CHAPITRE III. MISE EN PLACE D’UN ESPACE PROPRE A CHARLOT

Avant même d’entreprendre cette étude, arrêtons-nous sur des points théoriques importants pour comprendre et situer la démarche de Chaplin. En effet, son statut particulier de réalisateur-monteur-acteur-compositeur et plus tardivement producteur, infléchit sa démarche de créateur et impose au spectateur une compréhension spécifique de ses œuvres.

Nous partirons des définitions de J.P Faye. 40 La première :

‘« Auteur, étymologiquement renvoie à autorité ”auctor”, à “auctoritas” : on qualifie “d’auteur”, dans tous les domaines, celui qui “promeut”, qui prend une initiative, qui est le premier à produire quelque activité, celui qui fonde, celui qui garantit, et finalement “l’auteur”, “l’auctoritas” est dans ce cas cette possibilité de “faire surgir quelque chose…de produire l’existence. »’

De ce point de vue et pour tous les films réalisés par Chaplin, nous ne devons jamais perdre de vue que l’énonciation étant le fondement de la production des énoncés, il nous faudra examiner dans quelle mesure il exhibe son propre pouvoir.

En outre, si l’on se réfère à la seconde définition :

‘« Le narrateur, c’est aussi Narus ou Gnarus, le contraire de l’ignare : celui qui sait, »’

il nous faudra comprendre comment l’image, et surtout dans la période dite muette, peut signifier une attitude narrative, comment Chaplin résout le délicat problème de montrer à la fois ce que voit le personnage et ce qu’il pense. Ceci se complexifie dans la mesure où Charlot est, suivant le terminologie de F. Jost, « le narrateur extradiégétique ou profilmique » 41 ,ou suivant celle de Genette « homodiégétique » 42 de Chaplin. Nous envisageons dans l’étude qui suit, d’abord, comment les images mouvantes et muettes construisent et racontent les lois d’un espace où Chaplin fait évoluer son personnage ; ensuite comment la mise en place de cet espace se réalise dans une écriture qui tisse l’univers singulier de Charlot.

Notes
40.

In Communications 38

41.

Ibid.

42.

Cité dans l’article de F. JOST