Dans l'univers de la tragi-comédie pastorale , l'accent est mis en général sur le thème de la pureté et de l'intégrité comme conditions préalables au bonheur du couple et par extension à l'harmonie sociale, comme nous l’avons déjà souligné lors de notre exploration du Pastor Fido de G. Guarini . Mais la Bohême de The Winter's Tale n'est pas présentée comme un Eden pastoral. Le déroulement de la fête est ponctué de moments déstabilisateurs qui risquent à tout instant de semer la discorde et d'interrompre la fête 607 . L'amour chaste, autrefois bafoué par Leontes, ne fait pas l'objet des afféteries d'Arcadie . Il est à la fois conté d'une manière grossière par Autolycus et d'une manière poétique lorsqu'il est associé aux rites saisonniers. Perdita est en effet chargée de la distribution des fleurs emblématiques dont les correspondances secrètes avec les âges de la vie, le cycle des saisons, la vitalité de l'amour ou la langueur des insatisfactions, la jeunesse et l'amour, la vieillesse et l'hiver, le printemps et l'espoir, la naissance et la mort sont évoquées avec la grâce héritée de sa mère, Hermione. Autolycus, cynique et drôle, révèle des correspondances plus réalistes et grivoises dans les fleurs emblématiques et dans les rites saisonniers qu'il interprète selon sa propre conception. Il a appris son art à la ville, parmi les courtisans et les cony-catchers . Son rôle rappelle celui du personnage-Vice et celui de Corisca, agent de la felix culpa qui noue et dénoue les fils des intrigues de la tragi-comédie de G. Guarini.
Perdita est le rayonnant symbole du monde pastoral. Sa beauté, son innocence, sa générosité inspirent l'admiration de tout son entourage, sauf celle du prédateur Autolycus . Lorsqu'il entre en scène en chantant le sacre du printemps (4. 3. 1) il pourrait être pris pour le pendant de Perdita qui, habillée comme Flore (4. 4. 3) distribue des fleurs avec une vigueur printanière. Cependant les différences entre ces deux personnages sont très marquées. Perdita se méfie des chansons d'Autolycus avant même de le rencontrer et avertit son serviteur qu'elle ne voudrait point entendre de "saletés". Autolycus n'est pas un admirateur de ses charmes, s'y référant comme le boulet ("clog") sur les talons de Florizel (4. 4. 661). Perdita s'entoure de choses naturelles comme les fleurs alors qu'Autolycus est colporteur d'articles façonnés. Perdita déteste la peinture, dans le jardin comme dans le boudoir, et pendant l'échange qu'elle entretient avec Polixenes sur l'art et la nature dans le domaine de l'horticulture, elle révèle sa préférence pour la nature non contaminée par l'art :
‘PERDITAAutolycus vend des babioles qui artificiellement mettent en lumière la beauté féminine ou masquent la laideur de la maladie :
‘Masks for faces and for noses,Laroque, Shakespeare et la fête, p. 237. "Ces scènes ne marquent en effet pas seulement une opposition par rapport à la tonalité générale des trois premiers actes, mais elles rappellent constamment en contrepoint une sourde menace, à savoir que l'élément tragique peut à tout instant réapparaître […]".