2.3.2 L'inadmissible prétention de la Curie

La prétention des congrégations romaines à participer à l'Église enseignante 1881 lui est en effet de plus en plus insupportable et son anti-curialisme ne fera que se renforcer au fil du temps et il refuse de se laisser enfermer dans ce qu'il considère être un faux dilemme. Car sous le couvert de la dévotion au pape - "quel est le catholique qui n'est pas disposé à obéir au Pape ?" - on veut faire passer bien autre chose : "Ce n'est pas le Christ qu'il s'agit de restaurer, mais l'administration de la Curie […] C'est ici que l'on tombe dans l'arbitraire" 1882 . C'est pourquoi il estime qu'au lieu "d'opposer le catholicisme libéral au catholicisme, mieux vaudrait opposer celui-ci au curialisme qui caractérise mieux tout un système hostile à la science et à la vérité. Le curialisme étudié à la lumière de l'histoire est, d'après Mivart 1883 , l'ennemi le plus sérieux du catholicisme" 1884 . Quand il reçoit Ce qu'on a fait de l'Église 1885 , il écrit à Mgr Lacroix :

‘Comme vous je pense que c'est ce qui a été écrit de plus fort depuis la Réforme contre les abus de la Curie. Quel peut bien en être l'auteur ? 1886 […] Quel qu'il soit il n'est pas le premier venu. C'est un long réquisitoire, mais dont le ton est convenable - sauf quelques phrases par ci par là. La documentation ne laisse presque rien à désirer... quelques inexactitudes peut-être dont les réfutateurs se serviront pour dire que le livre est un tissu d'erreurs... etc., etc. Mais je doute qu'on essaie de réfuter. On condamnera 1887 et l'on fera silence ! N'importe, je crois que le livre fera une grosse impression 1888 .’

Dans son Journal il explicite les raisons qui lui font approuver ce réquisitoire contre la Curie. C'est d'abord qu'il est "le cri d'une âme croyante […] qui proteste contre la tyrannie des gens d'Église, contre les procédés administratifs […] plus capables d'éloigner les fidèles que de les attirer à Jésus-Christ". C'est ensuite qu'il vient heureusement contrebalancer les livres des "historiens bien pensants (qui) altèrent outrageusement la vérité et ne se font pas faute de mentir pour justifier l'injustifiable". C'est enfin qu'il justifie le sentiment que "des réformes s'imposent dans l'administration de la Curie, que beaucoup de rouages sont faussés, que l'Église de Notre-Seigneur ne saurait être l'apanage exclusif de quelques personnages, fussent-ils des saints" 1889 . Réforme d'autant plus urgente que tout montre qu'il y a "une aversion très réelle quoique dissimulée de l'Église pour la science". Dès 1900 il notait :

C'est là l'un des grands dangers du catholicisme et surtout de l'esprit de la Curie qui, si l'on en juge par quelques incidents récents (v. g. les Trois Témoins) organise un immense système de compression, de terrorisme sur les faibles et les crédules. On pouvait régner par la science et on régnera par la terreur 1890 .

La congrégation du Saint-Office est à ses yeux l'exemple type d'une autorité dévoyée en pouvoir particulièrement redoutable. En 1907, il déconseille vivement à Mgr Lacroix de se rendre à Rome pour tenter de se justifier auprès de Saint-Office des dénonciations dont il est l'objet :

‘On est très habile au Saint-Office... On vous prendra par tous les bouts, on vous fera jurer sur l'Évangile que vous n'êtes ni l'auteur ni l'inspirateur des écrits et communications en question... Si des indiscrétions ont été commises, si l'on a de fortes probabilités contre vous, vous serez fort embarrassé pour glisser entre toutes ces mailles sans y laisser quelques-unes de vos plumes. Quelle que soit la limpidité de votre conscience plus pure que la neige de vos sommets mieux vaut que vous n'ayez aucun démêlé avec le Saint-Office 1891 .’

