II. MATÉRIELS D'INTERVENTION : MOYENS DE SAUVETAGE, AGRÈS DE RENFORT ET D'EXPLORATION - ÉTAT

A. PARC DE SECOURS ET DE SAUVETAGE - AGRÈS DE RENFORT

1. LES MOYENS AÉRIENS

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Document n° 47 : Service d'incendie et de sauvetage : Echelles aériennes - Présentation publicitaire - Echelle MARTIN-VINCENT devant le hall de départ de la caserne RABELAIS (début XXème siècle) - Développement d'un engin
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La division du matériel d'intervention mis à la disposition des sapeurs-pompiers du bataillon de la ville de Lyon à partir de la seconde moitié du XIXème siècle se ferait entre deux classes de supports. L'une représenterait le parc technique formé des pompes, quelles que soient leurs formes, et des moyens d'établissements en eau, renvoyant alors à la stricte opération de lutte contre les flammes, alors que l'autre figurerait les procédés d'intervention qui participeront couramment, de façon complémentaire, à l'action des hommes. La différenciation ne vaut que dans l'interprétation ou la présentation car, sur le terrain, l'imbrication de ces classifications était permanente. La seconde catégorie des supports techniques se composait, en fait, d'un matériel beaucoup plus composite que ceux symbolisant le premier groupe et dont les principaux moyens viennent d'être décrits. Parmi les agrès déterminant la seconde classe figurait, en bonne place, le matériel de sauvetage, qui, en dehors des différents modes et moyens qui seront abordés ultérieurement, s'appuyait sur un support, essentiel dans la conduite de certaines opérations de secours : les échelles aériennes. Ainsi, le document n° 47 présente-il ces échelles dont deux des trois pièces visuelles utilisées découvrent celle acquise par la ville de Lyon, après épreuves, en 1896, soit l'échelle MARTIN-VINCENT3256. L'application faite à l'exercice du service d'incendie et l'usage de cette classe de moyens, celle de l'échelle aérienne, sous-entendant un développement en hauteur important avec, généralement, un seul et unique appui, au sol, marquant donc une différence avec l'échelle classique, utilisée à d'autres tâches ou par certains corps de métiers, remonterait à la présentation qu'en faisait le sieur RÉGNIER ; une introduction au travers d'un nouveau matériel qu'il venait de mettre au point, au début du XIXème siècle3257. Son emploi, foncièrement urbain, ne se développera, néanmoins, que progressivement et, de manière réellement flagrante, à compter des années 1850. La complémentarité de ce matériel avec les pompes à incendie ne s'établissait pas uniquement sur les procédés d'attaque du foyer qu'une échelle permettait par la hauteur, en conséquence un combat contre les feux en étages et surtout de combles, mais sur les sauvetages qu'elle autorisait. Ainsi, le support n'était-il pas seulement celui de l'exercice des opérations de secours contre l'incendie mais déjà, sous une forme particulière, celui de l'exécution du service d'incendie et de secours à personne(s). Le rapport à la vie humaine, entre perception et conscience de cet état, sans parler de l'image sociale, celle de la peur des flammes, de périr par le feu, imposait ainsi de pouvoir sauver les personnes prisonnières d'un incendie, notamment dans les constructions élevées. Parmi les meilleurs moyens demeurait donc l'échelle aérienne. D'ailleurs, par cet intermédiaire, les sapeurs-pompiers du bataillon de la ville de Lyon opérèrent plusieurs sauvetages de personnes3258. Quant à la disposition d'une telle machine, elle correspondait bien à une exigence en fonction des modes d'édifications modernes, face à des constructions de plus en plus élevées présentant des dangers sous les modes de propagation des flammes et d'évacuation des résidents.

