2.2.1 Introuvable documentation

Nous avons vu que le chanoine de Lacger avait depuis longtemps l'intention d'écrire une biographie de Mgr Mignot. Les Mémoires le prennent de court et il semble avoir décidé assez vite de s'orienter vers la rédaction d'un article. Mais l'enjeu est de taille. D'une part, il lui faut dans toute la mesure du possible opposer à Loisy des documents équivalents à ceux utilisés dans les Mémoires, c'est-à-dire des documents privés. Il cherche donc tous les moyens possibles d'étendre sa documentation. D'autre part, il faut être certain de développer la bonne argumentation et donc de cerner avec précision le problème soulevé par la publication des Mémoires. Il s'entoure pour cela des conseils d'hommes en qui il a confiance.

En ce qui concerne la documentation, il interroge à nouveau le chanoine Ch. Urbain sur les papiers Lacroix. Celui-ci lui apprend qu'ils ont été versés à la Bibliothèque Nationale et qu'ils ne seront pas consultables durant trente ans. Il suggère de s'adresser à Léon Chaine ⁹⁷ . Ce que fait l'abbé de Lacger. Léon Chaine lui répond :

‘J'ai en effet quelques papiers et une nombreuse correspondance du regretté Mgr Lacroix, mais je n'ai rien touchant Mgr Mignot pour lequel l'ancien Évêque de Tarentaise avait la plus respectueuse sympathie et une bien vive admiration. [...] J'ai le regret de ne pouvoir vous aider dans l'œuvre que vous entreprenez pour la glorification du grand archevêque que vous aviez et pour la défense des idées qui lui étaient chères ⁹⁸ . ’

L'abbé de Lacger se tourne surtout vers le chanoine Augustin Fabre, ancien professeur d'Écriture sainte au séminaire d'Albi, économe du séminaire de l'Institut catholique de Toulouse, personnage important, car il a la garde des papiers laissés par l'archevêque. L'abbé de Lacger revient plusieurs fois à la charge pour tenter de convaincre le chanoine de lui communiquer les documents dont il a besoin pour "expliquer pourquoi un prélat croyant de l'Église catholique a pris la défense d'un hérétique". L'accès aux papiers de Mgr Mignot est indispensable, car parmi les documents que le chanoine conserve, il y en a peut-être de capitaux. "Voyez ce que vous pouvez me communiquer, demande-t-il en juin" ⁹⁹ . Il revient à la charge en décembre : "Je fais une nouvelle instance auprès de vous [...] pour chercher ce que l'abbé Rivière croit exister ¹⁰⁰ [...] Faites donc un effort cher ami. Trouvez-moi quelque chose ou bien dites-moi que vous n'avez rien" ¹⁰¹ . L'abbé Rivière lui-même intervient : "Je ne saurais assez vous dire combien je regretterais que vous ne mettiez pas vos papiers à la disposition de M. de Lacger, si et dans la mesure où ils peuvent servir sa cause (celle de Mgr Mignot). Je ne parviens pas à me persuader qu'il puisse vous être indifférent de le voir exploité et compromis comme il l'est par Loisy" ¹⁰² . Rien n'y fait. Le chanoine Fabre n'enverra que quelques copies de documents concernant l'attitude de Mgr Mignot à l'égard du Sillon.

Le chanoine de Lacger se tourne même vers Loisy pour avoir copie d'une lettre de Mgr Mignot, celle du 19 juillet 1917. "Vous dites, écrit-il à Loisy, que c'est peut-être la plus belle et la plus touchante, la plus confiante qu'il vous ait écrite. [...] Je viens vous demander si vous estimeriez opportun de me faire tenir une transcription de la lettre en question avec la permission de la publier " ¹⁰³ . Loisy transmet la copie et accorde l'autorisation demandée.