Or de telles prétentions ne sont pas fondées théologiquement, elles confondent en outre le ministère de l'unité avec la centralisation qui en est la perversion :

‘Les socialistes font le rêve absurde de tout centraliser dans l'État. Voudrait-on centraliser dans les Congrégations toute la vie intellectuelle de l'Église ? établir au Vatican et à la Chancellerie un bureau téléphonique universel qui chaque matin communiquerait à tous les évêques la vérité officielle du jour en histoire, en philosophie, en critique, en archéologie, en géologie, en astronomie, etc. Inutile de penser, d'autre penserait pour nous 1892 .’

Aux yeux de Mgr Mignot, une des raisons principales de cette dérive est que les congrégations sont peuplées de religieux qui échappent à l'autorité des ordinaires, et sont loin de leurs préoccupations de pasteur. Dès 1897, il profite de sa lettre à Léon XIII sur la question des Trois Témoins, pour évoquer le fonctionnement de la Curie. C'est à ses yeux un "inconvénient grave à ce que les religieux composent la majorité des congrégations" et que "de plus en plus le gouvernement effectif ou plutôt l'administration de l'Église passe en fait aux mains des religieux qui épousent souvent les idées et parfois les préjugés" 1893 des ordres religieux auxquels ils appartiennent. Or les ordres religieux ont naturellement tendance à privilégier leurs intérêts particuliers, alors que les évêques ont en vu l'intérêt général de l'Église. Au moment de la Séparation, Mgr Mignot use de l'argument pour mettre en garde le gouvernement sur les conséquences de sa politique :

‘Si vous voyez le Directeur (des Cultes), écrit-il à Mgr Lacroix, dites que si la Séparation se fait ce sera le règne des Jésuites, Assomptionnistes etc., etc. Le Pape par la force des choses, nommera directement les évêques français. [...] Alors ce sont les Jésuites qui écarteront impitoyablement les gens qui ne pensent pas comme eux et feront nommer leurs créatures. Avec l'esprit d'intrigue qui règne à Rome, on en verra de belles ! Et cela sur toute la ligne... On arrivera à un résultat tout contraire à celui que l'on veut atteindre 1894 .’

Il ne manque pas une occasion pour rappeler discrètement à ses interlocuteurs romains la place que les évêques doivent avoir dans l'Église enseignante. Ainsi par exemple au cardinal Rampolla : "Il importe assurément que le Pontificat Romain, appuyé sur les évêques, continue à veiller soigneusement sur le maintien de la doctrine dans son intégrité…" 1895 . A plusieurs reprises, il fera des propositions pour que les évêques soient davantage associés au gouvernement de l'Église. Par exemple en 1897, à propos des nouvelles dispositions de la récente Constitution de l'Index 1896 . L'abbé Loisy appelle son attention sur ce texte qui prévoit de soumettre à la censure préalable les livres qui traitent d'Écriture sainte et en général tous les écrits où il est "principalement question de la religion et de l'honnêteté des mœurs". Regrettant l'ancienne Constitution, "si bonne dans les pays où on n'en tenait pas compte" 1897 , il lui avait fait part de l'inquiétude qu'elle lui inspire, en particulier pour la Revue d'histoire et de littérature religieuses :

‘L'esprit de la constitution est pire que la lettre. L'appliquera-t-on ? Les évêques se trouvent disposer d'un pouvoir très étendu, discrétionnaire, à l'égard de leurs prêtres. Rien de plus juste, en principe. Mais quelle atrocité de régime intellectuel quand la tête épiscopale ou archiépiscopale ne se trouve meublée que d'un préjugé autoritaire ! Il est clair que si l'archevêque de Paris veut s'occuper de nous, la Revue disparaîtra. Nos laïques ne veulent pas de la censure préalable et pour mon compte je ne m'y exposerai pas. […] Il me semble que la constitution repose sur un malentendu fondamental : la confusion de l'enseignement religieux avec l'étude scientifique des documents religieux. L'esprit des pauvres abbés va continuer à être maintenu dans une tutelle si étroite que ce sera merveille s'il résiste. Tout cela nous prépare un singulier réveil 1898 .’

Mgr Mignot partage l'analyse de l'abbé Loisy qu'il estime largement fondée. S'il veut rester optimiste du côté des intentions du pape, il redoute les réactions de ses collègues dans l'épiscopat :

‘L'abbé Duchesne m'avait dit que le vent soufflait à la réaction dans l'entourage du Pape : la nouvelle constitution sur l'Index en est-elle la preuve ? Je veux encore en douter. En fait je crois que le Souverain Pontife a voulu élargir la courroie 1899 . Par malheur on sera tenté de tirer des conséquences terribles des prescriptions pontificales ! Il est clair que le danger sera grand de la part d'un épiscopat de plus en plus incompétent sur les questions critiques 1900 .’

