1.2.2.3. La Géographie

Contexte géo-politique

D'une façon générale, le Rwanda se situe dans la zone où un problème se pose à ce niveau géopolitique: celui de la relativité des frontières étatiques, sujettes à des conflits implicites et explicites. Sicard situe clairement ce problème :

‘“ Dans l'ensemble, les frontières des nouvelles nations en voie de formation se sont greffés sur les frontières héritées de la colonisation et de la domination étrangère. Les partages malheureux du Katanga, Biafra, Pakistan, Tchad, par exemple et toutes les situations où le feu couve, se soldent généralement par des échecs, du fait de l'hostilité unanime des leaders en place, mais aussi du fait des tentatives d'unification plus vaste dans un cadre fédéral ou confédéral (africain, par exemple). On se trouve confronté à deux tendances contradictoires. La première est marquée par la prédominance d'une politique des ethnies dont l'une principale doit donner naissance, (...) à la nation considérée comme phénomène prioritaire. (...) Dans la seconde tendance prédomine une perspective de bien plus large envergure devant aboutir à une forme "d'Etats-Unis" dans lesquels, à très long terme, les ethnies puis les "Nations-Etats" se fondront, au moins superficiellement en vue d'un plus ample développement économique... En fait, c'est vers des frontières du premier type - héritage colonial, mais aussi héritage traditionnel - que les nations "en construction" se dirigent d'abord, en ne perdant pas de vue, par delà les frontières coloniales, le souvenir des anciens conglomérats nés de l'extension des empires passés. Ici, empires et royaumes pré-coloniaux, là, empires coloniaux ” 507 .’

N'est ce pas dans ce contexte que se situent les problèmes actuels des pays des grands lacs en Afrique centrale ? D'un côté, certains voudraient récupérer des espaces perdus lors du tracé définitif des frontières des Etats africains par les colonisateurs. Que ce soit vrai ou faux, on en parle, on l'écrit dans des tracts ou journaux et cela rentre dans les consciences. De l'autre côté, il y a des habitants qui, malgré leur nationalité obtenue par naturalisation, sont chassés, expulsés, considérés par les autochtones comme n'étant pas chez eux.

Le mobile à la base de ces mouvements semble le refus de l'héritage colonial. Dans ce même contexte, l'historien F. Nahimana dit que le tracé des frontières a été traumatisant pour les Rwandais, pour qui le Rwanda est l'ensemble des régions dont les habitants parlent le "Kinyarwanda". Et aujourd'hui, dans le cadre de la recherche de solutions au conflit rwandais, qui devient constant, on entend des thèses qui proposent la création de Hutu-lands et de Tutsi-lands; rappelons que ces deux groupes ethniques du peuple rwandais vivent ensemble sur les mêmes collines depuis des siècles et sont liés par des alliances matrimoniales; faudrait-il alors aussi un Hutsi-land pour les métis!

Autant d'éléments qui ont constitué et constituent encore un grand problème pour la construction d'une citoyenneté rwandaise. Dans cet imaginaire social, à quel territoire et à quelle communauté le rwandais qui évolue maintenant se sentira-t-il appartenir !

Voici le contexte dans lequel est donné l'enseignement de Géographie.

Notes
507.

SICARD (E). op. cit., p.11