Imposant d'être construite solidement, stable une fois déployée, à inclinaison variable et facile de transport, l'atout essentiel d'une échelle aérienne résidait dans un appui au sol et non pas toujours contre la façade d'un bâtiment3259. Ceci permettait dès lors un travail des hommes en relative sécurité, que ceux-ci soient afférés à une extinction ou à un sauvetage. Cette notion de sécurité était prépondérante, pour le sapeur comme pour le sinistré. Seulement, la mise en manoeuvre d'une échelle aérienne, sortant à chaque fois qu'étaient signalés un incendie en étage ou des personnes en danger, demandait, couramment, du temps ; si bien que certaines des opérations continueront d'être menées à l'aide de l'échelle à crochets. Au moment de la décision d'une première acquisition par la ville de Lyon d'une échelle aérienne, l'objectif était distinctement posé, par le conseil d'administration du bataillon, de la réalisation et de l'introduction de significatifs progrès, matériels, mis à la disposition des hommes pour combattre les incendies et faciliter les sauvetages3260. Selon les propos exprimés par le conseil, le dévouement des sapeurs, appréciés comme des hommes d'élite, malgré tout le courage qu'ils mettaient dans leur mission, n'était qu'une fragile réponse -mais pour le moins noble- sans le support d'un parc matériel et technique fonctionnel et efficace3261. Ce projet de premier équipement d'une échelle aérienne intervenait en fait peu après l'acquisition de nouvelles pompes à vapeur par la ville de Lyon et marquait la mise à disposition des hommes servant au Dépôt Général d'un matériel moderne devant faciliter chacune des opérations menées sur le théâtre d'un incendie. C'est ainsi que le conseil d'administration du corps soumit à différents examens et différentes épreuves, en décembre 1871, une échelle de fabrication italienne, dite PORTA, brevetée Sans Garantie Du Gouvernement -SGDG-3262. Deux hauteurs étaient disponibles, soit 13 et 22 mètres, la première étant montée sur un char qui se remorquait par les hommes chargés de sa manoeuvre et la seconde, sur un char à traction hippomobile3263. Le système fonctionnait sur des longueurs d'un peu plus de 3 mètres qui s'ajoutaient les unes aux autres3264. Montée d'abord horizontalement, l'échelle était ensuite dressée verticalement par le renversement du char sur lequel elle était montée, pour la plus petite, et au moyen d'un treuil, pour la plus grande, alors que des cales supprimaient le mouvement du char et que des poids équilibraient la stabilité de l'échelle une fois déployée3265. A l'origine, et à la suite des essais effectués, le projet d'équipement était ambitieux puisque le conseil d'administration était d'avis de prévoir l'achat de 8 échelles de cette facture, en fait 2 de 22 mètres, qui seraient remisées au Quartier Central, et 6 de 13 mètres, soit une par arrondissement3266. Ce souhait était le simple reflet des observations issues des risques concentrés dans l'agglomération, du nombre des départs de feux et leurs conséquences, de l'exigence d'organisation du service d'incendie et des manoeuvres concluantes de l'engin auquel, dans le cadre de sauvetage, pouvait également être fixée, à son extrémité, une nasse. L'équipement procurait de réels avantages, y compris avec des échelles de grandes élévations dont la mesure maximale représentait la hauteur des constructions lyonnaises. Seulement, l'investissement demeurait important sur l'ensemble, étant donné que le grand modèle d'échelle était vendu 4.000 francs et le petit modèle 1.500 francs3267. La somme totale équivalait donc à 17.000 francs. Afin de réduire le coût de l'équipement, le conseil d'administration envisagea une autre solution. Celle-ci consistait à ne faire l'acquisition que d'un unique modèle pour chaque hauteur, et, disposant alors des engins, de payer seulement les droits d'invention et de propriété à leurs auteurs et de faire construire d'autres unités par les services techniques de la ville de Lyon3268. S'il fallait compter 600 francs, pour la construction de la plus petite des échelles, et 1.800 francs, pour la plus grande, les droits à payer se montaient cependant, et respectivement, à 600 et 2.000 francs ; ceci mettait donc la fabrication des engins à 1.200 et 3.800 francs, soit, avec les acquisitions servant de modèle, le paiement d'une somme totale de 15.300 francs et une simple économie de 1.700 francs. Aussi, par une délibération de l'administration municipale, à nouveau libre de l'exercice de ses droits3269, l'acquisition se réduisit, en fait, à sa plus simple expression, soit l'achat d'un modèle de chaque hauteur par l'ouverture d'un crédit de 5.500 francs3270. Car, bien que les propos de la séance mentionnent l'autorisation d'acquisition de deux "premiers" engins3271, laissant supposer que d'autres achats ou constructions suivraient, l'équipement du service d'incendie de la ville de Lyon en échelles aériennes se limitera, à cette époque, à la livraison de ces deux engins et à l'augmentation du parc des échelles classiques.