L'évêque de Fréjus écrit donc à Léon XIII et il lui suggère de s'appuyer sur les évêques pour la mise en œuvre de la Constitution de l'Index :

‘Puisque je suis en veine de confidences, que V. S. me permette de lui exprimer un vœu. Ce serait d'imposer à quelques évêques compétents, dans chaque région du monde catholique l'obligation de Lui faire connaître l'état vrai des esprits. Cette mesure serait d'autant plus urgente que la nouvelle Constitution de l'Index sera inapplicable si les évêques ne se concertent entre eux pour renseigner le Chef de l'Église 1901 .’

La persévérance avec laquelle Mgr Mignot fait parvenir aux papes successifs des mémoires sur les grands problèmes de l'Église et le fait qu'il n'ait jamais reçu la moindre réponse, témoignent et de l'importance que l'archevêque accordait aux évêques dans la direction de l'Église et de la distance qui existait alors entre cette conception et la manière dont l'Église était réellement gouvernée. Il en fait le constat désabusé et avoue à Léon XIII :

‘Votre Sainteté me disait en novembre dernier que dans l'Église il n'y a que deux autorités : le Pape et les Évêques. En fait il n'en est pas ainsi. Souvent nous sommes découragés en voyant trop souvent combien peu nous comptons ! 1902

Mgr Mignot a eu maintes fois l'occasion de le déplorer et de s'en plaindre. Le refus des cultuelles, la manière dont a été conduite la rédaction de la lettre collective condamnant des manuels scolaires ou le décret sur la première communion 1903 sont des exemples flagrants de ce que les évêques ne comptent pas et qu'il leur faut seulement obtempérer au moindre désir du Vatican. A propos de l'affaire des manuels il écrit :

‘Il est clair que le fait de rédiger des documents sans consulter les évêques, de présumer leur consentement sans les avoir pressentis, d'imprimer leur nom à la fin d'un document dont les idées sont envoyées directement par la Secrétairerie d'État, n'est pas conforme à la tradition de l'Église ni à sa constitution. C'est le système de l'anonymat, de l'irresponsabilité romaine alors qu'on fait endosser la responsabilité réelle par les évêques qui n'en peuvent mais.’

Cette pratique est d'autant plus dangereuse qu'elle semble être un nouveau moyen d'action et faire partie d'un nouveau système de gouvernement. […] Ceci n'est plus l'Église de N. S. ; c'est un système politique qui a ses avantages et surtout ses inconvénients. C'est l'introduction, dans le régime de l'Église des procédés humains de gouvernement ; c'est la voie ouverte, nous le voyons que trop, à toutes les passions, rancunes, jalousies, influences de toutes sortes, intrigues, cabales, dénonciations…, tout cela coloré de nom pompeux : gloire de l'Église, salut des âmes, etc., etc. On n'est jamais embarrassé 1904 .

L'affaire de l'âge de la première communion est typique, pour Mgr Mignot, de cette dérive autoritaire sinon absolutiste de Rome. Cette décision l'a en effet mis au comble de l'exaspération : "On veut nous imposer les pratiques italiennes, écrit-il à Mgr Lacroix. Deviendrons-nous plus chrétiens en nous défrancisant ? En vérité le jansénisme est chose précieuse pour porter le péché d'Israël" 1905 . De plus, cette décision "brise d'un trait de plume le vénérable et touchant usage de la communion solennelle" et surtout elle manifeste "le manque d'égards (de Rome) envers l'épiscopat de France qui n'a même pas été consulté. On y parle des parents, mais pas un mot des chefs des diocèses" 1906 . Il se croit cependant tenu d'assurerPie X de son entière adhésion à "la doctrine théologique" sur laquelle le pape a fondé sa décision. Il est vrai qu'il en profite pour appeler l'attention du souverain Pontife sur les dangers de l'application de ce décret dans le contexte français et lui demande un délai "pour préparer l'entière exécution de ses intentions" 1907 . Mais il constate, désabusé, qu'à l'exception de quelques évêques 1908 , l'épiscopat décontenancé n'en a pas moins finalement accepté sans protester la décision romaine :

