421. La modélisation stratégique

Il apparaît clairement que toute mesure de transport est sujette à des risques, environnementaux ou financiers, et que ces mesures ont souvent des effets à long terme. Ceci explique pourquoi il existe un regain d’intérêt concernant les outils qui permettent la détection de ces risques et de leurs conséquences. De tels outils renvoient à des instruments permettant des simulations de long terme (>10 ans) des effets potentiels des politiques de transport dans un contexte en évolution et non contrôlé. Ces outils doivent également être flexibles, permettant de tester des alternatives de transport sous des hypothèses contrastées de l’évolution du contexte socio-économique (par exemple, la croissance économique, les revenus, etc.). Bien sûr, les résultats ne doivent pas être des précisions détaillées d’un futur inéluctable, mais plutôt des idées sur le degré des différentes tendances de développement connectées à des hypothèses contrastées et à différentes actions politiques. Ces outils doivent jouer un rôle pédagogique, aidant les autorités organisatrices à confronter les résultats possibles de leurs actions.

L’objectif d’un modèle stratégique est d’être capable à l’échelle d’une agglomération de simuler les conséquences de politiques variées de transport, sous des hypothèses contrastées de développement urbain, socio-économique et démographique. Le concept de modèle stratégique n’est pas nouveau puisque par exemple le modèle QUINQUIN a été développé dans les années 80 (Bonnafous, 1985 ; Bouf, 1989 ; Tabourin, 1989 ; Bonnafous et Tabourin, 1995). Ce modèle prend en compte la dimension stratégique de long terme pour évaluer les conséquences des politiques de transport, dans le domaine du financement du transport public et de la congestion routière (Raux, Tabourin, 1992).

De nombreux modèles stratégiques ont été élaborés au Royaume-Uni dans le cadre d’études de transport, notamment à Londres (Olfield, 1993), à Birmingham (Jones, 1990) et à Edimbourg (Bates et al., 1991). Ces modèles ont pour principe de fonctionner avec un nombre de zones réduit, une représentation de l’offre de transport par des relations flux-vitesses entre les zones, et une prise en compte des rétroactions de l’état de l’offre sur la demande. Dans la même veine, un modèle stratégique a été élaboré sur l’agglomération lyonnaise (Masson, 1995 ; Raux et al., 1996). La structure générale d’un modèle stratégique obéit aux règles suivantes (Bates, 1993). Les modifications de la demande de transport sont d’une part, engendrées par des variables exogènes au modèle (effets dus à l’utilisation des sols, des revenus, de la possession de la voiture particulière) et d’autre part, provoquées par des variations des conditions de transport, exprimées par des coûts généralisés. Ainsi, les matrices O-D de la répartition modale et de la distribution, peuvent potentiellement être modifiées si les conditions de transport changent. Les modèles stratégiques prennent en compte l’ensemble du système de transport, c’est-à-dire les modes privés et les modes publics et les interactions entre ces modes. Ces modèles ont également la particularité de rendre compte des réactions des usagers suite à des variations des conditions de transport : modification du choix d’itinéraire, du choix du mode ou de celui de la destination du déplacement.