122. Le retournement des années soixante-dix

1221. Le contexte : retournement de la croissance économique, raréfaction des ressources publiques et développement des externalités du trafic routier

Les politiques de transport urbain des années 60 et début 70 ont été essentiellement fondées sur des stratégies d’investissement. Durant cette période, les responsables se sont efforcés de rattraper le retard français en équipements, puis de répondre à l’explosion des déplacements en voiture particulière grâce à une politique d’investissement volontariste. Le développement de l’urbanisation et de la mobilité au cours des années 60 pouvait laisser présager une période de forte croissance. C’est dans ce cadre que fut votée le 30 décembre 1967 la LOF (Loi d’Orientation Foncière). La planification s’appuyait à l’époque sur l’élaboration de schémas d’aménagement et d’urbanisme (SDAU)3. Ces schémas de planification s’appuyaient sur des études de prévision du développement urbain consistant principalement en des projections de tendances de l’urbanisation. Cette méthodologie s’est heurtée à certains problèmes, révélant le caractère peu fiable des projections sur lesquels se fondaient les SDAU. La croissance urbaine des villes centres a, en effet, enregistré un certain ralentissement provoqué, entre autres, par une multiplication des difficultés de circulation, auxquelles s’ajouteront de nombreux effets négatifs comme le bruit, la pollution et surtout des difficultés croissantes de stationnement. Celles-ci vont entraîner une délocalisation de nombreuses activités, qui à l’image des commerces, vont s’installer en périphérie. Par ailleurs, c’est au milieu des années 70 que l’on commence à observer les effets de masse du phénomène de périurbanisation : les ménages quittent la ville-centre pour s’installer en périphérie.

En outre, le retournement de la croissance économique, la raréfaction des ressources publiques, la dégradation des conditions de circulation et les nombreuses impasses théoriques dans lesquelles se sont trouvés les modèles de trafic, ont contribué à une remise en cause de certaines pratiques de planification. Cette remise en cause des outils conventionnels ne s’est pas traduite par un abandon des instruments utilisés jusque-là, mais par une nouvelle définition de leur champ d’étude. Cette période est marquée par une volonté d’infléchir la croissance explosive de la mobilité motorisée individuelle. Il s’agit alors de comprendre quelles sont les motivations exactes qui président aux choix de déplacement des individus et d’évaluer les conséquences d’une mesure ponctuelle de court terme.

En matière de politiques adoptées, les grands projets d’investissements font place à des stratégies moins coûteuses, visant à réguler le trafic plutôt qu’à offrir de nouvelles capacités. Les plans de circulation deviennent le principal moyen de revitalisation des centres. En outre, la planification des transports collectifs est relancée au milieu des années 60 avec la remise en cause de la politique fondée sur le « tout automobile ».

Notes
3.

Le SDAU est un plan à long terme qui formalise de façon grossière le futur de la ville. Il fixe les principales options qui seront retenues pour l’avenir en matière d’aménagement et d’urbanisme. Il est également chargé d’établir l’organisation générale des transports avec en particulier la détermination des infrastructures nouvelles à un horizon de moyen et long terme. Il prévoit à cet effet la constitution des plans d’occupation des sols (Le Nir, 1991).