23. Les erreurs dans les modèles conventionnels

231. La définition de l’erreur dans un modèle

S’interroger sur les erreurs d’un modèle renvoie à se poser la question de savoir si le modèle est proche de la réalité. Comment juger, ou mieux mesurer, si le modèle est proche de la réalité ? Leurent (1997) met en évidence que l’erreur dans un modèle est de nature plurielle, et doit être décomposée en erreur de conception, erreur formelle, erreur algorithmique et incertitude de type économétrique (qui englobe l’erreur d’estimation et l’erreur exogène). L’erreur de conception renvoie à l’analyse de la composition conceptuelle, c’est-à-dire à l’ensemble d’éléments et de relations entre éléments. Son étude passe par l’analyse systémique. L’erreur formelle renvoie à l’analyse de la formule caractéristique qui est la synthèse en langage mathématique des mécanismes explicatifs. On doit vérifier que la formule caractéristique est conforme au contenu conceptuel et doit être cohérente. Les mathématiques appliquées sont les instruments utilisés pour vérifier cette conformité. L’erreur algorithmique renvoie à l’analyse de la procédure de résolution. Celle-ci consiste à produire une solution par un dispositif ad hoc. Les disciplines impliquées sont la physique, l’algorithmique et l’informatique. L’analyse consiste à se demander si le dispositif fournit vraiment une solution, et avec quelle précision. L’erreur de type économétrique renvoie à l’analyse de l’alimentation économétrique du modèle c’est-à-dire à la spécification des fonctions de dépendance et des inputs. D’autres types d’erreurs peuvent être considérées relativement au mode d’application des modèles. Par sa nature, son développement technologique, son organisation et ses croyances, la société influe sur le modèle et son usage. Un acteur qui intervient dans un processus de décision a deux raisons fondamentales pour employer un modèle : éclairer un problème, soutenir une argumentation. Ces deux fonctions se combinent de multiples manières selon l’objectif de l’acteur :

  • éclairer le mieux possible et partager les résultats, sans plaider pour un projet donné,

  • soutenir un projet par la « caution scientifique » du modèle, employé avec le souci d’un éclairage de qualité,

  • réclamer la « caution scientifique » mais sans souci de qualité d’éclairage, avec jusqu’à l’emploi forcé du modèle, ou la présentation de résultats qui n’ont aucun rapport avec le modèle,

  • éclairer le mieux possible et garder les résultats pour soi,

  • idem, tout en soutenant un projet donné par une application forcée.

Parfois, les modèles conventionnels ont été utilisés davantage dans la perspective d’apporter une caution scientifique au projet plutôt que de réellement éclairer le problème.

Par ailleurs, Godard (1981), lors de la 58ème Table Ronde de la Conférence Européenne des Ministres des Transports, a proposé une synthèse des principales causes d’écarts qui peuvent être relevées entre les prévisions et les observations. Il distingue les causes directement observables et identifiables des écarts (qu’il appelle causes « immédiates ») et les causes plus diluées, d’ordre institutionnelles.