6.2.2 Formes Bussière et Bussière amendée

Pour mieux restituer la répartition de la population dans l’espace à partir d’une certaine distance au centre, Bonnafous et Tabourin ont proposé d’amender la formulation originelle de Bussière par l’introduction d’un paramètre Kx. Ce paramètre renverrait à la dotation en infrastructures de transport en particulier de type autoroutier.

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Nous avons donc confronté les estimations obtenues sur différentes aires urbaines de la région Rhône-Alpes et, pour le cas de Lyon, sur des périmètres qui ne se limitent pas à l’aire urbaine.

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Graphique 4.8 : Répartitions théoriques et réelles de la population sur l’aire urbaine de Lyon

Nous avons estimé également cette forme sur deux périmètres plus vastes que celui de l’aire urbaine. Le premier, Lyon et 45 km de rayon, correspond au périmètre où le nombre d’actifs est équivalent au nombre d’emplois. Le deuxième, nettement plus grand, correspond à la définition retenue par l’Enquête Transport et Communication qui considère comme déplacement local le déplacement dont l’origine et la destination sont en France et à moins de 80 km à vol d’oiseau du domicile.

Cette extension du périmètre se traduit par une accroissement sensible du nombre de communes pour lesquelles il convient de calculer ces distances temps et ces distances réseaux. On passe de 239 communes pour l’aire urbaine à 552 dans le cas de Lyon et 45 km de rayon et à 1 664 pour Lyon et 80 kilomètres de rayon.

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Graphique 4.9 : Répartition théoriques et réelles de la population sur Lyon et 45 km de rayon

La zone de Lyon et de 45 km intègre dans des villes de taille relativement importante comme Vienne et comme Villefranche sur Saône qui, sur la base du ZAU, constituent des aires urbaines en tant que telles compte tenu de leur niveau d’emplois offerts et de leur indépendance à l’égard d’un autre pole. Ces communes se traduisent par des « décrochements » sur la courbe de la population cumulée en fonction de la distance au centre à vol d’oiseau qui n’apparaissent pas au niveau de la courbe de population cumulée ordonnée suivant les distances-temps (Graphique 4.9).

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Graphique 4.10 : Répartitions théorique et réelle de la population sur Lyon et 80 km de rayon

Outre les villes relativement importantes déjà mentionnées pour Lyon et 45 km de rayon, le périmètre de 80 km intègre des agglomérations comme St Etienne dont l’incidence de la taille est perceptible aussi bien au niveau des distances euclidiennes que des distances-temps (Graphique 4.10).

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Graphique 4.11 : Répartitions théoriques et réelles sur l’aire urbaine de St Etienne

Pour l’aire urbaine de Grenoble comme pour celle de St Etienne, la saturation de l’espace apparaît de manière nette sur la base de la contrainte de temps de déplacement. A partir d’un temps de 25 à 30 minutes environ, la population cumulée n’augmente quasiment plus.

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Graphique 4.12 : Répartitions théoriques et réelles sur l’aire urbaine de Grenoble

La confrontation des estimations réalisées avec la formulation de Bussière amendée privilégiant les distances euclidiennes et la formulation originelle de Bussière retenant les distances-temps offre là aussi des résultats intéressants.

Avec les distances-temps, il apparaît que la formulation originelle de Bussière donne de meilleurs résultats que la formulation amendée en particulier dans le cas de l’aire urbaine de Lyon. Compte tenu de son mode de définition, fondé sur le niveau des migrations alternantes, la bonne adéquation observée entre distances-temps et population cumulée pour l’aire urbaine de Lyon n’est pas complètement surprenante. L’utilisation des distances-temps permet donc de s’affranchir du recours au paramètre K introduit dans la formulation originelle.

Tableau 4.24 : Résultats des paramètres des deux modélisations
Bussière amendé Bussière
Types de distances Distance euclidienne Distance-temps
Périmètres D0 γ K D0 γ
Aire urbaine de Lyon 45 000 -0,5915 20 000 0,88 6 692 -0,1653 0,97
Lyon et 45 Km de rayon 20 475 -0,3705 23 080 0,96 4 277 -0,1149 0,98
Lyon et 80 Km de rayon 5 100 -0,1981 32 300 0,96 1 737 -0,0540 0,97
Aire urbaine de St Etienne 30 401 -0,9221 5 548 0,52 4 805 -0,2962 0,71
Aire Urbaine de Grenoble 24 807 -0,7059 6 035 0,85 7 300 -0,3114 0,90

A partir des résultats rassemblés dans le Tableau 4. 24, on peut noter que les conclusions obtenues sur la base des précédantes estimations de la fonction exponentielle sur les densités et la population cumulée se vérifient également à ce niveau. Plus la « ville » est peuplée, plus son degré d’étalement est important, signifié par des gradients de faibles niveaux.

Les niveaux des gradients sont nettement supérieurs dans le cas des estimations retenant la forme amendée que dans celles de la forme originelle. Le taux de décroissance de la population est de 59 %/km pour l’aire urbaine de Lyon dans le premier cas et de 16 %/km dans le deuxième cas.

Il est possible de s’intéresser également aux résultats de ces deux formes d’estimations dans le temps comme nous l’avons fait pour les densités. Compte tenu du travail de redressement nécessaire, nous ne présentons des résultats que pour le cas de Lyon et 45 km en 1975.

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Graphique 4.13 : Distributions théoriques et réelles de la population cumulée de Lyon en 75
Tableau 4.25: Résultats des paramètres des deux modélisations
Périmètres Bussière amendé Bussière
D 0 γ K D 0 γ
Lyon et 45 Km de rayon 49 830 -0,6097 15 579 0,86 4 200 -0,1227 0,94

Ces résultats n’infirment pas ce que nous avions noté pour l’année 1990 et sur les densités. La modélisation sur la base de la forme de Bussière retenant les distances-temps offre des résultats plus significatifs que ceux issus de la forme amendée privilégiant les distances euclidiennes.

Sur la période, le gradient comme la densité centrale estimée diminuent dans le cas de l’estimation sur la forme amendée. Comme pour les estimations sur les densités, le gradient obtenu sur la base de la formulation originelle avec des distances-temps est en croissance sur la période traduisant davantage un phénomène de concentration que d’étalement.

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Graphique 4.14 : Distribution de la population cumulée de Lyon en 1975 et 1990

La différence entre les deux courbes de population cumulée en 1975 et 1990 (Graphique 4.14) permet d’apprécier la modification de l’accessibilité. Saisie sur la base des distances temps, elle se traduit par une modification de la répartition de la population. Les communes enregistrant une hausse de leur population sont celles qui ont connu les gains les plus importants d’accessibilité.

Plus généralement, cette analyse comparative entre estimation fondée sur la forme amendée avec des distances euclidiennes et la formulation originelle de Bussière avec des distances-temps confirme la signification qui avait été donnée au paramètre K lors des précédents travaux (Bonnafous, Tabourin, 1996 ; Schéou, Tabourin, 1998), même si, de toute évidence, il n’y a probablement pas d’équivalence complète entre les deux. Se passer du paramètre K, dont le contenu n’a pas encore été explicité de manière formelle, autorise une plus grande prudence et rigueur dans l’explication de la structuration spatiale. En outre, l’utilisation des distances-temps apporte un gain de signification des facteurs intervenant dans les choix de localisation des ménages. La contrepartie de ce gain de signification est une perte d’opérationalité lié au travail fastidieux de calcul des distances-temps et des distances-réseaux.