‘Jamais, au grand jamais la puissance du Pape ne s'est imposée avec pareille autorité. C'est vraiment la manière forte. Est-ce la meilleure ? Peut-être, car si l'autoritarisme romain détache certaines âmes, elle fait plaisir au plus grand nombre. Je ne dis pas que nous allons à l'annihilation de l'épiscopat, nous y sommes et c'est chose faite. Quoi de plus significatif par exemple que la volte-face générale de l'épiscopat, des curés relativement à la première communion ? Le décret du mois d'août dernier fut accueilli avec stupeur en France, en Allemagne, en Belgique etc. Puis conversion sur toute la ligne. C'est le décret libérateur... le salut de la religion etc., etc., et maintenant tous les curés vont de l'avant ! Je ne désespère pas de voir revenir à l'ancienne discipline qui donnait les parcelles restantes de l'Eucharistie aux enfants à la mamelle !! 1909

Dans le même temps les évêques, à commencer par Mgr Mignot, n'imaginent pas un seul instant qu'ils puissent s'opposer à une demande de Rome. Le renvoi de Mgr Batiffol est une bonne illustration de cette paralysie. Du dossier de cette affaire obscure rassemblé par le chanoine Bécamel 1910 , il ressort que la cheville ouvrière de la destitution a été Mgr Germain, archevêque de Toulouse, lequel a emporté l'adhésion des archevêques d'Auch et d'Albi en leur laissant accroire que telle était la volonté du pape. Ce qui est révélateur, c'est la facilité avec laquelle cette version est acceptée sans que personne ne manifeste le moindre doute, pas même, sur le moment, le principal intéressé qui s'en fera très vite le reproche : "En vérité, notre critique nous a bien servis, ce jour-là" 1911 , note-t-il en marge d'une lettre reçu de l'abbé Birot en avril 1908. Qu'une mesure d'une telle gravité dépasse l'initiative des évêques est en effet une idée communément partagée comme en témoigne l'interprétation de Loisy :

‘La destitution de Mgr Batiffol est un fait inouï. Et ce que j'admire le plus est que les bons journaux déchargent Rome de toute responsabilité dans cette affaire. Je ne suis pas dans les secrets de votre grand conseil, et je ne demande pas à les connaître ; mais je ne suppose pas que la décision ait pu être prise autrement qu'au su, au gré et à l'instigation du Vatican 1912 .’

L'archevêque d'Albi lui répond :

‘L'affaire Batiffol ? Il est clair qu'on nous mettra les choses sur le dos. La Corr[ispondenza] romana a déjà donné le ton aux journaux catholiques. Soyez assuré que si le Recteur a été remercié c'est que Rome nous a imposé la chose non pas d'une façon brutale - la Curie pèse ses mots afin de pouvoir dire qu'on a mal compris si ça tourne mal -, mais d'une façon telle qu'il n'y avait moyen de s'y méprendre 1913 .’

C'est l'interprétation que défend l'abbé Birot. A M. Franon, sulpicien, professeur de l'Institut catholique de Toulouse qui l'interroge sur la meilleure manière de prendre la défense du recteur destitué, le vicaire général d'Albi conseille de ne rien entreprendre, car la disgrâce du recteur manifeste à l'évidence que "les inférieurs dans l'Église, sont privés de tout droit, de toute garantie individuelle et que les chefs le sont de tout contrôle, de toute responsabilité". Cet état de fait est la conséquence de "l'exaspération d'un pouvoir absolu qui ne rencontre plus les éléments pondérateurs qui lui sont nécessaires, et que réclame toute autorité, même divine, laissée entre les mains des hommes". Le mouvement de centralisation opéré dans l'Église qui a été jusqu'à méconnaître les droits des évêques a une suite logique et naturelle, c'est la servilité - l'abbé Birot dit servilisme - des évêques. C'est cette servilité "qui vient de se manifester à Toulouse par la destitution du Recteur, non pas sur ordre, mais sur signe, le simple désir timidement exprimé par le Vatican". C'est pourquoi insinuer comme on tente de le faire ici ou là dans la presse "que les évêques ont été trompés, c'est aller contre l'évidence. Les évêques ont bien voulu ce qu'ils ont fait" 1914 .

