3.6.5.3 Temps de jugement.

Deux analyses ont été réalisées sur les temps de jugement. Dans la première analyse de variance, les facteurs Condition de jugement (simple lecture, double lecture et sans lecture) et Critère (nécessité et suffisance) étaient des facteurs inter-sujets. Le facteur Ensemble de relation (inversées, non reliées, reliées) était un facteur intra-sujet. Cette analyse n’a présenté aucun effet principal ou interactions significatives.

La seconde analyse a été faite sur les paires reliées uniquement. Condition de jugement (simple lecture, double lecture et sans lecture) et Critère (nécessité et suffisance) étaient des facteurs inter-sujets. Type de relation (rend possible, motivation, causation psychologique, causalité physique), et Distance (adjacent, non-adjacent) étaient des variables intra-sujets.

Les résultats ont montré un effet de la variable Type de Relation, F(3, 126) = 6,03, p = .0007. Les contrastes ont montré que la causalité physique prenait plus de temps (M = 9129 ms) pour être évaluée que les relations de rend possible (M = 8883 ms), motivation (M = 8822 ms), et causation psychologique (M = 8331 ms). De plus, les relations de rend possible étaient évaluées plus lentement que les relations de causation psychologique. Aucune autre différence n’était significative. Ainsi les jugements incluant le but du protagoniste (causations psychologiques et motivations) sont effectués plus rapidement que ceux qui n’incluent pas des buts. L’effet du facteur Critère était significatif, F(1, 42) = 3,653, p = .062, tout comme son interaction avec la Distance, F(1, 42) = 5,019, p = .0304, ainsi que son interaction avec les Conditions de jugement, F(2, 42) = 11,362, p = .0001. La double interaction de ces trois facteurs était aussi significative, F(6, 126) = 2,127, p = .0547. Les jugements d’après le critère de nécessité impliquent une négation de la cause afin de fournir une réponse. Par conséquent, le fait que les temps de jugement soient plus longs sous le critère de nécessité que sous le critère de suffisance, est dû au raisonnement causal qui nécessite une étape de traitement supplémentaire pour la nécessité par rapport à la suffisance. C’est la raison pour laquelle nous n’allons pas détaillé les résultats significatifs incluant le facteur Critère, les charges cognitives de raisonnement sous les deux critères n’étant pas similaires.

Un effet principal du facteur Distance est apparu, F(1, 42) = 4,576, p = .0383. Les phrases non-adjacentes (M = 8648 ms) étaient jugées plus rapidement que les phrases adjacentes (M = 8935 ms). L’interaction Distance * Condition était aussi significative, F(2, 42) = 11,362, p = .0001. Nous n’avons pas obtenu de différence significative entre les temps de jugement des paires adjacentes et non-adjacentes pour la condition de simple lecture (adjacent, M = 8586 ms; non-adjacent, M = 8749 ms) et pour la condition de double lecture (adjacent, M = 9058 ms; non-adjacent, M = 9226 ms). Cependant, pour la condition sans lecture, nous avons observé des temps de jugement plus courts pour les paires d’énoncés non-adjacents (M = 7968 ms) que pour les paires adjacentes (M = 9160 ms). Pour résumer, nous n’avons obtenu aucun effet de la distance pour les paires évaluées dans un contexte narratif. Autrement dit, l’effet de distance est uniquement dû à la condition de jugement sans lecture.

L’interaction Type de relation * Distance était significative, F(3, 126) = 5.781, p = .001. (voir Figure 10). Nous avons obtenu des temps de jugement plus courts pour les relations de causalité physique et pour les relations de rend possible quand ces relations étaient adjacentes que lorsqu’elles étaient non-adjacentes. Mais les temps de jugement étaient les mêmes pour les relations de motivation et de causation psychologique, indépendamment de la distance. Ainsi, tout ce qui est relié au but dans un sens ou dans l’autre semble être le point d’ancrage des lecteurs dans la construction d’une représentation cohérente en mémoire.

Figure 10. Moyennes de jugement en fonction de la distance des quatre types de relation causale.

Nos résultats montrent que les lecteurs différencient 4 types de relations causales. De plus nous obtenons une hiérarchie de force causale différente pour des paires de phrases adjacentes et non adjacentes.