Si le conseil d'administration voyait dans l'équipement en échelles aériennes du bataillon des sapeurs-pompiers de la cité la réalisation de significatifs progrès dans la conduite efficace des opérations d'interventions des hommes, le conseil municipal rajoutait l'association à l'image et au rang de la ville3272. Au moment où l'agglomération retrouvait l'exercice de ses droits, l'affirmation face à la nation et au pouvoir parisien se faisait sur tous les fronts, y compris celui de la sécurité. Dans le projet d'acquisition des échelles PORTA, mettant du même coup l'accent sur l'inertie de l'autorité de tutelle qui s'exerçait sur le corps et la ville jusqu'à présent, l'évocation était aussi celle de la recherche de représentation ; ce, par la disposition d'un service d'incendie digne de la position de seconde ville de France3273. Si bien que dans ces équipements successifs en gros moyens, pompes à vapeur, sans avoir encore de réseau d'eau capable de les alimenter convenablement, et échelles aériennes, se pose la question des réelles intentions ; de savoir laquelle a servi l'autre, c'est-à-dire, soit celle de la gestion fonctionnelle et efficace du risque incendie, dans ce cas, par l'équipement matériel servant, du même coup, l'image de la ville, soit l'inverse. La seconde hypothèse, pourtant difficilement concevable face à la permanence des dangers mais que des attitudes ou des décisions rendaient équivoque, renverrait dès lors à une absence de considération, à la fois des hommes engagés dans les rangs du bataillon et des souffrances de la population d'une destruction par le feu. Sans que le voile soit totalement levé sur l'interprétation, le corps lyonnais de sapeurs-pompiers, sous l'organisation du bataillon issue de l'arrêté de 1852, eut donc à sa disposition de premières échelles aériennes en 18723274. Le Courrier de Lyon du 04 février 1872 décrivait ainsi à ses lecteurs une des toutes premières manoeuvres de ces engins par les soldats du feu et à laquelle assistait une foule de curieux. Le même journal, dans son édition du 18 octobre 1872, revenait, cette fois, sur les essais de ces agrès, échelles de sauvetage dans les incendies, réalisés devant un jury. Décrivant le système de fonctionnement, exagérant la hauteur de développement et réduisant le temps de sa mise en manoeuvre, le quotidien insistait, avant tout, sur la démonstration d'un sauvetage effectué à l'aide d'un "grand panier en osier", suspendu à l'extrémité de l'engin par une corde enroulée autour d'une poulie. Le sapeur monté au sommet de l'échelle pouvait ainsi opérer des sauvetages, y compris en se protégeant des flammes au moyen d'une lance, récupérer des personnes, les faire passer dans ce panier qui était monté et descendu à volonté par l'intermédiaire de la corde et des hommes qui en assuraient le mouvement. Comme dans de nombreux cas, la démonstration publique avait pour principal objet, en dehors de l'exercice et de la formation des hommes, celui de l'éducation des populations par l'observation visuelle des méthodes, reflétant également le sang-froid et la maîtrise des sapeurs dans l'accomplissement de leur mission. Voyant fonctionner les modes et les moyens matérialisant la réalisation effective de sauvetages, le but était aussi celui de concourir à la facilité des secours de personnes en développant, par la présentation publique, la confiance tout en cherchant à estomper la peur sociale des flammes. Les échelles PORTA, acquises en 1871 et mises en service en 1872, rendirent, en conséquence, des services, que ce soit dans l'attaque de certaines classes de feux ou dans l'exécution de sauvetages. Elles formèrent le premier noyau d'échelles aériennes de grand développement mises à la disposition des hommes jusqu'à ce que de nouveaux projets d'acquisitions soient envisagés, d'abord en 1882-1884, puis en 1887-18883275.

