Section 5. La mise en place des rétroactions dans le modèle

Dans les sections précédentes, le modèle a été décrit de façon linéaire. Chaque module représente une étape dans le processus de déplacement, et chaque module produit des sorties qui servent d’entrées au module suivant. Dans cette perspective, le modèle présente une structure conventionnelle de modèle de transport à quatre étape, enrichie cependant par les modules de répartition spatiale des résidents et des activités économiques en amont. L’enchaînement linéaire des modules permet de simuler la demande de déplacements à un instant donné. Cette demande est conditionnée d’une part par la structure urbaine des activités et des résidents puisque les déplacements n’existent que dans la perspective de la réalisation d’une activité, et d’autre part par les conditions de déplacements dépendant des caractéristiques d’offre. A ce niveau, le modèle présente une structure statique. Plusieurs éléments sont introduits dans le modèle afin de rendre dynamique cette structure. D’une part, de façon interne à chaque module, certains paramètres ne sont pas posés constants dans le temps. C’est le cas des coefficients multiplicateurs des emplois induits qui ont été projetés par rapport au temps. C’est le cas également des coefficients de conductance des modèles gravitaires de distribution, dont l’évolution suit celle de la motorisation. D’autre part, la structure du modèle est dynamisée de façon externe par l’introduction de boucles rétroactives permises par le fonctionnement en pas à pas du modèle. Ces boucles de rétroactions sont présentes à plusieurs niveaux dans le modèle et leur temporalité est distincte selon le motif considéré. Leur description est effectuée par la suite, en partant des rétroactions de court terme jusqu’aux rétroactions de long terme. Chacune de ces rétroaction représente l’effet d’une modification des conditions de déplacements (dont la source peut être multiple : modification de l’offre de transport, surcharge des réseaux du fait d’une forte augmentation de la demande de déplacements, etc.) sur la demande de déplacements, et à long terme sur les générateurs de cette demande.

• - à très court terme, la première rétroaction considérée est celle des modifications des conditions de transport sur la répartition des déplacements sur les itinéraires du réseau routier. Cette rétroaction est prise en compte de façon interne dans le modèle d’affectation dans la mesure où l’affectation s’effectue par tranches successives et itératives et qu’à chaque itération les modifications de déplacements sur chaque tronçon sont représentées par la fonction débit-vitesse. Concernant cette rétroaction, les véhicules sont affectées sans distinction de motifs.

• - à court/moyen terme, la deuxième rétroaction considérée met en jeu l’effet des modifications des conditions de déplacements, à savoir les temps généralisés sur le partage modal VP/TC. Cette rétroaction est mise en place pour les motifs de déplacements suivants : résidence-travail, résidence-achat, résidence-service, résidence-loisir et l’ensemble des autres motifs. La spécification du partage modal des déplacements pour ces motifs permet en effet d’intégrer cette rétroaction dans la mesure où une des variables du modèle est la différence des temps généralisés VP/TC. A contrario, le partage modal des déplacements pour les motifs de l’enseignement (primaire, secondaire et supérieur) ne peut pas être sensibilisé aux modifications des conditions de déplacements. Pour les motifs de l’enseignement primaire et secondaire, ceci peut être justifié par la contrainte de la carte scolaire. Une distinction temporelle concernant les temps de réaction du partage modal à la modification des conditions de déplacements est introduite selon les motifs. L’étalonnage des temps de rétroaction est arbitraire, et teint du bon sens dans la mesure où ces paramètres ne peuvent pas faire l’objet d’un calage. L’hypothèse posée postule que les déplacements contraints sont moins flexibles que les déplacements non contraints. Cette hypothèse est confortée par la valeur des coefficients de la variable de différence des temps généralisés dans les modules de partage modal. En effet, la sensibilité à cette variable est plus élevée pour les motifs achat et loisir, c’est-à-dire des motifs non contraints. Ceci peut s’expliquer par le fait que le temps passé à effectuer ces activités est relativement plus faible que celui passé sur le lieu de travail, ainsi les individus acceptent moins facilement de consacrer beaucoup de temps à ces déplacements et cherchent la solution de transport la plus efficace en termes de temps et de coûts de déplacements. Le temps de rétroaction sur le partage modal pour les déplacements à motifs non contraints est posé égal à 2 ans. Le temps de rétroaction sur le partage modal des déplacements pour le motif travail est supposé être plus long et est posé comme étant égal à 5 ans.

• - à moyen/long terme, la troisième rétroaction considère les effets de la modification des conditions de déplacements sur la distribution des déplacements. Les modules de distribution des déplacements sont en effet sensibilisés à la variable « temps généralisés » du fait qu’ils l’intègrent comme variable. Une distinction est réalisée sur les temps de rétroaction selon les motifs. Par ailleurs, les valeurs des coefficients de conductance se distinguent fortement entre les motifs. La valeur de la conductance est forte pour les motifs contraints comme le travail et l’enseignement supérieur. Ceci représente une forte résistance aux temps de déplacement : les individus acceptent de se déplacer plus longtemps pour réaliser ces activités. L’hypothèse qui en découle est alors que la distribution des déplacements pour ces motifs est relativement rigide aux modifications des conditions de déplacements du fait de la résistance aux changements de destination des déplacements pour ces motifs. Ceci est lié à un univers de choix plus restreint économiquement et spatialement des lieux de destination par rapport aux lieux possibles d’achat, de service, etc. L’hypothèse concernant les temps de rétroaction sur la distribution des déplacements contraints est de 5 ans, celle sur les déplacements non contraints est de 3 ans.

• - à long terme, le dernier type de rétroaction se réalise sur la répartition spatiale des générateurs des déplacements. Il s’agit de la rétroaction du système de transport sur le système d’urbanisation. Les modifications des conditions de déplacements, portées par des changements dans les temps généralisés, entraînent des modifications des accessibilités. La répartition des activités urbaines et des résidents étant en partie conditionnée par des facteurs d’accessibilité, les modifications des conditions de déplacement ont donc des effets sur la structure urbaine. Ces effets se font à long terme. L’hypothèse est posée que les effets sur la répartition des localisations se manifestent avec un délai de 10 ans. En effet, les coûts de transaction, non pris en compte dans le modèle, sont élevés, ce qui explique une certaine inertie dans les changements de la répartition spatiale des lieux résidentiels et des activités urbaines.

L’ensemble de ces boucles rétroactives permet de rendre le modèle interactif. L’organigramme suivant représente ces boucles.