3.2.1.5. Malgré l'éducation, l'agressivité et la violence disparaîtraient-elles ?

Distinction entre agressivité et violence

La psychanalyse définit deux formes d'agressivité : l'agressivité maligne, orientée vers la destruction, et l'agressivité bénigne, de type adaptatif 444 . La seconde est au service de l'individu et de l'espèce; elle est biologiquement adaptative et prend fin dès que la menace a cessé d'exister. La première est spécifique de l'espèce humaine et pratiquement inexistante chez la plupart des mammifères 445 . L’agressivité bénigne ne constitue pas de danger à la vie sociale, alors que l'agressivité maligne est la manifestation d'une perversion de la personnalité, donc une anomalie. Se référant aux travaux de From et de Freud, F. Vaillant explique que chez l'homme, l'agressivité bénigne ne porte pas préjudice à la capacité de relation avec autrui, bien au contraire. Cette notion affine la remarque selon laquelle l'agressivité bien éduquée pouvait concourir à l'élaboration de tâches constructives. L'agressivité maligne se manifeste par un comportement qui ne parvient plus à être contrôlé, aboutissant à des actes violents, destructeurs. Elle peut être structurée en simple névrose comme en passions haineuses, voire en délires de persécution. Ces états sont capables de se manifester par des actes violents 446 .

Ces explications font comprendre que la violence peut provenir de l'agressivité maligne. Cependant, les notions d'agressivité et de violence ne sont pas à confondre. En effet, un aviateur qui large de son avion des bombes à fragmentation peut agir froidement, sans aucune agressivité; et, inversement, ce n'est pas parce que quelqu'un a un comportement agressif dans la vie quotidienne qu'il est capable de commettre un meurtre 447 .

La notion de combativité a été introduite pour clarifier la différence entre violence et agressivité. Elle est

‘“ l'ensemble des combats adaptatifs pour l'individu ou l'espèce" (...). Elle permet à un sujet de développer ses relations à autrui, si bien que "les combatifs sont caractérisés par un bon sens du réel : leur rapport à eux-mêmes et au monde n'est pas seulement imaginaire et libidineux mais fondé sur une juste appréciation de soi, de ses possibilités ainsi que des risques de l'existence". Ainsi, continue l’auteur, à l'opposé de l’agressivité vitale, comprise comme puissance de combativité, l'agressivité destructrice apparaît chez les sujets pervers. Ces violents sont prisonniers d'un Moi débile qui les tient sous la dépendance de pulsions et tabous réunis contre lesquels ils ne peuvent mobiliser que des défenses narcissiques et passionnelles ”. 448 .’

Nous comprenons donc que l'agressivité destructrice se retrouve chez des sujets "malades", qui ne sont pas normaux, et que la violence n'est pas nécessairement liée à l'agressivité. Nous comprenons aussi que l'agressivité bénigne ne constitue pas un danger et qu'une éducation adaptée peut éviter l'agressivité maligne.

Notes
444.

VAILLANT (F). La non-violence : essai de morale fondamentale. CERF, Paris, 1990, p.26

445.

FROMM (E). La Passion de détruire. Paris, Robert Laffon, 1975, p.25.

446.

Idem, p. 25

447.

VAN CANEGHEM (D). Agressivité et combativité. Paris, PUF, Coll.’’le psychologue’’, n° 72, 1978, p.19.

448.

Idem, p.19