“ Relief et louange ” fait une place importante aux noms propres, anthroponymes et toponymes. Si le nom propre a pour fonction d’individualiser et surtout d’identifier, il présente dans ce poème des fonctionnements et des valeurs différentes.
Le fonctionnement linguistique habituel du nom propre apparaît dans l’emploi d’“ Anthéor ”, des “ trois Mages de Bourgogne ”, de “ Septentrion ” et “ d’Eve d’Autun ”.
Une recherche de type encyclopédique nous apprend qu’Anthéor est un village au bord de la Méditerranée. Si ce lieu semble fortuit, l’anthroponyme Eve et les deux toponymes que sont la Bourgogne et Autun relient en revanche le poème à une géographie précise et marquée par l’histoire : ville historique, Autun a une cathédrale romane, la cathédrale Saint-Lazare, support architectural où s’inscrit une culture chrétienne, livre d’images en pierres. Le nom “ Mages ” se trouve doté d’une majuscule car il désigne les trois mages par excellence dans la culture chrétienne, les trois rois qui vinrent “adorer” l’enfant Jésus à sa naissance. L’article défini traduit une notoriété reprise par la majuscule. Ces trois mages sont notamment sculptés sur l’un des remarquables chapiteaux de la cathédrale : ces Rois, tous les trois couchés sous la même couverture, ressemblent à des hommes. Un ange montre, sous l’apparence d’une fleur, l’étoile du berger au premier roi qui a les yeux ouverts, et au second qui n’a, en effet, qu’un œil déclos tandis que le troisième dort.
L’identification des noms propres est directe et sans ambiguïté. Si la représentation d’Eve est fréquente, la détermination dans le syntagme “ Eve d’Autun ” spécifie le référent : elle constitue une expression métonymique qui prend le représenté pour l’œuvre qui le représente, et le particularise par la localisation géographique de la sculpture. Cette dernière se trouvait précisément sur le linteau du portail nord de la cathédrale, au septentrion, la direction dans laquelle regarde le second roi mage. La majuscule du nom “ Septentrion ” n’est pas indispensable et traduit l’unicité et la notoriété du référent d’ordre toponymique avec l’article défini. Etymologiquement, le mot désigne en latin les sept bœufs de labour, c’est-à-dire l’Ourse polaire, située approximativement au nord. Or, sur le linteau du portail nord de la cathédrale, effectivement “ à faible distance ” du chapiteau où l’on pouvait voir le sommeil des rois, se trouvait originellement Eve. Le regard du second mage pourrait bien désigner une autre tentation que celle de “ sa créance imprécise ” 95 , et représenter le risque d’un dévoiement du religieux vers le trivial. On souligne souvent la sensualité de cette Eve romane en pleine tentation puisqu’elle est en train de cueillir la pomme.
Autun, la Bourgogne, Eve, les Mages : ces références connues, de type encylopédique, correspondent bien à une évocation “touristique”, le temps d’“ un été ”.
L’étoile du berger est généralement identifiée à Vénus, visible à l’est le matin et à l’ouest le soir.