La densification des réseaux profite de l’accroissement du nombre de localités nanties d’une société : 778 en 1895, 1009 en 1909 ainsi réparties :
Nb. de localités du département dotées d’1 société ou plus |
1895 | 1909 | ||
Nb. de dpts | % | Nb. de dpts | % | |
1 | 4 | 4,6 | 4 | 4,6 |
2 | 4 | 4,6 | 1 | 1,2 |
3-4 | 15 | 19,2 | 7 | 8 |
5 à 9 | 37 | 47,4 | 30 | 34,5 |
10 et plus | 27 | 34,6 | 45 | 51,7 |
Total | 87 | 100 | 87 | 100 |
Source : THÉVIN F. et HOURY C. : Annuaire général…, op. cit., 1911. |
En s’abaissant de 22 à 11, les maillages très lâches - moins de 5 localités “ cyclistes ” sur un espace départemental - se raréfient et se cantonnent à la Corse ainsi qu’à quelques points du Massif Central (Cantal, Corrèze, Haute-Loire, Lozère), de la chaîne alpine (Basses et Hautes-Alpes), de celle des Pyrénées (Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Orientales et Ariège) et de ses abords (Gers). À l’inverse les réseaux assez denses à denses - au moins 10 localités “ cyclistes ” - essaiment et deviennent majoritaires (51,7%) 1211 . Parmi ces nouveaux venus, la Meurthe-et-Moselle et la Haute-Savoie, à laquelle nous avons associé la Savoie, constituent des cas exemplaires.
Rapidement , à partir de 1900, la concentration des véloce-clubs au sud de la Meurthe-et-Moselle, à Nancy, Toul, Lunéville, Baccarat, devient caduque (cf. carte 23). Les nouvelles implantations se déplacent vers le nord et fleurissent dans le bassin métallurgique de Longwy-Briey. Au-delà d’une homogénéisation de l’espace départemental, cette évolution illustre la pénétration du cyclisme associatif dans les régions fortement industrialisées, processus que l’on retrouve aussi dans les Pays noirs du Pas-de-Calais 1212 , jusque là assez délaissés, ou dans le bassin houiller de Decazeville, au nord de l’Aveyron, qui voit se constituer l’Union cycliste de Decazeville et l’Union vélocipédique de Cransac. Peut encore être citée la région métallurgique et ardoisière du Segréen dans le nord-Anjou 1213 . Au sud du département de la Loire et au nord de celui du Doubs, autres zones tournées vers le secteur secondaire, le cyclisme associatif déjà bien implanté continue à gagner du terrain : d’une part à La Ricamarie, L’Horme, St Julien-en-Jarez, Lorette et Grand-Croix “ pour la “ Grand’rue ” industrielle et fumeuse que forme l’étroit bassin houiller de Saint-Étienne, Saint-Chamond et Rive-de-Gier ” 1214 , d’autre part dans plus de dix localités autour de Montbéliard et Valentigney, comme Béthoncourt, Voujeaucourt, Sochaux, Exincourt, Seloncourt….
Le cas savoyard met en lumière la progression vers les hautes vallées au cours des premières années du XXème siècle (cf. carte 24). Ainsi se constitue à proximité de l’Arve un chapelet de véloce-clubs : à Cluses (1900), Magland (1904), Sallanches (1910) et Saint-Gervais (1910). En Tarentaise le Vélo-club de Moutiers est fondé en 1901, l’Union sportive de Bourg-Saint-Maurice en 1909. La bicyclette groupe les adeptes de ces localités reculées avec un temps de retard sur les zones basses déjà largement atteintes avant 1900. Ce décalage - il est celui de l’entrée dans la modernité - résulte du handicap d’un enclavement brisé plus tardivement puisque la voie ferrée n’arrive à Chamonix qu’en 1901 et qu’en Savoie, elle ne dessert Moutiers qu’à partir de 1893 - la ligne de Maurienne date, elle, de 1857 - et Bourg-Saint-Maurice que juste avant la guerre, en 1913. L’Union sportive, et donc la section vélocipédique, de cette dernière bourgade est d’ailleurs fondée à l’initiative des employés du chantier ferroviaire 1215 .
Même si de grands déséquilibres nationaux subsistent, le cyclisme associatif continue donc par petites touches à étendre sa toile sur le territoire français. Localement l’espace rural est mieux pourvu, les régions industrielles sont progressivement gagnées, les périphéries urbaines également, autant d’avancées qui, pour ponctuelles qu’elles soient, peuvent induire des modifications de la composition sociale des sociétés.
Cf. Annexe stat. C 3 : Nombre de sociétés vélocipédiques et de localités qui en sont pourvues par département et par statut administratif des localités (1909) – Tableau.
HUBSCHER R. : L’histoire en mouvements…, op. cit., pp. 90-91.
Sont ainsi créés en 1910 la Joyeuse de Noyant-la-Gravoyère, la Pédale de la Pouèze et en 1911 le Réveil de Combrée.
MARTIN M. : La grande enquête…, op. cit., p. 297.
FAUCHER A., CAMBRÈS G. : Cent ans déjà, 1896-1996, la grande histoire du rugby savoyard, La Ravoire, 1996, p. 44.