4.6.1.2 Les inférences antérogrades

Elles anticipent l'information qui doit être décrite par le texte. Ces élaborations antérogrades prédisent l'apparition d'événements nouveaux ou indiquent une future "survenue" de l'information qui est lue au moment présent. Il existe deux catégories d'inférences antérogrades: Les prédictions et le maintien de l’événement focal (van den Broek, Fletcher, Risden, 1993; Bloom et al., 1990).

Les prédictions : Le lecteur peut utiliser sa connaissance de la causalité pour faire des prédictions sur les événements futurs. Dans le contexte de prédiction, la suffisance dans les circonstances est le critère qui intervient. Ainsi, les inférences antérogrades qui ont des antécédents suffisants dans le texte, sont plus à même d'être produites que celles dont le texte antérieur ne fournit pas de justification suffisante. La nécessité ne produit pas autant d'attentes que la suffisance, par conséquent, ce critère de nécessité devrait donc jouer un rôle moins important que la suffisance dans la production d'inférences sur les attentes spécifiques.

Le maintien de l'événement focal : Le lecteur peut anticiper le rôle causal d'un événement qui est lu et par conséquent, maintenir l'activation de cet événement. L'anticipation de la future apparition d'un événement ou l'anticipation de la future importance causale d'un événement, conduit le lecteur à maintenir l'information de l'événement focal activée. Le modèle de génération d'inférences de van den Broek (1990), propose que les lecteurs peuvent anticiper la nécessité d'un événement pour d'autres événements futurs. Par exemple, un énoncé de but au début d'un texte narratif suggère que le protagoniste mette en oeuvre certaines actions pour atteindre ce but dans le reste du récit. Cette notion inférentielle correspond à la notion de génération partielle d’inférence pour McKoon et Ratcliff (1992).

Il existe deux autres types d'inférences, moins décrits dans la littérature, qui sont les élaborations orthogonales, et les inférences associatives (van den Broek, Fletcher, Risden, 1993, van den Broek, Fletcher, Husebye-Hartman, 1995).

Les élaborations orthogonales: Elles concernent l'activation de l'information qui est impliquée par et coexistante avec l'information dans un événement focal. Les élaborations orthogonales peuvent prendre différentes formes, telles que les inférences spatiales ou visuelles.

Les inférences associatives: Elles activent l'information qui est associée à un événement focal. Ces inférences sont supposées être générées automatiquement à travers un mécanisme d'activation, ou dans un réseau connexionniste, à travers l'ensemble des patterns d'activation (Kintsch, 1988). Ceci est compatible avec le principe de puissance de l’information (Atlas & Levinson, 1981; Levinson, 1983). Selon ce principe un individu lit dans un énoncé plus d’informations qu’il n’en contient en réalité. En allant plus loin dans la réflexion on peut se dire qu’une relation causale est plus informative qu’une relation additive. En effet, A cause B suppose que A et B existent, et que A précède B. Selon Singer, Halldorson, Lear et Andrusiak (1992) les temps de lecture de la seconde phrase sont plus courts dans une séquence causale que dans une séquence temporelle. Puisque la causalité est une catégorie fondamentale de la cognition humaine, les lecteurs semblent avoir une préférence pour l’interprétation d’une séquence de phrases sous forme causale (Noordman & Vonk, 1998).

Les processus inférentiels qui prennent place lors de la lecture d'un texte narratif, afin d'établir la cohérence causale, fonctionnent en parallèle avec les processus inférentiels impliqués dans la recherche de la cohérence référentielle. La cohérence référentielle est établie quand le lecteur est au clair avec ce à quoi ou à qui font référence les référents de la phrase focale. Les relations anaphoriquesconnectent les référents à des objets, des personnes, à du texte antérieur (ceci est analogue aux inférences causales rétrogrades); tandis que les relations cataphoriques réfèrent à des objets ou personnes probables, dans le texte à venir (ceci est comparable aux inférences causales antérogrades).