2. Un comportement parodique

La Bête apparaît dans un cortège, et sa présence bénéficie ainsi d’une certaine solennité, d’ordre social et religieux : elle “ ferme la marche du gracieux troupeau ”, dispose d’une “ parure ” et agit “ dévotement ”. Cette attitude est cependant constamment remise en cause par des éléments dépréciatifs. Si “ dévotement ” renvoie à la piété, il peut signifier également la bigoterie. De plus, la Bête est comparée à un “ cyclope bouffe ” et se voit décorée de “ quolibets ”, caractéristiques dévalorisantes. En effet, si l’adjectif bouffe renvoie au genre lyrique léger qui est en accord avec l’image de la procession de ce troupeau qualifié de “ gracieux ”, il est synonyme de bouffon au sens neutre de ce qui est plaisant et comique ; mais dans un emploi péjoratif, il marque le grotesque, le comique ridicule. Quant aux quolibets, ils désignent généralement des propos triviaux, railleurs et, selon le Littré, le mot est aussi un “ terme de musique ” qui “ se disait des morceaux d’un caractère comique et trivial ” et “ se dit aujourd’hui d’un centon musical ”. Le personnage appartient donc à une fantaisie toute carnavalesque. La procession est en définitive un rituel parodié, perdant par là même sa charge sacrée et décourageant tout respect : cette piété de carnaval suscite la pitié, car le spectacle de la dérision laisse place à celui de la déchéance physique.