Usage des temps

Quant à l'usage des temps le rédacteur des contrats, à l'instar du législateur, utilise surtout le présent de l'indicatif. Le contrat notarié est rédigé à un moment précis et il établit des droits et des devoirs pour les parties à compter de la date indiquée.

Les autres formes verbales utilisées sont le participe présent, le participe passé et le gérondif, qui correspondent aux besoins de concision du notaire. L'usage de ces formes verbales permet au rédacteur de «condenser» l'information sans porter préjudice à la précision. Citons quelques exemples dans le contexte :

‘1. I Signori (…) vendono alla Signora (…) che accetta ed acquista la piena ed esclusiva proprietà del seguente immobile : - casa per abitazione in Castellaneta in Via (…) al piano terra composta di vani tre ed accessori confinante con piazza Federico De Martino, detta via e proprietà eredi Giandomenico.437
2. Il prezzo è stato determinato in lire (…), tale somma è stata già pagata dalla parte acquirente alla parte venditrice che ne rilascia quietanza di saldo, dichiarando di non avere altro a pretendere e rinunciando all'ipoteca legale438.
La parte acquirente subentra da oggi in tutti i diritti, ragioni, ed azioni relativi a tale immobile e già spettanti alla parte venditrice in virtù di successione testamentaria di X Y apertasi in (…) il (…) e legittima di AZ, apertasi in Taranto il 10 marzo 1994439.’

Dans les exemples indiqués ci-dessus, les participes passés sont le résultat de la «réduction» de quatre relatives passives : che è composta, che è detta, che è stata aperta (…) che è stata aperta (…). Il en est de même pour le participe présent, qui est utilisé en lieu et place d'une relative : che confina. Quant à l'usage du gérondif, il permet au rédacteur de ne pas avoir recours à deux coordonnées explicites : e dichiara (…) e rinuncia (…). Par ailleurs, précisons que si le recours à ces formes syntaxiques permet «d'alléger» la phrase, la structure syntaxique devenant implicite nécessite un effort supplémentaire de décodification de la part du destinataire. Ce dernier doit en effet expliciter tous les liens syntaxiques pour comprendre le message. Toutefois, en dépit des éventuelles difficultés du destinataire, le recours à l'usage du participe présent, du participe passé et du gérondif est extrêmement fréquent.

En outre, l'analyse des textes notariés montre des phrases extrêmement longues et riches en incises. Est-ce un trait stylistique du rédacteur qui a rédigé l'acte ? Sûrement pas, car il suffit d'analyser la partie initiale de tout contrat notarié pour constater cette caractéristique. Citons :

‘Dinanzi a me Avvocato L.M., Notaio iscritto presso il Collegio Notarile Distrettuale di Taranto, con sede in Taranto, e senza l'assistenza dei testimoni a cui le parti aventi i requisiti di legge, d'accordo fra loro e con il mio consenso preventivamente rinunziano sono presenti i signori (…).’

La phrase ne compte que 48 mots, et sa longueur n'est imputable qu'à la nécessité pour le rédacteur d'énumérer440 toutes les précisions concernant le notaire et les modalités d'accomplissement de la vente pour que l'acte soit valable. Ce n'est donc pas un trait imputable au style personnel d'un rédacteur, mais à la nature même du langage contractuel, qui exige le maximum de précision. Il ne faut pas laisser de zones d'ombre, ni de lacunes d'informations. Chaque élément nouveau est spécifié de façon à être identifié sans aucune erreur.

Les exemples sont nombreux, il convient d'en citer quelques autres pour montrer comment l'exigence de préciser autant que possible chaque élément engendre la longueur des phrases. Citons :

‘Dichiara e garantisce la parte venditrice che quanto venduto è di sua assoluta proprietà e disponibilità, libero da pesi, vincoli, ipoteche, trascrizioni pregiudizievoli e diritti di terzi in genere e come tale lo trasferisce da oggi, immettendo la parte acquirente nel giuridico e materiale possesso, con ogni accessorio, accessione, dipendenza, pertinenza, servitù attive e passive se e come esistenti legalmente costituite, quote comuni e diritti condominiali come per legge e nelle proporzioni di legge, nulla escluso e riservato.441

Dans cet exemple, c'est l'exigence d'exactitude qui amène le rédacteur à énumérer les caractéristiques de la propriété du vendeur (di sua assoluta proprietà e disponibilità, libero da pesi, vincoli, ipoteche, trascrizioni pregiudizievoli e diritti di terzi in genere). Ce n'est qu'après ces précisions, qui caractérisent le droit de possession du vendeur, qu'est formulé le transfert du bien à l'acheteur (e come tale lo trasferisce), après quoi le rédacteur indique la date de cette transmission (da oggi). Dans ce cas également, il détaille encore une fois le bien immobilier devenu propriété de l'acheteur (con ogni accessorio, accessione, dipendenza, pertinenza, servitu' attive e passive se e come esistenti legalmente costituite, quote comuni e diritti condominiali come per legge e nelle proporzioni di legge, nulla escluso e riservato). Toutes ces informations sont données dans une seule phrase où il n'y a qu'une proposition principale (dichiara e garantisce), une coordonnée de la principale (e come tale lo trasferisce) et une série de subordonnées de la coordonnée à la principale ! Notamment : une subordonnée de la coordonnée (immettendo) ayant valeur modale, une restrictive implicite subordonnée (se e come esistenti), une subordonnée relative implicite (legalemente costituite) et un participe passé ayant valeur d'ablatif absolu (nulla escluso o riservato).

C'est un fait : l'exigence de précision amène le rédacteur à construire des phrases très longues et complexes, qui rendent la rédaction très dense. Celles-ci exigent de la part du lecteur plusieurs relectures afin de déchiffrer les liens logiques exprimés par les subordonnées implicites. Le rédacteur a recours au participe présent, au participe passé, au gérondif pour pouvoir détailler autant que possible les biens ou les personnes concernés. La fréquence d'usage de ces formes verbales est l'une des marques distinctives du contrat.

Notes
437.

Compravendita 30/10/1990.

438.

Compravendita 30/10/1990.

439.

Compravendita 27/11/1998.

440.

Cf. J.C.Gémar, op.cit., tome 1, 1995, p.113.

441.

Compravendita 27/11/1998.