Chacun de ces nouveaux projets faisait en fait suite aux conclusions mises en avant par les rapports rendus en 1881 et en 1885 sur les réformes à introduire dans la perspective de la réorganisation, partielle ou complète, du service d'incendie de la ville de Lyon3276 ; sans parler du constat fréquemment noté par les officiers du corps dans l'utilité, toutefois ponctuelle et selon des situations précises, de ces agrès. Si des renseignements furent effectivement pris sur des engins qui fonctionnaient, entre 1883 et 1884, par exemple, à Grenoble et à Paris, notamment du système LIEB, soit un système de développement à bascule, aucune suite ne fut donnée, à cette date, à l'équipement3277. Néanmoins, la ville continua ses démarches, et sollicita la plupart des fabricants, reconnus à cette époque, de matériels d'incendie, à commencer par ceux avec lesquels elle avait déjà traité3278. S'appuyant sur les conclusions du rapporteur GRINAND concernant l'équipement et la modernisation à apporter au parc, la visée d'une nouvelle acquisition était toujours d'actualité. Ainsi, dans un rapport du commandant RANGÉ remis à l'administration municipale en novembre 1887, celui-ci mettait en avant l'échelle des établissements GUGUMUS frères, de Nancy, qu'il avait vu fonctionner lors de démonstrations réalisées durant le Congrès des sapeurs-pompiers ayant eu lieu à Rennes3279. Selon les propos de l'officier, l'engin présentait, une fois développé, une stabilité parfaite sur la base de son chariot et de quatre points d'appui au sol. Il présentait encore l'avantage de pouvoir être incliné au moyen de vérins et dressé, selon le commandant, en 2 ou 3 minutes par seulement 3 à 4 hommes3280. D'une hauteur de 16 mètres, pour l'échelle à deux pans, et de 20 mètres, pour l'échelle à 3 pans, présentant les mêmes caractéristiques pour le sauvetage que le procédé PORTA, par l'utilisation de poulies, cordes et nasses, le rapport de F. RANGÉ insistait également sur la possibilité de lui adapter, à son extrémité, une genouillère3281. Sorte de raccord coudé, elle permettait de fixer la lance et d'éviter ainsi certains des dangers de la manipulation des moyens en eau sous pression, notamment en fonction de la hauteur et de la position des sapeurs. La décision d'achat d'un engin de 16 mètres de développement fut adoptée dans une séance du conseil municipal de janvier 1888, non sans avoir fait l'objet d'âpres discussions, principalement sur l'origine de la fabrication3282. Implanté dans l'Est français, à Nancy, le matériel que présentait le constructeur offrait des similitudes avec celui que proposait le fabricant allemand MAGIRUS, implanté à Ulm, dans la région du Wurtemberg, soit la partie territoriale directement au contact de l'Alsace-Lorraine. Pour le conseil municipal de l'agglomération lyonnaise, il était inconcevable de faire l'acquisition d'un matériel qui soit étranger et, qui plus est, allemand3283. Sans que le doute soit complètement levé, non pas sur la nationalité du fournisseur mais sur le modèle dont s'inspirait celui dont la ville projetait l'acquisition, l'autorisation fut cependant donnée pour traiter de gré à gré avec le fabricant GUGUMUS pour cet équipement3284. Un budget de 1.650 francs fut dès lors débloqué en vue de l'achat de l'échelle de 16 mètres de développement3285. Celle-ci fut livrée en juillet 18883286.

