6.4 Synthèse.

Le parcours de M. Otavalo permet de découvrir de nouvelles modalités de gestion de l’absence d’emploi permettant de se protéger de la souffrance de la perte : le travail est disqualifié tout comme le sont les démarches de recherche. Le sujet se protège ainsi de la déception de ne pas les voir aboutir.

Cette stratégie défensive n’empêche pas l’apparition de quelques difficultés : on retrouve par exemple, comme chez Mme Chesnais, la nécessité de remédier à la disparition de l’étayage psychique apporté par le caractère obligatoire du travail. Cet étayage est formulé ici en terme de « transitionnalisation » et vient illustrer les propositions théoriques formulées chapitre IV, § 2.2.2. Le travail permet, dans la mesure où il impose un cadre stable, collectivement défini et entretenu, de suspendre un certain nombre de questions concernant le sens de l’existence, questions se concrétisant quotidiennement dans le choix du contenu et de l’organisation des journées. M. Otavalo découvre que privé de la routine et des contraintes, il peut devenir bien difficile d’entretenir le désir d’investir : la liberté n’est pas toujours facile à assumer.

On retrouve d’autre part comme dans le parcours précédent la nécessité de gérer les composantes agressives libérées par la rupture du lien à l’objet-travail. Le parcours de M. Otavalo se distingue par la particularité de cette gestion. Il s’engage dans une démarche militante qui peut rappeler par bien des aspects certaines stratégies adolescentes d’opposition à la norme et qui lui permet de parer à la rupture du contrat narcissique : la règle sur laquelle repose ce contrat n’est pas reconnue et M. Otavalo se propose au contraire de participer à l’émergence de nouveaux énoncés fondamentaux qui pourraient constituer d’autres repères de la vie sociétale.

Notons enfin que le cheminement de M. Otavalo montre que l’évolution vers une relation moins exclusive à l’activité professionnelle ne correspond pas au rejet massif de cette relation, mais bien plutôt à une meilleure perception de l’ambivalence unissant à cette activité. On retrouve l’un des fondements de ma réflexion : le deuil du travail ne peut se poser en terme de tout ou rien mais comme la définition d’une nouvelle place de l’objet-travail dans notre existence.