Je ne voudrais pas que vous le disiez... mais j’ai été jusque dans l’alcool, parce qu’une femme qui est vraiment seule, elle finit là-dedans. (...) Je l’ai beaucoup caché, même à mon médecin, parce que la honte et la culpabilité sont énormes, mais je ne trouvais plus que ça à faire les derniers temps, entre le raccommodage et les machins. Je remplissais ma vie autrement... »