3. Conclusion

L’existence de phénomènes de dépendance spatiale dans les estimations réalisées sur la base des moindres carrés nécessite de mobiliser les outils de l’économétrie spatiale. Ces derniers ont été utilisés à deux niveaux, pour les estimations des fonctions de densité sur les différentes aires urbaines, et pour les estimations de facteurs explicatifs de la physionomie des aires urbaines distincts de la seule distance au centre.

Nous avons estimé, pour le premier niveau, deux types de modèles, un modèle spatial autorégressif et un modèle avec autocorrélation des résidus, en retenant deux types de matrices d’interaction. Au terme ces estimations, il apparaît que le modèle avec autocorrélation des résidus est plus performant. En le déterminant pour une fonction exponentielle négative sur les densités, nous n’avons pas infirmé la principale conclusion du modèle théorique intégrant une hétérogénéité et une anisotropie de l’espace. Il émettait en effet l’hypothèse que la similarité des comportements des individus en termes de choix d’itinéraires, en fonction de leur plus ou moins grande proximité par rapport aux d’axes de transport rapides, génère de l’autocorrélation spatiale.

Pour l’ensemble des aires urbaines, les résultats de ces modèles spatiaux diffèrent de ceux obtenus sur la base des estimations privilégiant les MCO. La tendance à l’étalement est moins nette que précédemment. Le gradient diminue bien sur la période correspondant à un aplatissement des fonctions de densité dans le temps. Mais le rythme de cette décroissance est cependant plus faible (-1,3 % entre 1975 et 1999) que celui obtenu sur la base d’estimations classiques avec les MCO (-1,5 % entre 1975 et 1999).

Ces modèles spatiaux ont été également estimés pour la recherche des facteurs explicatifs de la répartition des densités dans l’espace. Les variables retenues correspondent pour un grand nombre d’entre elles aux déterminants identifiés par le modèle standard de l’économie urbaine. Nous avons construit à cet effet deux indices spécifiques, l’un relatif à l’ensemble des services et des équipements des communes, l’autre correspondant à une approche de la répartition des aménités naturelles dans l’espace. Ces modèles ont été mobilisés dans deux approches, l’une fondée sur un indicateur synthétique avec le gradient de la fonction exponentielle négative intégrant l’autocorrélation spatiale puis régressé sur d’autres variables, la seconde optant pour les densités communales.

Les résultats déconcertants obtenus avec cette première approche nous ont incité à privilégier la seconde. En retenant les seules variables correspondant au modèle standard de l’économie urbaine, il apparaît que le modèle spatial combinant autocorrélation des résidus et autorégression assure des résultats meilleurs que les ajustements realisés suivant les MCO et que ceux fondés sur la seule distance au centre. Le passage des estimations avec des MCO à celles avec dépendance spatiale a des effets différents selon les tailles des aires urbaines. Pour les grandes, l’intégration de la dépendance spatiale modifie uniquement les coefficients des facteurs. Pour les communes des petites aires urbaines, ce changement porte également sur la significativité des variables. La variable population de la commune centre comme celle sur le taux d’activité ne le sont plus dans le cadre du modèle SARMA.

Pour les variables elles-mêmes, indépendamment des années 1982 ou 1990, des types de matrices d’interaction retenues et des types d’aires urbaines, certaines d’entre elles apparaissent comme très significatives, comme le niveau d’équipements et de services des communes, l’existence d’aménités naturelles, le coût de transport. Les signes de ces variables sont conformes à ceux attendus. En particulier, on retrouve une baisse des densités, qui s’accentue entre 1982 et 1990, à mesure que les coûts de transport augmentent. L’impact de ces variables sur les densités est également non négligeable.

Des spécificités interviennent cependant selon la taille des aires urbaines. L’impact du niveau des équipements sur les densités est plus significatif pour les communes des grandes aires urbaines que pour les communes des petites aires urbaines. Cette situation est inversée pour l’incidence des aménités naturelles. La taille de population de la communes centre n’apparaît comme structurante que pour les communes des grandes aires urbaines. Le revenu moyen des ménages a contrario n’est significatif que dans le cas des communes des petites aires urbaines pour les deux années envisagées.

L’introduction de variables liées à l’emploi dans des modèles SARMA assure là aussi un gain dans la qualité des ajustements produits par rapport au MCO. Par rapport aux estimations n’intégrant que des variables correspondant aux déterminants du modèle standard, ce gain est effectif pour les emplois de distribution pour les deux types d’aires urbaines. Pour les emplois totaux, il ne l’est que pour les communes des petites aires urbaines. L’hypothèse émise d’une impact différencié selon les emplois sur les densités de population semble ne pas être infirmée.