Deux ans plus tard, revenant sur l'attitude des évêques, il écrit à Mgr Batiffol :

‘Croyez que les meilleurs croient dur comme fer qu'ils ont cédé à la force majeure et n'ont rien à se reprocher à votre égard. […] Je sais que vous êtes sévère pour mon archevêque. Ne le soyez pas trop. […] Il a agi selon son tempérament d'homme las, découragé, qui se sent méconnu, impuissant, et qui, d'ailleurs, n'a pas le sens de l'action. Il ne faut pas lui en vouloir, c'est encore notre meilleures ressource 1915 . ’

Ces raisons, sans doute valables quand il apparût évident que tout espoir d'amener Pie X à assouplir son intransigeance, tant dans le domaine doctrinal que dans celui des relations entre l'Église et l'État, s'enracinent dans l'acceptation ancienne des imperfections de l'Église. Après sa rencontre avec Mgr Mignot à Fréjus, le P. Hyacinthe note dans son Journal :

‘Il affirme la primauté, accepte l'infaillibilité, mais distingue dans cette Église, dont il veut la réforme et le progrès, les idées, des formules plus ou moins défectueuses qui les expriment et des hommes surtout qui les compromettent. Je me sentais avec un frère. J'ai quitté l'évêché en me disant […] que le catholicisme de Mgr Mignot pourrait être le mien, si mon esprit et ma conscience étaient moins absolus et pouvaient, comme les siens, interpréter les erreurs et tolérer les abus 1916 .’

Mgr Mignot ne cesse en effet de rappeler que l'Église "n'est pas une abstraction ou une société de purs esprits" 1917 . Société humaine, l'Église est inscrite dans l'histoire et à ce titre on ne peut la vouloir plus parfaite qu'elle ne peut l'être. C'est ce qui le sépare fondamentalement du P. Hyacinthe :

‘Pas plus que vous je ne trouve dans l'Église catholique l'épouse idéale du Christ sine ruga sine macula ; aussi bien n'est-elle pas encore l'Église triomphante. Je voudrais que vous fussiez persuadé que, telle qu'elle est, elle n'a pas cessé d'être la vraie continuatrice de l'œuvre de Notre Seigneur et qu'en dehors d'elle on ne voit pas où on irait. Aucune des branches séparées ne vous donne paix et sécurité intellectuelle. […] Je ne suis pas ennemi du progrès, du développement, de la transformation dans une large mesure, vous le savez […]. Tous les reproches que vous faites à l'organisation actuelle de l'Église, je les connais ; j'en connais le bien fondé dans une large mesure, mais ces reproches tombent sur le côté humain et extérieur de l'Église, ils n'atteignent pas sa vie intime, ses sacrements. Elle a la grâce et elle la donne, cela est énorme. […] Les changements disciplinaires se feront peu à peu par le forces des choses 1918 .’

Il n'en est pas moins choqué par le fait que l'administration de l'Église, qui "n'est qu'une œuvre humaine", tende "toujours à étendre son domaine et agrandir sa sphère d'action" et il est en vient à penser qu'il "faut obéir sans qu'il soit nécessaire de soumettre son esprit" 1919 .

Notes
1881.

"Nous prélats romains sommes les seuls à jouir de l'assistance et des lumières du Saint-Esprit pour traiter ces choses-là". Propos rapportés par le P. Morin et cités in Houtin, L'histoire du modernisme, p. 221.

1882.

Carnet, 10 avril 1913, ADA, 1 D 5-22.

1883.

George Jackson MIVART (1827-1900), biologiste anglais, professeur au Roman Catholic University College de Kensington (1874) puis à Louvain (1890). Critique envers la théorie de la sélection naturelle de Darwin, il admettait l'évolution sous réserve de conserver à Dieu l'action déterminante dans le développement de l'esprit humain. Il fut cependant excommunié "pour avoir nié trop haut l'historicité des premiers chapitres de la Genèse" (Loisy, Mémoires, I, p. 548).

