«Motivi della decisione»

L'introduction achevée, l'énoncé des motifs se poursuit. Dans cette partie séparée graphiquement des autres par le titre Motivi della decisione (les motifs), le juge donne la réponse aux questions soulevées et la justifie en s'appuyant sur les faits exposés et sur le droit. L'énoncé du juge est démonstratif et persuasif. Le rédacteur répond ainsi aux questions et montre que son interprétation des faits et des règles applicables à la situation spécifiée est cohérente. Ici, le juge illustre son raisonnement logique et veut convaincre de la justesse de son argumentation.

La motivation de la décision prise ne s'adresse à personne en particulier ; l'évaluation de la situation est faite au nom de l'institution, sa valeur est censée être universelle. Le discours est donc imprégné de la certitude d'avoir correctement évalué les faits et d'avoir interprété les règles concernées.

Ainsi, il est aisé de repérer les marques linguistiques de la certitude, celles qui laissent apparaître les intentions du juge à ce propos. Celles-ci sont évidentes dans le choix des verbes utilisés, en effet il s'agit soit de formes verbales exprimant la certitude de la connaissance (deve ammettersi, appare evidente, è noto, non sussiste alcun dubbio, deve ritenersi incontestabile…) soit d'adjectifs ou d'adverbes assertifs forts (riscontro obiettivo, argomenti decisivi, palesemente inconcludenti, esattamente, invero, esplicitamente). Citons un passage des motifs de la sentenza 5/11/1991 pour constater en situation cette remarque. Il s'agit d'un jugement pour un litige portant sur le versement d'un dédommagement. Dans l'exposé des motifs, le juge se réfère aux différents aspects de l'affaire à juger soulignant chaque fois qu'il s'agit d'éléments absolument certains. Ainsi :

‘Costituisce circostanza non controversache l'auto del Lacerenza venne sottratta da ignoti mentre trovavasi depositata nel (…).
Dovendosi, dunque, ritenere pacificoper concorde affermazione delle stesse parti, che l'auto venne rubata nella officina del predetto Gaudino, (…).
Va in proposito puntualizzato che l'affidamento al convenuto della vettura non avvenne in virtù di contratto di deposito, bensì strumentalmente, per consentirgli di eseguire le riparazioni occorrenti nella sua officina meccanica all'uopo attrezzata : in altri termini tra le parti intervenne un contratto d'opera - fatto questo del pari pacifico- che comportò necessariamente (…).
Esattamentesi rileva dalla difesa del convenuto che in virtù di tale rapporto giuridico l'obbligazione principale del proprio assistito non era quella di custodire il mezzo, bensì (…).’

La structure logique la plus fréquemment repérée est de type déductif dans la partie où le juge motive sa décision en droit, et de type inductif, dans la partie où il la motive en fait376. Ainsi, le juge présente généralement les arguments justificatifs pour chaque aspect du différend qui a été tranché : le discours explicatif montre le bien-fondé de l'argumentation que rend la décision finale la seule conséquence logique possible. Il est aisé de constater ces marques linguistiques à travers le repérage de conjonctions telles que pertanto, quindi, conseguentemente, in conseguenza, qui permettent au magistrat de montrer sa démarche déductive. Citons un exemple en contexte pour la clarté de l'exposition (Sentenza 27/11/1990) :

‘Sembra indubbio che l'azione esercitata dalla RAS sia la stessa che il danneggiato, ove non fosse stato risarcito a norma e nei limiti previsti dall'art.19 della legge n.990, avrebbe potuto esercitare nei confronti del danneggiante responsabile dell'incidente, assoggettata alla prescrizione biennale ex. art.2947 C. C., che nella specie, ai sensi dell'ultimo comma, è iniziata a decorrere dal 9. 4. 1980, data in cui, come emerge dalla documentazione prodotta dalla stessa istante, è divenuta irrevocabile la sentenza di proscioglimento del Chiodi dal reato di lesioni colpose, emessa dal Pretore di Foggia il 31 marzo precedente, per mancanza di querela. Pertanto , non risultando alcun atto interruttivo, l'azione era già prescritta quando è stata notificata la domanda. ’

Dans ce cas, le juge donne l'argumentation en droit qui justifie la prescription de l'action en justice : ove non fosse stato risarcito a norma e nei limiti previsti dall'art…. Il applique les termes de la loi au cas particulier. Ainsi, par déduction (pertanto), il justifie la décision annoncée au début (l'eccezione di prescrizione sembra fondata). Ce type de conjonctions jalonne le discours et rend manifeste le raisonnement logique du rédacteur.

Le raisonnement déductif est également révélé par la présence de formes verbales qui expriment la déduction telles que conseguire, derivare, desumere…formulations propres au discours déductif.Dans les arrêts de la Cour de Cassation et du Conseil d'Etat, le développement du raisonnement du rédacteur apparaît plutôt par la présence de formules adverbiales telles que considerando, visto che, dato che. Ces formules constituent de véritables marques du discours de ces juridictions.

