3.1 : Les outils réglementaires : vers un instrument de planification des déplacements urbains

3.1.1 : Réglementation technique et comportementale

D’un point de vue économique, la réglementation a pour objectif de limiter, par le biais principal de l’instauration de règles et de normes, la quantité produite ou consommée sur un marché, de sorte à internaliser les effets externes générés par l’activité (CGP, 1993). La réglementation concernant les transports en milieu urbain joue sur deux plans : la réglementation technique et la réglementation du comportement. Il s’agit, dans le premier cas, d’intervenir, de manière normative, directement à la source, c’est-à-dire sur le niveau de production des effets externes. Dans le deuxième cas, il s’agit d’édicter des règles ou des mesures dont l’objectif est d’inciter les agents à modifier leur comportement de mobilité. L’application de la réglementation implique en toute logique son contrôle (CGP, 1993).

La réglementation technique porte de manière générale sur la réduction à la source de la production d’effets externes nuisibles pour l’environnement. Concernant les émissions de polluants atmosphériques, la réglementation consiste à édicter des normes antipollution portant sur les performances de la motorisation des véhicules et sur le système d’échappement des gaz. Elle s’accompagne en général de mesures fiscales dont l’objectif est d’inciter à l’usage de carburants moins polluants (voir OCDE, CEMT, 1995 pour un bilan européen et CERTU, 1999, pour une revue des réglementations françaises).

Concernant la pollution sonore, les normes sur la source de production de bruit s’imposent généralement aux constructeurs automobiles. Elles concernent soit l’isolation des moteurs, soit la conception du véhicule hors groupe motopropulseur, comme le système d’échappement des gaz ou la conception des pneumatiques (voir OCDE, CEMT, 1995 ; CERTU, 1999).

S’agissant de l’insécurité routière, les mesures réglementaires relèvent d’une réglementation sur les comportements se fondant sur un ensemble de dispositions juridiques imposant des normes de comportement, comme la limitation de la vitesse en ville ou l’obligation du port de la ceinture de sécurité.

En termes de régulation des déplacements, soit de manière coercitive, soit de manière incitative, la réglementation s’efforce d’amener les individus à réviser leur choix de mode de transport ou leur choix d’itinéraire, éventuellement à reconsidérer l’organisation de leur schéma quotidien d’activités. Bonnel et al. (1994) relèvent en Europe une batterie de mesures de modération du trafic cherchant à réduire l’usage de la voiture particulière en milieu urbain : le partage de la voirie, la canalisation du trafic, la ’tranquilisation’ du trafic (’zones 30’), la déviation du transit, le cloisonnement des centres et la dérivation des circulations, l’alternance de la circulation à partir du dépassement de seuils d’alerte à la pollution, l’interdiction de circuler ou encore, la réduction et la gestion de l’offre de stationnement (pour un survey des applications des mesures réglementaires, voir Arabeyre, 1993). Ce type de mesures réglementaires joue principalement sur une régulation directe du trafic par, de manière générale, une restriction de l’offre. Elle a un impact indirect sur la formation de la demande de déplacements en voiture particulière en ville puisqu’elle vise à dégrader les avantages en termes de qualité de service rendue par l’automobile – i. e. vitesse, confort, accessibilité.

Un autre type de mesures réglementaires a une visée plus incitative. Il tend à faciliter l’émergence de comportements de mobilité urbaine en phase avec les objectifs de réduction des effets externes. Les politiques d’incitation au covoiturage, mode de déplacement entre voiture particulière et transport collectif, cherchent par exemple à augmenter l’occupation moyenne des véhicules pénétrant en ville (voir études INRETS, 1997 ; CERTU, CETE Nord Picardie, 1999, voir également l’expérience californienne dans le cadre de la Regulation xv, Wachs, 1993). En offrant un accès aux centres-villes facilité aux voitures particulières occupées par plusieurs personnes – voies réservées sur la voirie urbaine, places de stationnement réservées - elles incitent à la modification des comportements de mobilité.

Il semble néanmoins qu’il soit possible d’aller plus loin sur le rôle de la réglementation dans la régulation de la demande de déplacements urbains. Outre une réglementation de type normatif ou une réglementation comportementale, la réglementation peut avoir une portée plus générale et avoir une visée de type institutionnel. L’objectif est alors de réguler l’organisation globale des déplacements dans un espace urbain délimité comme le propose la mise en place des Plans de Déplacements Urbains.