4.2 - Le train de vie

Le train de vie d'Adrien Richard, comme celui des patrons de la verrerie, s'avère confortable sans être ostentatoire ; ainsi, X. Mougin ne se fait édifier le château de "la houbette" 119 , (fig. 14), grosse maison bourgeoise dominant l'usine, que dans la perspective de sa retraite en 1904. Il achète du terrain, 87 ares, à la société près de la forêt domaniale et demande, moyennant redevances annuelles, à être autorisé à communiquer avec l'usine au moyen d'un sentier d'une longueur d'environ 80 mètres à travers le pré situé entre la forêt et la chapelle 120 . En 1886, veuf, il n'a qu'une domestique Marie Mone à qui succède Marie Courroy. Ce n'est qu'à la fin de ses jours, alors qu'il est pratiquement aveugle, qu'il est assisté de deux domestiques Marie Courroy, cuisinière, et sa soeur Adèle, femme de chambre. Dans la commune voisine de Zincourt, il possède une maison et des forêts qui favorisent l'assouvissement de sa passion pour la chasse 121 .

Le sous-directeur Jules Richard qui partage en 1886 sa maison avec l'employé Kleinrichard avant d'habiter le chalet qu'il acquiert à l'entrée de la Verrerie n'emploie qu'une domestique Antoinette Henry à laquelle succèdent Constance Robert puis Célestine Morel qui passe ensuite au service du fils Adrien.

Le personnel d'Adrien Richard s'étoffe quelque peu au fur et à mesure de l'évolution de sa famille et de sa trajectoire sociale. Jeune ingénieur, avec son épouse Marie, il réside chez ses parents se contentant des services d'une domestique. Charlotte Lina sert le ménage devenu indépendant.

Les fonctions de directeur lui permettent d'engager deux personnes : Marie Toussaint en tant que cuisinière et Clarisse Gagniaire en tant que femme de chambre. Suivant en cela la croissance des revenus, en 1911, quatre personnes s'occupent de la maison du directeur : une au jardinage, une à la cuisine et deux autres comme femmes de chambre. Après la guerre, Madame Richard étant décédée, le personnel de service se compose d'une "nourrice sèche" Aurélie Triboulot dite "la Roulie", d'une cuisinière Marie Vidart et d'une femme de chambre Marguerite Voignier dite "Mado". Aurélie Triboulot, née en 1878, exerce ensuite durant de longues années les fonctions de cuisinière 122 . A ce personnel, il convient d'ajouter deux gardes-chasse particuliers : Jules Petitfils et Camille Jeanmichel en 1911 et lorsque le directeur se dote, en 1907, d'une automobile Dietrich, d'un chauffeur Henri Darmoise.

Armand Dubut, né à Tours, qui est durant la guerre 1914-1918 chauffeur de Clément, chanteur à l'opéra comique, devient chauffeur attitré portant livrée bleue l'hiver et blanche l'été 123 . Adrien Richard demeure au chalet 124 , construction inspirée du modèle suisse, acquis par son père en 1874 sur Adeline Mougin épouse Didot 125 .

Le directeur dispose également de la maisonnette attenante : la "Colichette" composée de quatre chambres meublées, destinées à accueillir les amis et les hôtes de marque. Les écuries de l'usine abritent les quelques vaches et le cheval qu'il possède 126 .

Dans sa propriété, le directeur reçoit de nombreux invités : les connaissances des filles qui se trouvent en pension chez des religieuses, mais aussi des personnalités telles que le Cheik Burgana rencontré aux eaux vers 1920 ; Paul Reynaud président du Conseil vers 1939 ; le Maréchal Leclerc à la libération 127 .

Adrien Richard acquiert une petite propriété à Charmes, en bordure de la Moselle. Dans cette propriété de Sainte-Barbe, du nom de la statue qui orne l'espace, a été édifié par l'architecte-sculpteur Munier un fantaisiste château miniature.

Notes
119.

Lors des revendications ouvrières, après 1936, ce mot de houbette est apparu comme une provocation.

120.

- 37 J 23 ; A.D.M.

121.

La maison de Zincourt, lieu-dit les Prochons, est vendue en 1913 à Jacques Blum négociant à Charmes. Cette maison fait partie de la succession de X. Mougin : cadastre 79 P 4301.4302 ; A.D.V.

122.

Les informations sur le personnel : 6 M 352 ; A.D.V.

123.

Témoignage de Madame Barlier née Richard.

124.

La société verse un loyer et paie le chauffage.

125.

Cadastre 79 P 2984 ; A.D.V.

126.

En 1911, la jument porte le joli nom de "Clairette".

127.

Souvenirs de Madame Barlier née Richard.