D'autres «outils» permettent de suivre l'évolution du raisonnement, ce sont les locutions prépositives restrictives comme quanto a ; les conjonctions telles que in ordine a ; les prépositions telles que su, per. Ces outils, placés au début d'un développement désignent le moyen choisi ou le point précis que la juridiction examine. Citons quelques exemples dans un contexte précis :

Quanto all'azione risarcitoria per la morte di C. Q., l'eccezione di prescrizione è palesemente infondata (…) (Sentenza 19/3/91) ;
Per ipostumi invalidanti il danno può calcolarsi in base alle note formule di capitalizzazione, tenuto conto dei coefficienti relativi all'età (…) (Sentenza 19/3/91) ;
In ordine ai danni patiti dagli eredi della Q., va precisato che (…) (Sentenza 19/3/91).’

La présence de ces outils est essentielle pour le rédacteur, elle l'est plus encore pour le non-spécialiste. La longueur des phrasesdans la motivation étant très importante, les instruments de liaison377 du texte permettent de s'orienter dans le discours du juge et de mieux comprendre. Ce sont des points de repère pour suivre les développements du discours En effet, la plupart des phrases sont formées de plusieurs subordonnées pour montrer «pleinement» le raisonnement. Cet aspect de la prose juridique sera examiné dans la partie stylistique, il est mentionné ici pour mettre en évidence la nécessité de la présence de ces outils.

Si le rédacteur veut expliquer, l'essentiel reste de convaincre du bien-fondé du raisonnement. Cette volonté de persuader est rendue manifeste par l'usage de connecteurs comme certo, è vero. Dans des énoncés de type explicatif, ils indiquent clairement la volonté de convaincre378. Citons à titre d'exemple un passage de la motivazione dela sentenza 27/11/1990. Il s'agit d'un litige entre une société d'assurance et un assuré.

È vero che l'art.29, riconosce l'azione di regresso nel comma 1, per quanto riflette il diritto dell'Impresa designata, ad agire nei confronti del responsabile del sinistro per il recupero dell'indennizzo pagato e delle relative spese ;mentre nel comma 2 (…). Questa distinzione, tuttavia non può autorizzare l'interprete a ritenere che il legislatore abbia inteso. riconoscere ed attribuire natura autonoma all'azione di regresso.’

En acceptant de prendre en compte les arguments avancés par l'une des parties, le rédacteur réserve à l'autre partie la possibilité d’en discuter. Il commence donc à argumenter utilisant des formulations de liaison comme è vero, è certo, è notorio.

Une fois l'explicitation terminée, les justifications avancées lui servent pour souligner sa propre thèse. C'est ainsi qu'il annonce la vérité à laquelle il aboutit, par des conjonctions telles que ma, tuttavia, ciononostante. L'effet de persuasion recherché est atteint.

La jurisprudence est l'élément déterminant pour persuader et pour accentuer la légitimité de la décision prise ; le juge s'appuie sur l'autorité du fait jugé. Cette pratique, très courante dans les jugements italiens, a été constatée dans le corpus. A titre d'exemple, citons un passage de la sentenza du 19/3/1991 où le rédacteur souligne le rôle joué par l'assurance au cas où l'assuré serait responsable d'un délit. Dans ce cas précis, il se réfère à deux arrêts de la Cour de Cassation :

‘Si è consolidato il principio (per tutte cfr. Cass. 29. 7. 1983 n.5218 ; Cass. 13. 1. 1987 n.151) che nella disciplina dell'assicurazione obbligatoria della responsabilità civile derivante dalla circolazione dei veicoli a motore, l'assicuratore, essendo inserito nel rapporto risarcitorio derivante dall'illecito di cui è responsabile l'assicurato (…). ’

L'exposé des motifs est donc la partie la plus complexe du jugement, c'est ici que le juge montre la connaissance de l'affaire à juger et qu'il affirme sa capacité d'interprétation selon la règle. L'interprétation en fait et en droit amène la coexistence de deux discours : le juge interprète le fait, en appliquant le droit. En un premier temps, il considère et vérifie les preuves que les parties ont fournies, il a alors recours au vocabulaire qui concerne la preuve juridique et parle de : prove orali, interrogatorio formale, prova testimoniale, istruzione probatoria, onere della prova. 379Quant à l'usage des temps, le rédacteur utilise généralement à la fois le présent de l'indicatif et la forme passive, car il évalue les faits au moment où il tranche. Ce faisant, le rédacteur s'efface presque toujours devant la justice. Il est l'interprète, mais non le personnage principal.

Pour parler droit, le discours se veut logique. C'est la partie analytique qui se retrouve dans toutes les législations, et dans toutes les langues.

Notes
376.

Cf. M.Taruffo, op.cit., 1988, p.196.

377.

Segnali discorsivi est le dénomination utilisée par K.Lichem, «Connettivi e demarcativi. Aspetti diacronici preliminari» in : L.Agostiniani, P.Bellucci Maffei, M.Paoli, Linguistica storica e cambiamento linguistico, Rome, 1985, pp.211-223. Ces éléments remplissent essentiellement deux fonctions : 1) marquer le discours (signes d'ouverture ou de clôture au début ou à la fin d'un texte ou d'une partie d'un texte) ; 2) unir et articuler les différentes parties d'un texte.

378.

Cf. F.Cabasino, «Analisi del linguaggio giuridico : prospettive di ricerca» in: I.Gutia (dir.), Atti del convegno - Lingue straniere per scopi speciali, Rome, 1987, pp.137-145.

379.

Ces exemples : Sentenza 7/6/1991.