2. “ ...et louange ”

Le champ sémantique de louange est moins riche que celui de relief. On retrouve cependant le signifié de relief comme contenu dans l’action de louer, dans l’éloge comme pratique, et on le retrouve également comme forme dans la mesure où louange désigne aussi un témoignage verbal ou écrit. Le poème rend hommage à Yvonne Zervos de ces deux façons : louange et relief se font écho car ils ont chacun une acception qui désigne un contenu et une autre qui renvoie à une forme. Louange présente en outre l’intérêt phonétique de concentrer dans un seul signifiant la lecture de deux autres : lou-ange, loue l’ange... la figure féminine se fait ange et angélique, dans un contexte religieux et païen. La notion de mot comme catégorie morphologique disparaît de nouveau : l’unité graphique se décompose en unités phoniques différentes. On trouvait déjà dans la juxtaposition encore plus singulière d’“ Hommage et famine ” 113 les mêmes jeux de signifiants et de signifiés : ce titre lie en effet la soumission féodale à l’envie, mais il inscrit également l’homme et la femme dans ces rapports qui deviennent allégeance et désir entre les deux sexes, sur le plan aussi bien poétique qu’amoureux. Morphologiquement, “ Relief et louange ” associe un terme masculin et un terme féminin, comme “ Hommage et famine ”, mais l’effet de sens sexuel est peu probable.

Lorsqu’il apparaît dans un titre, le nom commun a un emploi particulier, celui d’un nom propre, et son fonctionnement référentiel et sémantique se modifie. Le poème permet d’actualiser toutes les virtualités lexicales des deux termes éponymes. La mise en œuvre de leur polysémie dans un contexte implique alors une lecture dynamique et suscite des effets de sens qui renforcent la cohérence du poème. Le nom commun devient le mot le plus adéquat pour désigner le réel.

Mais c’est en vertu de son emploi dans une position qui appartient plutôt au nom propre que le nom commun tend à lui emprunter son fonctionnement sémantique. Un rapport essentiel s’établit entre le sujet et ce qu’il nomme avec un nom propre en vertu d’un désir de maîtrise, de connaissance, mais aussi en vertu d’un investissement subjectif dans la nomination. Or, à cette place privilégiée qu’est le titre, le nom commun est soumis à ce même type de rapport.

Notes
113.

“ Hommage et famine ”, Fureur et Mystère, O. C., pp. 147-148.