1. L'enfance reconstruite (1842-1860) : De l'école paternelle à Saint-Sulpice

1.1 Brancourt-en-Vermandois

Eudoxe Mignot est né le 20 septembre 1842 à Brancourt-le-Grand, gros bourg rural de 1700 habitants situé dans le canton de Bohain, à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Saint-Quentin, dans le département de l'Aisne. Mgr Mignot préférait dire Brancourt-en-Vermandois, en quoi il faut voir un attachement profond à ce petit pays de l'ancienne France, aux confins de la Thiérache, du Noyonnais et de l'Artois qui doit son particularisme non pas tant à la géographie qu'à l'histoire 185 .

Les paysages du Vermandois ne différent guère en effet de ceux qui caractérisent les plateaux limoneux de la Picardie. Entre les champs nus on aperçoit, généralement au sommet des ondulations, un groupe d'arbres d'où émerge un clocher. Brancourt n'échappe pas à la règle et le clocher qu'on peut voir aujourd'hui est celui de l'église que Mgr Mignot, y consacrant un legs important, a fait ériger en 1903 pour remplacer le vieil édifice de son enfance qui menaçait ruine.

Dans ce pays d'habitat groupé, les gros villages rapprochés les uns des autres restaient peuplés. Aux activités agricoles s'ajoutaient encore au milieu du XIXe siècle une industrie textile importante. Autour de Bohain les métiers Jacquard produisaient "des couvertures de coton, des plumetis, des articles dits de Lyon" 186 . Il y en avait à Brancourt et l'une des occupations préférées de l'enfant, le jeudi après-midi, était d'aller "chez les tisseurs pour (se) rendre compte du mécanisme des métiers Jacquard" 187 .

Notes
185.

Cf. A. Demangeon, La Picardie, A. Colin, Paris, 1925, pp.439-440. "Il y a une patrie encore plus chère (que la France) c'est le pays où l'on est né. […] Ces rues par lesquelles nous avons toujours passé, ces maisons, cette école, cette mairie, tout cela fait partie de notre cœur, de notre vie humaine", Allocution pour la bénédiction d'une chapelle, 28 mars 1889, ADA, 1 D 5-04.

186.

Ibid., p. 300.

187.

1 er Reg., f° 29.