Dans certains domaines, l'industrie étrangère était en avance techniquement. C'était le cas, à la lecture des comptes-rendus rédigés et des observations réalisées, pour les pompes à vapeur anglaises ou les échelles aériennes allemandes. Afin de s'implanter sur le marché du matériel d'incendie français, la solution était donc d'user de relais et de fournisseurs, proposant ou construisant, sous licence, les agrès issus de sociétés étrangères. Souhaitant privilégier l'économie nationale et locale, les autorités lyonnaises se montraient, en conséquence, réticentes dans certaines de ses acquisitions ; d'autant plus lorsque le matériel était susceptible d'avoir une origine allemande, même s'il s'agissait d'une copie. Ainsi, après l'accident de la Rue Ferrandière, la limite de 16 mètres de hauteur de l'échelle de 1888 et la réforme progressive des échelles aériennes utilisées jusque là par le bataillon de la ville de Lyon, de nouvelles et rudes discussions agitèrent le conseil municipal au moment du projet d'acquisition d'une nouvelle échelle quant à l'origine de l'engin3287. Cet équipement fut jugé comme impératif par le conseil d'administration du corps dans une séance de novembre 18943288, ouvrant dès lors le marché aux constructeurs d'agrès de cette classe. Trois principaux constructeurs, ou fournisseurs suivant l'appréciation, étaient à admettre3289 : GUGUMUS, de Nancy ; CHAGNARD-PORCHERON, présenté comme un établissement parisien -échelle LOTTE- ; MARTIN-VINCENT, de Genève. En fonction des informations dont le conseil d'administration disposait, la meilleure dotation en équipement, pour l'exercice du service d'incendie et de sauvetage, était celle de l'échelle MARTIN-VINCENT3290. D'ailleurs, concernant la proposition faite par L. MARTIN-VINCENT, en janvier 18953291, les membres du conseil se prononcèrent à l'unanimité en faveur de cette échelle malgré les premières réticences formulées par le conseil municipal3292. L'intention était alors de vendre à la ville de Lyon un engin dit "échelle à pivot mécanique aérienne"3293. Montée sur un char à 4 roues, tractable par un attelage de 2 chevaux, l'échelle était construite en bois de pin, échelons en frêne, scindée en 4 parties et reposant sur un bâti en fer forgé3294. Le mécanisme de dressage se faisait au moyen d'un ruban d'acier avec un frein de sûreté automatique3295. Quant au mécanisme de déploiement, celui-ci se faisait au moyen d'une corde en fil d'acier, les différentes parties glissant les unes sur les autres et étant sécurisées par des tirants et des parachutes3296. Une fois déployée, l'échelle atteignait la hauteur de 22 mètres, 25 avec son échelle d'allonge3297. D'un poids total approximatif de 3.200 kg, ce matériel était facturé 9.000 francs, franco de port et douanes en gare des Brotteaux3298. Le seul problème de cette échelle était sa provenance, supposée allemande. Si, sur le rapport de la commission des intérêts et travaux publics de la ville, le voeu fut prononcé de pourvoir à cette acquisition, un complément d'informations fut cependant réclamé sur l'origine de l'engin3299. En fait, il s'agissait d'un matériel fabriqué par la société allemande MAGIRUS dont L. MARTIN-VINCENT était le représentant, plus ou moins connu et que confirmeront les renseignements pris3300. Néanmoins, usant d'influence et jouant sur la qualité du matériel, le projet fut maintenu hormis que tout était fait pour présenter l'engin comme construit par le représentant genevois, signalé comme un inventeur. Ainsi, sur des prospectus publicitaires de juin 1896 étaient rendues illisibles les légendes accompagnant chaque croquis de l'échelle, alors que ce représentant aurait pourtant dû s'attendre à de telles réactions et prendre les mesures appropriées avant proposition3301. Sur ceux nouvellement édités, à l'emplacement où figuraient les anciennes légendes, était apposée la marque d'un tampon signalant : L. MARTIN-VINCENT3302. Dans le même temps, deux hommes assurèrent devant notaire qu'il s'agissait bien d'une invention de ce dernier3303. Quels que soient pourtant l'origine et la construction ou les artifices usés pour en masquer, maladroitement, la provenance, l'autorisation d'acquisition, après approbation du maire et du préfet3304, n'en fut pas moins donnée. L'échelle, soumise à de nombreux essais comme tous les matériels admis dans le parc technique du service d'incendie, fut définitivement acceptée le 7 juillet 18963305. Celle-ci servira jusqu'en 1923 avant d'être admise comme matériel de réserve, puis vendue en 19313306.

