Ordre des mots : clarté et solennité.

Le législateur peut, en changeant l'ordre des mots, donner une clef de sa lecture de la norme. Par ce moyen, il souligne ce qu'il considère comme fondamental dans le texte et amène l'attention du citoyen à se focaliser davantage sur les éléments qu'il «suggère» comme essentiels. Le fait de rompre l'agencement habituel des éléments de la phrase confère à la formulation une certaine solennité. L'inversion accroît la valeur sémantique du mot sur lequel est attiré l'attention.

L'analyse montre que le législateur met toujours en première position ce qu'il considère comme le plus important. Ainsi, lorsqu'il veut insister sur l'importance de l'action, il effectue une inversion de l'ordre naturel de la phrase et place le verbe en tête. Voici quelques exemples :

‘D.L. n. 286 du 25 juillet 1998, art.4 : Entrée sur le territoire national, alinéa 6) :’ ‘Non possono fare ingresso nel territorio dello Stato e sono respinti alla frontiera gli stranieri espulsi, salvo che…, gli stranieri che debbono essere espulsi e quelli segnalati… ; ’ ‘art.5 (Permis de séjour), alinéa 1 : Possono soggiornare nel territorio dello Stato gli stranieri entrati regolarmente ai sensi dell'articolo 4,che…» ; ’ ‘art.23 (Prestation de garantie pour pouvoir accéder au marché du travail), alinéa 2 : Sono ammessi a prestare le garanzie di cui al comma 1, le regioni, gli enti locali e le associazioni professionali e sindacali,…»; ’ ‘D.L. n. 470 du 26 novembre 1992, art.5-ter, alinéa 1 : Hanno diritto al soggiorno nel territorio della Repubblica gli studenti cittadini di uno Stato…»;’ ‘D.L. n. 272 du 30 avril 1992, art.6, alinéa 1 : Continua ad applicarsi l'articolo 7, alinea 1, del decreto-legge 30 dicembre 1989, n.416…’

Force est de constater que l'inversion permet au législateur de rendre le message plus clair. En effet, dans les exemples ci-dessus, elle place en première position la forme verbale, qui est l'élément le plus court, alors que le sujet est l'élément le plus long. Ce dernier est accompagné d'une série de spécifications ou d'une énumération. C'est le cas du premier exemple, où coexistent plusieurs sujets (gli stranieri espulsi/les étrangers expulsés, gli stranieri che debbono essere espulsi e quelli segnalati/les étrangers qui doivent être expulsés et ceux qui ont été signalés). Il y a ensuite toute une série de précisions qui permettent de les identifier correctement. Cette motivation «pragmatique» ne peut être étrangère à la démarche du législateur. Toutefois, dans la plupart des exemples répertoriés comme dans les cas cités, le verbe placé en tête exprime un droit ou un devoir (non possono, possono, sono ammessi, hanno il diritto), ce qui étaie notre argumentation. C'est le propre de la loi que de conférer des droits et des devoirs, et c'est cela que le législateur souligne par l'inversion.

Une inversion qui peut concerner plusieurs éléments de la phrase. C'est le moyen que le législateur italien utilise le plus fréquemment dès qu'il veut souligner un aspect de la réglementation. Les exemples sont nombreux. Ainsi :

‘D.L. n.286 du 25 juillet 1998, art.2 (Droits et devoirs de l'étranger), alinéa 1 : Allo straniero comunque presente alla frontiera o nel territorio sono riconosciuti i diritti fondamentali della persona umana previsti dalle norme di diritto interno…. ’ ‘art.2, alinéa 5 : Allo straniero è riconosciuta parità di trattamento… ;’ ‘art.2, alinéa 6 : Ai fini della comunicazione allo straniero dei provvedimenti concernenti l'ingresso, il soggiorno e l'espulsione, gli atti sono tradotti anche sinteticamente, in una lingua comprensibile al destinatario, ovvero, quando ciò non sia possibile, nelle lingue francese, inglese o spagnola, con preferenza per quella indicata dall'interessato. ’

Dans les deux premiers exemples, c'est le complément indirect qui est mis en évidence ; dans le troisième, c'est une proposition finale. Ici encore, le législateur n'hésite pas à inverser l'ordre courant pour être plus clair. Le rédacteur utilise souvent ce procédé pour indiquer, dès le début de la norme, ce qu'il veut souligner. Ainsi, dans le D.Pr. n.136 du 15 mai 1990, à l'art.2, alinéa 2, il met en évidence les modalités de la règle annoncée :

Con i criteri di cui al comma 1 il Presidente del Consiglio dei Ministri può… ;’

à l'alinéa 3, l'éventualité envisagée : Nell'ipotesi in cui siano state costituite più sezioni, è istituito (…).

C'est la règle juridique qui dicte l'ordre de la phrase ; c'est le message juridique qui est prioritaire. Le rédacteur n'hésite jamais : les exigences du droit d'abord, les exigences de la langue après.

Parallèlement, le recours à la voix active et passive se fait en fonction de l'importance accordée, soit au sujet, soit à l'objet du message. Il s'agit d'un choix qu'impose au rédacteur la nature de son texte. En outre, dans un texte législatif, ce choix est sans nul doute le moyen le plus courant d'orienter l'attention du destinataire. Nous nous limiterons à citer un seul exemple :

La commissione si pronunzia nei quindici giorni dal ricevimento della domanda. La decisione motivata è notificata per iscritto all'interessato. (D.P.R. n.136 du 15 mai 1990, art.3, alinéa 3) ’

Dans la première partie de la phrase, le législateur qui souhaite souligner le rôle du sujet, utilise la voix active. Dans la deuxième partie, l'usage de la forme passive permet de mettre en relief l'objet de l'action. A d'autres moments, si le sujet-agent n'est pas exprimé, la voix passive permet au rédacteur de s'effacer devant le message, comme nous l'avons vu lors de l'analyse des traits syntaxiques.