2.1.3.5 Comparaison des deux approches stratégiques

En clair, il y a des différences entre les deux approches sur la compréhension de texte et le rappel. Ceci commence avec les unités d’analyse différentes (Longueur des états des clauses vs propositions). L'une (l’approche référentielle) assume que deux éléments d’un texte peuvent seulement être connectés s’ils co-apparaissent dans une MCT à capacité limitée, l’autre (l’approche causale) permet toutes les connexions possibles. Différents mécanismes sont supposés contribuer au rappel d’un élément de texte (structure causale vs temps dans la MCT). Enfin, elles supposent que les composantes d’un texte sont reliées par différentes relations (causale vs référentielle). En dépit de ces réelles différences, les deux approches ont généré des supports empiriques substantiels et elles se complètent plus qu’elles ne divergent.

Les conclusions importantes qui ressortent des travaux de Fletcher et al. (1988) sont les suivantes. Les auteurs ont confirmé les observations de Trabasso et van den Broek (1985) selon lesquelles le statut de chaîne causale et le nombre de relations causales sont reliées à la mémorabilité d'un élément de texte. Ces résultats ont en même temps été étendus à un niveau individuel de propositions. Les lecteurs retiennent en MCT les dernières propositions les plus causales de la chaîne causale pendant la lecture. De plus, le nombre des cycles de traitement qu'une proposition subit en MCT et le nombre de connexions que ceci permet vers d'autres propositions influencent la probabilité de mémorisation de cette proposition. Leurs résultats ont mis en évidence que les connexions causales contribuent à la cohérence du texte, alors que l'importance des connexions référentielles est moins évidente. Enfin, les résultats démontrent que le but de la compréhension d'un texte narratif est de découvrir une séquence de liens causaux qui connectent le début d'un texte à sa fin. Mais ces résultats mettent à la fois en évidence l'importance de la MCT en tant que goulet d'étranglement. Fletcher et al. (1988) ont cependant constaté que les informations relatives au but des récits ne sont pas rassemblées et maintenues à travers les cycles de traitement, en MCT. Ceci suggère que les lecteurs focalisent leur attention sur le maintien de la cohérence locale d'un texte. Nous pouvons aussi ajouter que lors de la lecture de texte simples, les événements qui se produisent sont justifiés par le but du protagoniste, ainsi le lecteur n’a pas besoin de transférer les énoncés de but à travers les cycles de traitement puisque tous les événements rappellent en quelque sorte les buts du récit.

L’établissement de la cohérence causale à l’aide du raisonnement et des connaissances causales que possède tout individu semble aller au-delà de ces limitations. En effet, l’appréhension du monde paraît être déterminée par la causalité inhérente à tout être. Ainsi, il a été démontré que de nombreuses connexions sont effectuées par le lecteur. Ces connexions sont réalisées grâce à l’apparition conjointe d’éléments textuels en mémoire de travail, soit par focalisation directe de l’attention du lecteur, soit par réactivation d’informations lues précédemment dans le but d’établir la cohérence. Il apparaît donc que l’activité de lecture de textes narratifs dépasse la notion de mémoire de travail telle qu’elle est établie dans ces stratégies.