L'antéposition de l'adjectif et du participe passé

La mise en valeur des adjectifs est un trait des plus significatifs. En effet, la place habituelle de l'adjectif qualificatif en italien, si aucune intention stylistique particulière ne le justifie, se situe après le substantif auquel il se refère. Car, ainsi que l'affirme L.Serianni258, «lorsqu'un adjectif qualificatif précède un substantif, il indique d'habitude une plus grande subjectivité de la part du locuteur, une emphase émotionnelle particulière ou le souci d'une recherche stylistique». Toutefois, dans les jugements examinés, nous notons une tendance à utiliser l'adjectif qualificatif préalablement au substantif auquel il se réfère sans aucune raison stylistique apparente. Citons quelques exemples :

‘per concorde affermazione delle parti; all'odierno convenuto259; nella rispettiva percentuale del 70 % e 30%; su tali dati non vi è sostanziale contrasto; ai fini di una corretta determinazione; suscettibile di autonoma valutazione ai fini del risarcimento; il preciso ammontare; applicabile anche nella soggetta materia260; nella peculiare fattispecie ; al generale principio della ineseguibilità ; della reciproca soccombenza; la provvisoria esecuzione; sulle conclusive richieste261.’

Les exemples sont nombreux et il semble inutile de les répertorier tous, d'autant que le participe passé utilisé comme adjectif est soumis au même «traitement». Citons ainsi :

‘per consolidato principio giurispudenziale ; in ordine alla spiegata domanda riconvenzionale ; il connesso risarcimento dei danni262; delle specificate inadempienze ; in ordine alla asserita sussistenza dei vizi ; a mezzo della circostanziata deposizione263.’

Ce trait, extrêmement fréquent dans tous les jugements, trouve une explication plausible : le souci de précision qui caractérise les langages spécialisés. Ainsi, le rédacteur, pour éviter toute ambiguïté sur le substantif qu'il veut qualifier, le fait précéder de l'adjectif. Cette tendance est, du reste, si courante dans le langage juridique que certaines formules sont désormais des stéréotypes. Citons, à titre d'exemple : tentato omicidio, tentato furto, tentata violenza, tentata rapina, legittima difesa, nuda proprietà.

On peut donc avancer l'hypothèse qu'à l'instar de ces modèles que l'usage a transformés en termes, les rédacteurs des jugements se conforment à ce qui est devenu tradition. En outre, l'inversion de l'ordre habituel augmente la valeur sémantique du mot sur lequel on attire ainsi l'attention.P.Scavée et P.Intravaia264 considèrent l'antéposition de l'adjectif comme une marque du style soutenu. Selon eux, le fait de rompre l'agencement naturel des éléments, confère une certaine solennité à la phrase. Est-ce vrai dans nos exemples ? Le juge, dans sa rédaction, opte pour un style soutenu, mais nous estimons que la nécessité d'une formulation précise et non-ambiguë est prévaut sur la recherche d'une formulation solennelle. Il nous est impossible d'indiquer avec plus de précision les critères à la base de ce choix. Nous constatons également ce trait dans tous les contrats. Citons tout d'abord quelques exemples tirés des contrats notariés :

relativa documentazione, successiva assegnazione, attuale consistenza, ulteriori opere265 , concorde rinunzia, la piena ed esclusiva proprietà, la legittima proprietà, la libera disponibilità, semplice molestia, materiale disponibilità, successive proroghe o modificazioni266.’

Dans les contrats sous seing privé :

successive modificazioni, eventuali e successive modificazioni, ulteriori disposizioni, ogni opportuno periodo, eventuali violazioni dei diritti, al contestuale pagamento, completa e regolare esecuzione, ad esclusivo carico, eventuali collaboratori, i necessari adeguamenti fiscali, equa determinazione, immediata e completa comunicazione267.’

Quant à l'antéposition du participe passé, on trouve :

i citati prodotti, allegato listino (trois occurrences)citata zona (deux occurrences) i sopra individuati Clienti Direzionali, dello stipulato contratto268.’

Dans les contrats notariés :

‘i predetti comparenti, costituiti acquirenti, il suddetto importo269; determinazione, immediata e completa comunicazione270.’

L'analyse de ces occurrences permet d'étayer notre hypothèse. L'antéposition de l'adjectif ou du participe passé est fréquente chaque fois que le syntagme nominal est suivi de spécifications ultérieures. Dans ce cas, le rédacteur opte pour l'antéposition pour permettre au lecteur de saisir d'émblée le substantif concerné. Citons quelques exemples dans le contexte :

‘I predetti comparenti della cui identità personale e capacità giuridica, io segretario rogante sono271 (…); dichiara che non sono state eseguite ulteriori opere tali da richiedere concessioni o autorizzazioni a(…)272, la parte acquirente viene immessa da oggi nel possesso e nella materiale disponibilità dell'immobile in oggetto con ogni (…)273; nonché ad attenersi alle ulteriori disposizioni della preponente per quanto (…)274

En conclusion, il s'avère que c'est la précision qui prime en dépit des usages du langage courant. La clarté a son prix.

Notes
258.

L.Serianni, Grammatica italiana, Turin, 1991, p.200 : «Quando un aggettivo qualificativo precede il nome, esso indica di solito una maggiore soggettività di giudizio in chi parla o scrive, una particolare enfasi emotiva o ricercatezza stilistica..»

259.

Sentenza 5/1/1991.

260.

Sentenza 7/5/1991.

261.

Sentenza 5/5/1992.

262.

Sentenza 7/6/1991.

263.

Sentenza 31/3/1992.

264.

P.Scavée, P.Intravaia, op.cit., 1979, p. 167.

265.

Les quatre occurrences : Compravendita 14/11/1994.

266.

Les huit occurrences : Compravendita 30/10/1990.

267.

Toutes les occurrences : Mandato di agenzia..

268.

Toutes les occurrences : Mandato di agenzia.

269.

Compravendita 27/2/1999.

270.

Toutes les occurrences : Mandato di agenzia.

271.

Compravendita 27/2/1999.

272.

Compravendita 14/11/1994.

273.

Compravendita 30/10/1990.

274.

Mandato di Agenzia.