Emetteur et destinataire

L'émetteur du texte législatif est certes le législateur, en tant qu'auteur de la norme juridique, mais il est évident qu'il faut prendre en compte le contexte socioculturel d'une communauté qui se donne des règles, qui organise sa vie en tant que société.

Il va de soi que les intentions et la volonté de l'émetteur du texte normatif doivent, elles aussi, se rapporter à ce contexte. Dans ce corpus, constitué exclusivement de lois, de décrets-lois et d'arrêtés ministériels, ce sont le Parlement et le Gouvernement qui sont concernés. Le statut social de ces institutions et leur fonction principale (régler la vie commune) donnent au texte législatif son caractère normatif.

Le Parlement, le Gouvernement ou le ministre, selon le cas, en tant qu'émetteurs des textes législatifs, sont nommés immédiatement après le titre de la loi, par l'intermédiaire de formules d'encadrement. Elles annoncent les normes et mentionnent l'activité de promulgation exercée par le Président de la République. Il s'agit de formules fixes et obligatoires, présentes au début et à la fin du texte législatif. Ainsi, au début, après le titre de la loi, la formule habituelle est la suivante :

‘La Camera dei Deputati ed il Senato della Repubblica hanno approvato. ’

La formule de conclusion est presque toujours :

‘È fatto obbligo a chiunque spetti di osservarla e di farla osservare come legge dello Stato.’

Ces indications donnent trois informations :

  1. l'auteur de la loi (Parlement) ;
  2. la preuve que les règles de la procédure législative ont été appliquées ; c'est suite à l'approbation du Parlement (Assemblée des députés et Sénat), que le Président promulgue la loi ;
  3. l'obligation «explicite» de considérer la loi approuvée comme loi de l'Etat et de l'appliquer en tant que telle.

Ces formules sont des marques d'autorité qui soulignent l'importance de la forme dans un texte législatif. Précisons cependant que ces formules, malgré leur caractère obligatoire, sont destinées à être négligées. En effet, elles sont données in extenso uniquement dans le Journal Officiel (la Gazzetta Ufficiale), tandis que ellles disparaissent lors de la publication dans les revues spécialisées ou dans les périodiques à destination d'un plus large public.

Par ailleurs, il est important de souligner que les formules d'encadrement et de conclusion sont modifiées quand s'il s'agit d'un décret-loi ou d'un arrêté ministériel. Le décret-loi est une forme législative très courante en Italie, à laquelle il a été fait recours dans la législation sur la présence des étrangers sur le territoire national. Il répond à une urgence. Après le titre on peut lire :

‘Il Presidente della Repubblica ;
Visti gli articoli… ;
Ritenuta la straordinaria necessità ed urgenza… ;
Vista la deliberazione del Consiglio dei Ministri,
Sulla proposta del Presidente del…
Emana il seguente decreto-legge :…’

La conclusion du décret-loi précise presque toujours :

‘Il presente decreto, munito del sigillo dello Stato, sarà inserito nella Raccolta Ufficiale degli atti normativi della Repubblica italiana. È fatto obbligo a chiunque spetti di osservarlo e di farlo rispettare.’

Lorsqu'il s'agit d'un arrêté ministériel, les formules sont différentes. Après le titre :

‘Il Ministro dell'…
Visto l'articolo…; Tenuto conto della necessità…; Considerata la necessità…;
Decreta ; ’

En conclusion, la formule d'usage est :

‘Il presente decreto sarà pubblicato nella Gazzetta Ufficiale della Repubblica Italiana.’

Ainsi, les formules d'introduction et de conclusion d'un décret-loi et d'un arrêté ministériel permettent de préciser :

Si l'on compare les formules d'encadrement et d'accompagnement d'une loi et celles d'un arrêté ministériel ou d'un décret-loi, il est aisé de repérer dans les secondes les marques de la fonction exécutive : l'indication de l'auteur de l'énoncé législatif y est plus directe et la subordination du pouvoir exécutif au pouvoir législatif est signalée dès le début. En fait, non seulement dans celles-ci l'indication de l'auteur de l'énoncé législatif est plus directe, mais aussi elles signalent dès le début, la subordination du pouvoir exécutif au pouvoir législatif.

Tout en reconnaissant la valeur juridique des éléments d'introduction et de conclusion de tout texte législatif, il y a lieu d'affirmer que leur valeur, avant tout linguistique, affirme la force de la loi. Ils soulignent le texte et s'adressent aux destinataires du message (a chiunque spetti) pour qu'ils en prennent connaissance et l'exécutent.

La situation de communication du texte législatif n'est pas aussi simple qu'il ne semble. La source législative est unique ; elle seule s'adresse à la totalité des citoyens, destinataires du texte.Sur la base de cette considération, il s'agit d'une communication entre initiés et profanes, entre le pouvoir et le citoyen. Néanmoins, le texte législatif est destiné non seulement aux profanes, mais, en premier lieu, aux autorités chargées de l'appliquer : les juges, les forces de police, les personnels des différentes administrations publiques. Ces derniers ne sont pas des profanes, mais des spécialistes du domaine. Cette multitude de destinataires, dont les compétences linguistiques et en droit sont différentes, devrait être prise en compte par le rédacteur si «nul n'est censé ignorer la loi».