1884.

Notes sur l'apologie, Analyse d'articles de Mivart, janvier 1900, ADA, 1 D 5 11-02

1885.

*****, Ce qu'on a fait de l'Église. Étude d'histoire religieuse, avec humble supplique à S.S. Pie X, Paris Alcan, 1912, XXIII-554 p. Mgr Mignot l'a reçu le 14 février donc avant sa diffusion public le 28 février 1912.

1886.

Le secret demeura bien gardé. Comme le livre avait été imprimé à Lyon, on en fit une œuvre collective des catholiques libéraux de Lyon. Mgr Mignot se fait l'écho de cette hypothèse dans une lettre du 5 avril : " Il paraît qu'on cherche l'auteur du côté de Lyon". E. Poulat dans Histoire…, pp. 662-664 recoupant différentes informations données par l'abbé Brugerette in Le prêtre français et la société contemporaine, 1938, t. III, pp. 286-287 et 295, estime qu'on doit attribuer ce livre, avec une forte probabilité, à l'abbé Naudet. Mgr Mignot semble l'avoir ignoré. Le 15 février il écrit à l'abbé Naudet : "J'ai vu Mgr Lacroix […] Je lui ai demandé le nom de l'auteur. Il ne m'a pas répondu. Je n'ai pas insisté. Si, par hasard, vous le connaissiez, il serait prudent de ne pas le lui dire. Vous connaissez son entourage curieux et indiscret", BLE, 1973, p. 96.

1887.

Ce sera chose faite par Mgr Amette dès le 6 mars.

1888.

Mgr Mignot à Mgr Lacroix, 19 février 1912, f° 189-190.

1889.

Journal, 17 février 1912, ADA 1 D 5 21. En octobre il note : "L'évêque de Dijon ayant appris qu'il y avait un exemplaire de Ce qu'on a fait de l'Église au grand séminaire a envoyé son secrétaire particulier s'enquérir de quoi, de comment, de qui… Le dit secrétaire a été chez le libraire demander le nombre de livres reçus et le nom de ceux à qui il les avait vendus ! Voilà l'inquisition rétablie à Dijon ! C'est du Torquemada tout pur. Voilà ce que nous réserverait le gouvernement des curés s'il revenait".

1890.

Notes sur l'apologie, Analyse d'articles de Mivart, janvier 1900, ADA, 1 D 5 11-02

1891.

Mgr Mignot à Mgr Lacroix, 4 octobre 1907, f° 67-68.

1892.

5e Reg, Varia, 30 avril 1916, ADA, 1 D 5 21. Cette toute puissance de la Curie devient dangereuse en fin de pontificat : "Il est clair que le Pape fatigué ne fait plus grand chose par lui-même, qu'il voit les choses par les yeux de son entourage. La vieille comtesse de Paravicino m'écrivait ces jours-ci que le Pape est très changé quoiqu'il ne le paraisse pas trop dans les audiences attendu que ses médecins lui soutiennent les forces au moyen d'injections. […] L'Église est donc dirigée par le C. Merry del Val, le C. De Laï, le C. Billot, les CC. Préfets des Congrégations", Journal, 15 mars 1914, ADA, 1 D 5 23.

1893.

"Notes pour une lettre au Pape relative à la décision récente du Saint-Office touchant le Tres sunt qui testimonium", ADA, 1 D 5 11-01.

1894.

Lettre à Mgr Lacroix, 6 novembre 1904, f° 25-26.

1895.

Rapport confidentiel au Cardinal Rampolla sur l'administration du diocèse, 8 décembre 1901.

1896.

Constitution Officiorum ac munerum du 25 janvier 1897.

1897.

En France en particulier où un certains nombre d'auteurs gallicans du XVIIe et du XVIIIe siècles soutenaient que les décisions de l'Index n'avaient pas force de loi. Cette prétention était sans doute encore vivace au XIXe siècle puisque le chanoine L. Petit consacre un chapitre entier de son livre L'Index, son histoire, ses lois, Paris, 1888, à la réfuter.

1898.

Abbé Loisy à Mgr Mignot, 9 février 1897, BLE, 1966, pp. 12-14.

1899.

