323. La mesurabilité des modèles désagrégés

Le respect du critère de mesurabilité est subordonné à deux éléments : le premier est constitué par la mesure individuelle des caractéristiques des alternatives ; le second est lié à la définition de l’ensemble des alternatives de choix. Le premier élément est soumis à la condition de la cohérence du modèle avec ses objectifs. Quant au second, la détermination de l’ensemble des alternatives qui s’offrent à l’individu est cruciale sur le plan de la cohérence du modèle : pour chacune des alternatives de l’éventail de choix associé à l’individu, la probabilité de choix doit être non nulle. Or, on ne fait qu’observer des choix révélés et non des probabilités, ce qui implique une inférence à partir des observations sur l’éventail des alternatives offertes : le regroupement d’individus ayant des éventails de choix différents, ce qui suppose du point du vue théorique des modèles de choix différents, modifie la valeur de la fonction de vraisemblance associée et introduit une erreur dans l’estimation des paramètres du modèle.

Les progrès effectués dans la tentative d’explication de la demande de transport ont eu le mérite de mieux cerner les comportements des citadins (modèles désagrégés). Cependant, l’accent n’a pas été toujours suffisamment mis sur le contexte géographique dans lequel est plongé l’individu désireux ou contraint de se déplacer. En d’autres termes, l’amélioration de la connaissance des comportements individuels a été menée en considérant les citadins d’une « ville abstraite » ou définie en termes généraux et imprécis (Balavoine, 1981). Les conséquences de cet appauvrissement méthodologique sont importantes. Considérer la ville comme une entité neutre, uniquement définie en termes de population ou de surface, c’est nier à l’agglomération l’originalité de la distribution spatiale des fonctions urbaines qui régit les déplacements.

En outre, ces modèles désagrégés répondent principalement à une problématique de planification à court terme. Après ce repli de la gestion à court terme des systèmes de transports urbains, la nécessité d’une dimension stratégique devient le leitmotiv de tous les responsables de la planification. Elle va alors encourager le développement des modèles stratégiques urbains et des modèles interactifs de transport et de localisation. Ces modèles s’efforcent d’une part, de considérer un horizon de long terme, et d’autre part de surmonter la critique adressée aux modèles à quatre étapes d’être trop statiques et conservateurs, par la prise en compte des interactions du système de déplacements.