Parmi les moyens aériens figuraient encore les échelles "classiques", soit les échelles à coulisses et les échelles à crochets3307. Les premières déterminaient l'association d'un ou plusieurs montants, qui, coulissant les uns sur les autres, permettaient déjà d'atteindre, une fois déployés, de petites hauteurs. Elles rendaient d'utiles services sur certaines classes d'interventions mais leur usage demeurait toutefois moins important que les échelles à crochets, équipant toutes les pompes et les voitures amenées en renfort sur les incendies. Les sapeurs étaient sans cesse entraînés au maniement de ces dernières car leur emploi réclamait une certaine habileté. De peu d'encombrement, lorsqu'elle était repliée, légère à la fin du XIXème siècle, très étroite, terminée à l'une de ses extrémités par deux crochets, c'était l'outil le plus approprié pour escalader la façade d'un bâtiment, de fenêtre en fenêtre, en prenant appui, soit sur les rebords, soit sur les ancrages métalliques disposés en travers des croisées. Lorsqu'une cage d'escalier était envahie par les flammes et donc rendue inutilisable, et que des personnes se trouvaient bloquées dans les niveaux, le sapeur montait ainsi, passant son échelle d'étage en étage jusqu'aux victimes à évacuer. Equipé avec un cordage, l'homme pouvait alors secourir les sinistrés ou hisser, jusqu'à leur niveau, différents moyens de sauvetage, sac ou descenseur, par exemple. Ce matériel fut en fait le premier mode de sauvetage mis concrètement à la disposition des sapeurs-pompiers, et ce, dès le début du XIXème siècle. Outre le fait de signaler l'audace de certains des hommes du bataillon lorsqu'ils intervenaient avec ce matériel, bien qu'en d'autres occasions il leur ait été reproché de se donner en représentation sans que l'emploi de ce support soit nécessaire, les journaux relataient les sauvetages opérés avec ce mode sous un certain genre, celui de l'émotion et du suspense3308. La difficulté n'était pas seulement de gravir les étages au moyen de cette échelle mais de pouvoir, ensuite, procéder aux sauvetages des personnes, présentées, à juste titre, comme souvent terrorisées et prêtes à prendre des risques ou à en faire courir aux sauveteurs. Gravir une façade avec de tels moyens établissait la correspondance avec une situation d'urgence. Quant aux sauvetages de personnes, ils pouvaient être opérés en usant d'autres matériels amenés avec les chars d'incendie, qui évolueront, eux-mêmes, en départs attelés puis en premiers secours. D'ailleurs, comme le présentait le constructeur MERRYWEATHER dans un de ses nombreux catalogues, les moyens étaient associables entre eux, par exemple une échelle aérienne et un sac de sauvetage3309. Ceci permettait ainsi d'atteindre une hauteur importante sans danger du fait de la rigidité de l'échelle, de son travail en inclinaison, alors que les sapeurs, montés sur l'engin, pouvaient opérer, en même temps, d'autres tâches.

Notes
3256.