Cette interprétation de Mgr Mignot pouvait s'appuyer sur certaines dispositions de la constitution, par exemple celle qui autorisait les exégètes à faire usage des éditions et des commentaires bibliques protestants ou celle qui levait l'obligation - à vrai dire tombée en désuétude - pour tout catholique qui voulait lire la Bible en langue vulgaire d'obtenir un permission écrite de son évêque.

1900.

Mgr Mignot à l'abbé Loisy, 11 février 1897, f°94-95.

1901.

"Notes pour une lettre au Pape relative à la décision récente du Saint-Office touchant le Tres sunt qui testimonium", ADA, 1 D 5 11-01.

1902.

"Notes pour une lettre au Pape relative à la décision récente du Saint-Office touchant le Tres sunt qui testimonium", ADA, 1 D 5 11-01.

1903.

Décret Quam singularis du 8 août 1910 qui encourageait fortement l'abaissement de l'âge de la première communion à sept ans. Il rencontra d'abord une assez vive opposition en France où la communion tardive (entre 10 et 12 ans) était une tradition qui remontait au milieu du XVIIIe siècle.

1904.

Journal, 23 juillet 1909, ADA, 1 D 5 11-02.

1905.

Mgr Mignot à Mgr Lacroix, 24 août 1910, f° 144-145. A Loisy : "Le fameux décret sur la première communion, s'il est exécuté, sera la ruine de l'enseignement catéchistique en France. Les rédacteurs n'ont jamais été curés ni vicaires ! Tant pis pour ceux qui endossent une pareille responsabilité !", Mgr Mignot à Alfred Loisy, 3 septembre 1910, f° 236-237-238.

1906.

Mgr Mignot à Mgr Lacroix, 30 août 1910, f° 146-147. L'abbé Bremond écrit au P. Laberthonnière : "Le décret sur la communion dépasse tout - tout y est - suppression de l'épiscopat - apothéose de la magie - monophonisme, etc.", M.-Th. Perrin, Op. cit., p. 221.

1907.

Lettre de Mgr Mignot à Pie X, 19 septembre 1910, ASV, Rub. 12, 1910, fasc. 15, f° 72.

1908.

En particulier Mgr Chapon de Nice qui rédige à cette occasion un important mémoire qu'il fait parvenir au Pape par l'intermédiaire du cardinal archevêque de Lyon.

1909.

Mgr Mignot à Mgr Lacroix, 27 mars 1911, f°169-170

1910.

M. Bécamel, "Comment Mgr Batiffol quitta Toulouse, à la Noël 1907", BLE, octobre-décembre 1971, pp. 258-288 et avril-juin 1973, pp. 109-138.

1911.

"Comment Mgr Batiffol quitta Toulouse, à la Noël 1907", BLE, avril-juin 1973, p. 123.

1912.

L'abbé Loisy à Mgr Mignot, 2 janvier 1908, BLE, 1968, pp. 265-266.

1913.

Mgr Mignot à l'abbé Loisy, 5 janvier 1908, f° 226-227.

1914.

L'abbé Birot à M. Franon, 29 décembre 1907 cité in "Comment Mgr Batiffol quitta Toulouse", BLE, avril-juin 1973, pp. 116-117.

1915.

Lettre de l'abbé Birot à Mgr Batiffol, 14 juin 1910, "Comment Mgr Batiffol quitta Toulouse", BLE, avril-juin 1973, p. 130. Dans la relation de sa visite ad limina de 1908 Mgr Mignot écrit : "Parlé au Pape de l'affaire Batiffol. Sa réponse a été très nette : "Les archevêques ont bien fait de le remplacer ; ils n'ont fait en cela qu'interpréter sagement et fidèlement sa pensée. La place de Mgr Batiffol n'était pas à la tête d'un Institut catholique", ADA, 1 D 5-15.

1916.

12 décembre 1899 in Houtin, Le P. Hyacinthe, t. 3, p. 273.

1917.

Instruction pastorale à l'occasion de sa prise de possession, 2 février 1901, p. 5.

1918.

Lettre du 19 janvier 1903 in Houtin, Le P. Hyacinthe, t. 3, pp. 281-282.

1919.

Journal, 15 mars 1914, ADA, 1 D 5 23..