5.5. La comparaison des différents types de verbes composés

5.5.1. Les observations

En comparant les différents groupes des verbes composés, du point de vue du comportement syntaxique du substantif par rapport au verbe, nous pouvons dégager les points suivants:

  1. 1. Allant du premier groupe (objet générique-verbe) aux deux derniers groupes (qui, rappelons-le, ont les mêmes propriétés syntaxiques), l'aptitude du substantif à occuper la position objet diminue, alors qu'en même temps sa cohésion avec le verbe augmente, de sorte que le dernier groupe ne contient que les substantifs entièrement satellisés par le verbe, n'ayant pas d'existence en dehors du composé.
  2. 2. Les verbes composés du premier groupe n'admettent pas de constituant nominal en fonction d'objet. Un grand nombre des verbes du deuxième groupe montre également le même comportement, tandis que certains verbes du deuxième groupe (par exemple javâb dâdan) ainsi que les verbes des deux autres groupes peuvent accepter un constituant nominal en fonction d'objet. Ce fait peut nous amener à considérer le lien substantif-verbe suffisamment fort pour que l'ensemble fonctionne comme le prédicat de la phrase.
  3. 3. Aucun des groupes ne présente une cohésion absolue entre les deux membres du composé: la composition persane n'est pas morphologique, ce qui veut dire qu'il n'y a ni intégration physique du substantif au verbe ni de marque morphologique ouverte qui permettrait de reconnaître un verbe composé.
  4. 4. Compte tenu des résultats des opérations syntaxiques faites sur les quelques verbes choisis à titre d'exemple, nous sommes amenée à faire une distinction terminologique entre deux types de composition: la composition objet-verbe d'une part et la composition substantif-verbe d'autre part. En fait nous avons vu qu'un substantif comme zin n'a aucune des propriétés habituelles d'un terme en fonction d'objet du persan. De ce fait, quand nous parlons de sa relation avec le verbe auquel il est étroitement lié, nous ne pouvons pas employer le terme objet-verbe, il n'est jamais l'objet de la phrase. Par contre, à propos d'un substantif comme javâb (ainsi que kâr, harf, fekr, etc.) nous pouvons employer le terme de "composition objet-verbe", un terme qui décrit les cas où la relation entre le substantif et le verbe est telle que le substantif en question peut, dans certaines constructions, fonctionner lui-même comme l'objet du verbe.
  5. 5. Du point de vue sémantique, la relation entre le substantif et le verbe change aussi. En effet tous les verbes dits composés présentent une unité sémantique. En d'autres termes, les deux éléments, le substantif et le verbe, forment une seule unité sémantique. En ce qui concerne les verbes accompagnés de leur objet générique, lorsque ce dernier est un objet interne, la relation sémantique des deux éléments change par rapport au schéma habituel des verbes composé: la relation entre le substantif et le verbe est, sémantiquement, redondante; le substantif et le verbe gardent leurs sens respectifs, et il s'agit du même domaine sémantique.

En somme, nous pouvons constater qu'allant du premier au dernier groupe, le caractère indépendant du substantif diminue, alors que le composé devient de plus en plus apte à fonctionner comme le prédicat de la phrase.