Voir le document n° 47 : Service d'incendie et de sauvetage : Echelles aériennes - Présentation publicitaire - Echelle MARTIN-VINCENT devant le hall de départ de la caserne RABELAIS (début XX ème siècle) - Développement d'un engin. La logique de présentation de ces 3 documents s'enchaîne, pour la circonstance, de haut en bas et de gauche à droite. Présentation publicitaire : AML, 1270 WP 019 - Sapeurs-pompiers : Demandes, acquisitions et essais de matériels : - Pompes, voitures et échelles ; 1859-1897. Prospectus MARTIN-VINCENT (1894). Echelle MARTIN-VINCENT devant le hall de départ de la caserne RABELAIS (début
XX
ème siècle) : Musée des sapeurs-pompiers du Grand Lyon. Développement d'un engin : AML, 1270 WP 019 – Sapeurs-pompiers : Demandes, acquisitions et essais de matériels : - Pompes, voitures et échelles ; 1859-1897. Prospectus des établissements MAGIRUS (1894).

3257.

REGNIER Ed. - Mémoire sur une échelle à incendie pour le service des campagnes et des petites villes, Paris, Huzard, 1811, 3 p.

3258.

Lors de l'accident de la Rue Ferrandière, survenu en 1891, qui coûta la vie à 2 sapeurs du bataillon, le but de la manoeuvre était autant celui d'une opération d'attaque du foyer que la conduite d'un sauvetage.

3259.

Voir le document n° 47, page III-584 : Service d'incendie et de sauvetage : Echelles aériennes - Présentation publicitaire - Echelle MARTIN-VINCENT devant le hall de départ de la caserne RABELAIS (début XX ème siècle) - Développement d'un engin. Sur au moins deux des documents, l'ensemble de ces éléments, soit la hauteur, la variabilité de l'inclinaison (Présentation publicitaire), la facilité de transport, du fait du montage de l'engin sur un chariot, et la stabilité (Présentation publicitaire ; sur la gauche de cette estampe, deux des quatre points d'ancrage au sol de l'échelle déployée sont parfaitement visibles), est aisément notable.

3260.

AML, 1270 WP 019 – Sapeurs-pompiers : Demandes, acquisitions et essais de matériels : - Pompes, voitures et échelles ; 1859-1897. Rapport au maire sur l'examen d'une échelle aérienne du système PORTA en séance du conseil d'administration du 10/12/1871.

3261.

Ibidem 248.

3262.

AML, 1270 WP 019 – Sapeurs-pompiers : Demandes, acquisitions et essais de matériels : - Pompes, voitures et échelles ; 1859-1897. Rapport au maire sur l'examen d'une échelle aérienne du système PORTA en séance du conseil d'administration du 10/12/1871.

3263.

Ibidem 250.

3264.

Ibidem 250.

3265.

Ibidem 250.

3266.

Ibidem 250.

3267.

Ibidem 250.

3268.

Ibidem 250.

3269.

BLANCHE Al. (sous la direction de) - Dictionnaire général d'administration, Paris, Dupont, 3ème éd., 1884-1885, 2 vol. ; pp. 1515-1516. Par la loi du 14/04/1871, le droit était donné, à la ville de Lyon, de réintégrer le régime classique d'administration municipale.

3270.

Idem 250. Délibération du 14/12/1871.

3271.

Ibidem 258.

3272.

Procès-verbaux des séances du conseil municipal – 1871 ; vol. 4, séance du 05/12, pp. 345-348.

3273.

Idem 260.

3274.

AML, 1270 WP 019 – Sapeurs-pompiers : Demandes, acquisitions et essais de matériels : - Pompes, voitures et échelles ; 1859-1897. Ces échelles furent réceptionnées en février 1872.

3275.

AML, 1270 WP 019 – Sapeurs-pompiers : Demandes, acquisitions et essais de matériels : - Pompes, voitures et échelles ; 1859-1897.

3276.

THIERS Ed. - La réorganisation des sapeurs-pompiers de Lyon, Lyon, Association Typographique, 1881,
118 p. / VILLE DE LYON. - Conseil municipal - Commission d'études pour la réorganisation du bataillon des sapeurs-pompiers (1er rapport présenté au conseil municipal pour une augmentation préalable du matériel), Lyon, Association Typographique, 1885, 6 p. / VILLE DE LYON. - Sapeurs-pompiers - Commission d'études pour la réorganisation du bataillon des sapeurs-pompiers, Lyon, Association Typographique, 1885, 29 p.

