b) Un cas singulier de générique

Nous proposons d’abord une étude du générique de Tillie’s punctered Romance. Ce générique qui a “une fonction d’adresse évidente” possède dans ce film un traitement rare et singulier. Il présente les images animées des personnages, filmés en caméra fixe de façon frontale, tels qu’ils apparaîtront dans la suite - première symbolisation par le costume- chacune accompagnée d’une double inscription comme suit et par ordre d’importance dans la diégèse - association du nom de l’acteur et de son rôle dans le scénario -:

- Charlie Chaplin : The city slicker.
- Marie Dressler : Tillie... The Farmer’s daughter.
- Mabel Normand : Charlie’s city girl-friend.

Viennent ensuite deux personnages de moindre importance. Chaplin les place tous les deux dans le même cadre :

– Mack Swain Edgar Kennedy
– Tillie’s farmer Cafe Owner

Les rôles mineurs sont représentés cette fois-ci par des portraits du visage sous forme de photographies :

- Charlie Murray Charlie Chase
Detective Detective
- Chester Conklin Ford Sterling
- Society guest Society guest

Enfin retour à des images animées de flics avec ces indications :

– Keystone cops... including Slim Summerville. Hank Mann. Eddy SutherLand.

Suit un carton de commentaire qui embraye le récit. Il émane d’un énonciateur qui s’apparente au narrateur extradiégétique omniscient : le foyer de l’énonciation pourrait être dans ce cas celui de la caméra du réalisateur. Aucun personnage, par la suite, ne prendra en charge cette narration. Il s’adresse à un destinataire qui n’est autre que le spectateur qui, par ce biais accepte le pacte de lecture d’un film fictionnel d’aventure.

Ce premier carton comprend des informations temporelles : “Time :1913et à la fois spatiales et psychologiques : "A city slicker comes to the country looking for an easy living”

Cette architecture de début de film est exceptionnelle chez Chaplin mais témoigne, dès 1914, d’un souci d’éclairer au maximum pour le spectateur les données initiales de la diégèse. Ceci peut s’expliquer par le fait que ce film est le premier des longs métrages (six bobines) et que, par son titre, il s’apparente au roman sentimental traité sur le mode burlesque. Le générique et le premier carton mettent ainsi en place la situation romanesque.