A - Evolution de la production de Sonates pour violoncelle seul au cours du siècle

Dans une démarche identique à celle du chapitre précédent, nous avons établi, à partir des catalogues de MARKEVITCH et HOMUTH, c’est-à-dire toujours en nous appuyant sur l’ensemble du répertoire, une liste chronologique des Sonates pour violoncelle seul au XXème siècle (Cf. Annexe n°7) qui nous donne un aperçu de l’évolution de la production dans ce domaine.

Comme pour les Suites, on remarque une progression sans cesse croissante du nombre de Sonates composées depuis le début du siècle jusque dans les années 70, à l’exception d’un ‘’creux’’ pour les années 1930 (cinq sonates répertoriées, alors que la décennie précédente en comptait déjà douze). C’est dans les années 60 que l’éclosion devient vraiment tout à fait significative (51 sonates), avec un accroissement encore important dans les années 70 (71 sonates), alors que les années 80 semblent amorcer une régression du genre (68 sonates). Et, là encore, si la dernière décennie ne compte plus qu’un très petit nombre d’œuvres dans notre liste, il faut bien sûr surtout l’expliquer par le manque de recul et le fait que toutes les œuvres n’ont pas été encore répertoriées. 134 Environ 280 Sonates au total ont donc été composées au cours de ce siècle, ce qui représente un nombre tout à fait impressionnant, et encore largement plus élevé que celui des Suites (180).

C'est à l'Anglais Sir Donald Francis TOVEY que l'on doit la première œuvre de ce type au tout début du XXème siècle, la Sonate en RE M. Op.30, publiée en 1913. Et là encore, il faut souligner que, même si la dédicace officielle est pour Percy SUCH, l'œuvre a de toute évidence été suscitée par CASALS dont TOVEY était un ami intime. Cette Sonate, en trois mouvements (Allegro con brio ma largamente, de forme sonate, suivi d'un scherzo, Allegretto, un poco agitato, ma sempre piano, et un Finale en forme de passacaille), présente une grande rigueur formelle, mais révèle deux défauts majeurs soulignés par KINNEY 135 et qui font qu'elle n'a pas pris place dans le répertoire des violoncellistes de notre temps : elle reste trop étroitement liée à ses modèles brahmsiens (par de nombreuses réminiscences thématiques, par sa structure et par le caractère de ses différents mouvements) pour permettre au compositeur de développer un style personnel ; d’autre part, elle n'est pas véritablement bien pensée en fonction du medium instrumental et sonne plutôt comme une œuvre pour orchestre, d'où une difficulté excessive quant à son exécution.

C'est donc en réalité à la Sonate op.8 (1915) de KODALY que revient véritablement le rôle d’impulsion initiale, car elle inaugure de nouvelles voies qui seront largement exploitées tout au long du siècle par les compositeurs écrivant pour le violoncelle seul.

Notes
134.

Rappelons que le catalogue le plus récent, celui de Donald HOMUTH, op. cit., a été terminé en décembre 1993.

135.

KINNEY, op. cit., p.428-429.