1.2 : La prise en compte du coût de la répression

La formalisation proposée dans le cadre de cette thèse exclut l’existence d’un coût de répression pour la puissance publique chargée du contrôle du stationnement. Or, dans l’analyse économique du crime, l’issue du modèle est de proposer une conclusion normative sur le niveau de répression optimal. La détermination du niveau de répression se fonde sur l’offre et la demande de crimes et sur le bilan coûts – avantages de la répression. Le niveau de répression optimal est fixé au niveau qui égalise le coût marginal de la répression et l’avantage marginal de la répression au regard d’un critère de choix social. Donc, d’un côté, l’analyse économique du crime s’intéresse au comportement économique de l’agent qui commet un délit, et de l’autre côté, mène l’investigation sur l’efficacité sociale de la répression en fonction des coûts que génère la répression.

Le premier développement du modèle proposé ici est de déterminer une fonction de coût de répression, notamment en évaluant le coût de production du niveau de probabilité de détection, d’une part, et le coût de production du niveau de l’amende, d’autre part. Il faut, d’un côté, évaluer la fonction de coût des forces de contrôle et déterminer un taux de rotation de la surveillance optimal en fonction de la productivité marginale du contrôle. De l’autre, il convient d’évaluer la fonction de coût de traitement de l’amende et de déterminer le niveau de l’amende optimal en fonction de la productivité marginale de l’amende. Le niveau de répression optimal doit donc être fixé à partir de la confrontation du coût marginal et de l’avantage marginal de chacun des outils de répression, en fonction du critère d’efficacité sociale retenu par le décideur public. Si la détermination du niveau de contrôle optimal ne modifie en rien le processus de décision de fraude de l’agent, en revanche, elle permet d’évaluer le volume de fraude optimal. L’enrichissement provient alors de la possibilité de déterminer un volume optimal de fraude cohérent avec l’objectif poursuivi dans la politique de régulation de la demande de déplacements.

A l’occasion d’un développement plus poussé, l’introduction du coût de la répression permet d’envisager la question de la fraude au stationnement sous la forme d’interactions stratégiques. Il s’agit ici d’élargir la problématique de la thèse en passant d’un simple problème de décision individuelle, c’est-à-dire l’analyse du comportement de fraude de l’agent qui stationne face à un niveau de répression exogène, à un problème, formalisé par un jeu, relevant de l’interaction entre deux agents, le fraudeur et le contrôleur. La décision de frauder ou de ne pas frauder de l’agent qui stationne motive le choix du niveau de contrôle du décideur public, en fonction des objectifs fixés par la politique de modération de l’usage de la voiture particulière et de la nécessité de dissuader, dans une certaine mesure, la fraude. Ce choix d’un niveau de contrôle motive à son tour la décision de l’agent qui stationne de frauder ou de ne pas frauder, et ainsi de suite. Le résultat de cette formalisation ne semble pas évident puisqu’il a pu être montré que la manipulation des outils de répression peut conduire à des comportements paradoxaux vis-à-vis du choix de frauder. Le choix du niveau de répression, compatible avec les objectifs de la politique des déplacements urbains, relativement à la réaction de l’agent qui stationne, est sans aucun doute plus délicat qu’il n’y paraît.

L’intérêt de passer par ce type d’analyse est alors d’introduire un problème d’asymétrie informationnelle. Il peut être posé l’hypothèse que l’agent qui stationne détient une information sur son comportement de fraude, concernant par exemple son comportement face au risque, qu’il cherche à cacher au décideur public de sorte à ce que le niveau de contrôle choisi lui permette de maximiser sa satisfaction. Le décideur public a alors comme objectif de déterminer un niveau de contrôle qui conduit l’agent qui stationne à révéler l’information sur son degré de préférence pour le risque. Tout l’enjeu du modèle, décrit sous la forme d’un jeu à information incomplète (l’un des agents, la puissance publique, ne connaît pas le type de l’agent qu’il a en face de lui - risquophile, neutre au risque ou risquophobe), est de déterminer un niveau de contrôle qui incite l’agent qui stationne à révéler son information sur son comportement face au risque, permettant d’atteindre un niveau de fraude socialement optimal compatible avec les objectifs de la politique de régulation de la demande de déplacements.