3277.

Idem 263. Echelles de sauvetage - Système LIEB - 1883-1884 / Le Progrès du 02/04/1884 publiait un article sur la visite des autorités administratives de la ville de Lyon et des officiers du corps de sapeurs-pompiers dans la cité grenobloise afin d'assister à une manoeuvre de cette échelle.

3278.

AML, 1270 WP 015 – Sapeurs-pompiers : Matériel, équipement et habillement : Offres de services de fabricants ; 1869-1939 / AML, 1270 WP 016 – Sapeurs-pompiers : Matériel, équipement et habillement : Documents publicitaires ; 1822-1910.

3279.

Idem 263. Rapport du 25/11/1887.

3280.

Ibidem 267.

3281.

Ibidem 267.

3282.

Procès-verbaux des séances du conseil municipal – 1888 ; vol. 1, séance du 21/01, pp. 151-154.

3283.

Procès-verbaux des séances du conseil municipal – 1888 ; vol. 1, séance du 21/01, pp. 151-154.

3284.

Idem 271.

3285.

Idem 271. La hauteur exacte était en fait de 15,50 mètres.

3286.

AML, 1270 WP 019 – Sapeurs-pompiers : Demandes, acquisitions et essais de matériels : - Pompes, voitures et échelles ; 1859-1897. Réception du 31/07/1888.

3287.

Procès-verbaux des séances du conseil municipal – 1895 ; vol. 2, séance du 13/04, pp. 97-103.

3288.

Idem 274. Séance du 11/11/1874.

3289.

Ibidem 276.

3290.

Voir le document n° 47, page III-584 : Service d'incendie et de sauvetage : Echelles aériennes - Présentation publicitaire - Echelle MARTIN-VINCENT devant le hall de départ de la caserne RABELAIS (début XX ème siècle) - Développement d'un engin. Les deux documents de gauche présentent cette échelle alors que le document de droite présente une des échelles MAGIRUS.

3291.

Idem 274. Proposition du 15/01/1895. Une maquette réalisée au 1/10ème fut également remise pour apprécier la facture de l'engin.

3292.

Idem 274. Séance du 17/02/1895.

3293.

Ibidem 279.

3294.

Ibidem 279.

3295.

Ibidem 279.

3296.

AML, 1270 WP 019 – Sapeurs-pompiers : Demandes, acquisitions et essais de matériels : - Pompes, voitures et échelles ; 1859-1897. Proposition du 15/01/1895.

3297.

Ibidem 284.

3298.

Ibidem 284.

3299.

Idem 285. Décision du 16/05/1895.

3300.

Idem 285. Courrier du Consulat de France à Genève au maire de Lyon le 25/05/1895.

3301.

Idem 285.

3302.

Voir le document n° 47, page III-584 : Service d'incendie et de sauvetage : Echelles aériennes - Présentation publicitaire - Echelle MARTIN-VINCENT devant le hall de départ de la caserne RABELAIS (début XX ème siècle) - Développement d'un engin. Ces inscriptions sont visibles sur le document présenté en haut à gauche.

3303.

Idem 285.

3304.

Idem 285. Approbations des 06 et 13/05/1896.

3305.

Idem 285.

3306.

PERIER J. - Les véhicules d'incendie à Lyon, Lyon, Editions du XX Mars, 1990, 142 p. ; p. 43.

3307.

Tous les moyens présentés, échelles aériennes, à coulisse et à crochets, sont des matériels continuant de former les parcs urbains modernes des services d'incendie et de secours.

3308.

Le Progrès du 09/11/1898.

3309.

AML, 1270 WP 016 – Sapeurs-pompiers : Matériel, équipement et habillement : Documents publicitaires ; 1822-1910. Catalogue MERRYWEATHER and SONS du début du XXème siècle.