1. Du monopole uvéfiste au morcellement fédéral (1888-1895).

Au cours des années 1888-1889, l’U.V.F. reste maîtresse du jeu fédéral. Les deux nouveaux groupements régionaux qui se constituent en 1889 dans le Sud-Est - leur existence sera d’ailleurs brève - le sont à l’initiative de son personnel consulaire 1001 . De plus elle marque sa prééminence en disqualifiant la Société d’encouragement pour le développement de la vélocipédie en France,coupable d’avoir organisé en août 1889, à Levallois-Perret, une épreuve baptisée championnat de France. L’U.V.F. prétexte alors de son “ droit de priorité ” - la S.E.D.V.F. ne date que de 1888 - pour affirmer que “ l’organisation des championnats de France est un monopole auquel personne n’a le droit de toucher ” 1002 . En outre, l’échec - il est dû à des dissensions internes - de l’organisation de grandes manifestations vélocipédiques lors de l’Exposition Universelle de 1889 est heureusement contrebalancé par les liens que tisse l’Union avec la Ligue nationale de l’éducation physique. En effet, après une courte période de malentendu 1003  , l’U.V.F. s’engage avec vigueur auprès de Paschal Grousset dans le but d’élever “ la vélocipédie à sa place si souvent discutée de sport sérieux et régénérateur ” 1004 et aussi d’accroître sa propre légitimité vis à vis des autorités. Ainsi met-elle au service de la Ligue son personnel consulaire, pousse-t-elle ses membres à l’adhésion et incite-t-elle le Véloce-Sport, son organe officiel, à s’engager dans cette campagne fortement empreinte de patriotisme. Ses président et vice-présidents, à côté de ceux des groupements gymniques, nautiques, hippiques, alpins, d’escrime et de tir, y gagnent le titre de membres de droit de la Ligue.

Pourtant, le renforcement de la primauté uvéfiste sur le cyclisme associatif n’empêche pas qu’elle soit sérieusement contestée à partir de 1890.

Notes
1001.

L’Union vélocipédique de la Drôme, fondée le 20 janvier 1889, puis élargie quelques mois plus tard à l’Ardèche, naît de la volonté de A. Dorne, vice-consul de l’U.V.F. à Romans (Le Cycliste, février 1889). Elle périclite dès 1890. La tentative d’A. Rousseau, consul à Marseille, d’implanter une Fédération des sociétés vélocipédiques du Sud-Est ne va pas au-delà d’un congrès peu suivi, le 23 juin 1889 (Le Véloce-Sport et le Veloceman, 27 juin 1889). L’activité professionnelle des deux hommes – ils sont tous deux marchands de cycles – n’est pas étrangère à ces échecs. Ainsi A. Dorne utilise ouvertement le bimensuel L’Union vélocipédique de la Drôme et de l’Ardèche, journal officiel de la fédération des clubs de ces départements, en faveur de ses intérêts commerciaux.

1002.

Le Cycliste, octobre 1889. Décision prise lors de la séance du comité exécutif du 2 septembre 1889. En conséquence de cette disqualification, “ toutes les sociétés qui admettraient dans leurs courses les membres de la S.E.V.D.F. ou qui laisseraient courir leurs membres dans les courses de cette société seraient disqualifiées d’office ”. Quant au secrétaire de la S.E.D.V.F., Paul Faussier, déjà impliqué dans l’épisode de l’A.V.F., il est exclu à vie.

1003.

Début novembre 1888, les membres de l’U.V.F. et surtout M. Martin s’émeuvent que la vélocipédie ne soit pas citée “ à côté du foot-ball, du cricket, voire même des menus jeux dans l’ouvrage écrit par M. Philippe Daryl [alias Paschal Grousset] sur la Renaissance physique ”. Le Véloce-Sport et le Veloceman, 8 novembre 1888. Le 9 novembre, P. Grousset assure que la vélocipédie scolaire sera en bonne place dans les actions de la Ligue. Le Véloce-Sport et le Veloceman, 15 novembre 1888.

1004.

Le Véloce-Sport et le Veloceman, 22 novembre 1888. Article de M. Martin intitulé : “ Pro Patria ! Appel aux vélocipédistes français ”.