Les secteurs de la production économique au Rwanda traditionnel étaient l'agriculture, l'élevage et l'artisanat. Aucun secteur économique n'était réservé exclusivement à aucun groupe social quelconque, mais les choses étaient telles qu'un groupe se trouvait majoritaire dans tel ou tel autre secteur. Nous allons le voir pour ce qui est de l’agriculture, de l’élevage et de la chasse.
L'Agriculture
D’Hertefelt résume ce qui est de ce secteur : ‘“ C'est principalement par l'agriculture que la majorité de la population du Rwanda assurait sa subsistance. L'agriculture incombait aux Hutu: les Tutsi et les Twa hunyu dédaignaient les tâches agricoles, les premiers parce qu'ils les considéraient comme étant en dessous de leur dignité, les seconds parce qu'ils préféraient des occupations moins monotones. Ce n'est que vers le début du 20ème siècle que quelques groupements twa situés à la lisière de la forêt commencèrent à s'adonner sporadiquement à l'agriculture’ ” 32 .
Au fil des temps, l'agriculture a cessé d'être le monopole Hutu. Aujourd'hui, aucune famille rurale ne peut se passer de l'agriculture, et nous avons vu que, sur le territoire rwandais, rares sont les familles Hutu sans voisins Tutsi.
L'élevage
Même si cela semble aujourd'hui hypothétique, on accepte que le bétail bovin est une importation tutsi, comme l’affirme D’Hertefelt: ‘“ mais ce sont incontestablement les Tutsi qui l'ont importé en masse’ ” 33 . Dans l'ensemble, ‘“ le bétail contribuait peu à la satisfaction des besoins de subsistance et seuls les Tutsi pouvaient se procurer un nombre suffisant de vaches pour nourrir une famille. Même si l'élevage du bétail bovin ne déterminait pas les activités de la majorité des Rwandais, il occupait une place prépondérante dans la structure sociale et politique du Rwanda ’ ” 34 . Karibwami précise que ‘“[la vache] était l'objet de beaucoup de considération. Elle symbolisait la richesse et le bonheur. Outre son intérêt économique, elle était aussi une source de prestige pour son propriétaire, qu'elle aidait, par les liens de "féodalité" dont elle constituait la base, à accroître son influence sociale et politique’ ” 35 . En plus de la vache, le Rwanda connaissait l'élevage d'animaux domestiques : les chèvres, les moutons sans laine, les poules et les chiens.
La Chasse
Les finalités de la chasse différaient selon les groupes sociaux : ‘“ [elle] constituait un moyen de satisfaire les besoins de subsistance pour les Twa-hunyu des forêts de la crête et des volcans et pour quelques populations du Rwanda oriental. La viande de chasse était méprisée par les Tutsi et dans l'ensemble aussi par les Hutu; seuls les Twa en mangeaient régulièrement. Les grands Tutsi faisaient la chasse à titre sportif, pour montrer leur adresse et leur courage. Elle leur procurait aussi de l'ivoire et des peaux qui servaient à leur habillement et à l'ornementation de leurs habitations’ ” 36 .
Globalement, le système socio-économique du Rwanda était tel que les groupes sociaux étaient nettement différents, les uns jouissant de privilèges que les autres n'avaient pas. Karibwami résume cette idée : “ ‘La base économique et les institutions d'Etat (...) avaient créé au Rwanda deux classes sociales hiérarchisées: d'une part, une catégorie de personnes disposant sur la société du pouvoir de coercition, des richesses matérielles, et qui recevaient le travail et les fruits du travail d'une catégorie de personnes; d'autre part, cette dernière catégorie, qui était celle de la grande masse de la population, soumise au pouvoir de l'Etat et ne disposant que de très faibles moyens matériels pour se procurer ce qui lui était nécessaire pour vivre. Tous les artifices culturels et idéologiques servaient à consolider ce statu quo et à présenter la classe privilégiée comme composée d'hommes supérieurs dont le rôle de dirigeants découlait de la nature des choses.’ ” 37
HERTEFELT(D') (M). op cit, p. 25
Idem, p. 26
Ibidem
KARIBWAMI (J). op cit, p. 80
Idem, p. 27
Idem, pp. 85-86