3 - Charlot et son rapport aux objets

Chaplin est nourri de l’influence de Mack Sennett quant à l’utilisation des objets dans la logique du burlesque américain. Ainsi les films de l’année 1914 articulent-ils leurs scènes drôles sur des objets symboliques : la tarte à la crème, la voiture lancée à toute allure, les barbes que l’on tire, le banc où l’on vient s’asseoir dans l’espoir de la conquête amoureuse, la chaise que l’on retire, les trappes qui s’ouvrent brutalement, les tuyaux d’eau, les échelles etc. Mais très rapidement, Chaplin va se servir d’objets nouveaux pour régénérer le comique et surtout, il leur donnera des fonctions qu’ils n’avaient pas jusque là.

L’espace cinématographique lui ouvre un champ poétique large où l’utilitarisme des objets s’anéantit au profit de la fantaisie inventive.

‘« Grâce à une analogie fortuite offerte par une allusion fugitive, l’objet réel disparaît derrière un “imaginaire” dont la finalité se substitue à la sienne. Réciproquement, par l’utilisation différée ou contrariée de l’objet initial, en rapportant les choses dont il se sert à celles que son geste évoque, Charlot modifie l’aspect du monde au milieu duquel il évolue. Il parvient ainsi à se soustraire à une réalité qui le blesse en lui substituant une fiction qu’il peut d’autant mieux donner qu’elle est née de lui. » 37
Notes
37.

J. MITRY, Charlot, éditions universitaires, 1957, p. 66 et suivantes.